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Roman

Mise au vert, Philippe Lacoche (par Murielle Compère-Demarcy)

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Mercredi, 04 Septembre 2019. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, La rentrée littéraire, Les éditions du Rocher

Mise au vert, septembre 2019, 392 pages, 19 € . Ecrivain(s): Philippe Lacoche Edition: Les éditions du Rocher

 

Il faut agir : agir c’est se révolter. Et si la voix de l’insoumission gronde plus fortement au pays du Vaugandy et partout en France depuis 2017, comme elle s’entonnait sur Le chemin des fugues (Philippe Lacoche, éd. du Rocher, 2017), sans être suffisamment entendue, parions qu’elle devrait se faire entendre par cette Mise au vert qui nous replonge dans la vie aventureuse de Pierre Chaunier. Car cette « mise au vert » a de la verve et le verbe d’un grand cru, digne de la « Dive Bouteille » chère à François Rabelais. Autrement dit, ce nouveau roman de Philippe Lacoche a du corps, du nez, de la robe, du bouquet, de l’esprit, du mordant, de la couleur, des larmes. Sa fresque réaliste et visionnaire nous remet en bouche l’épicé et le brûlé d’un contexte social contemporain, sans oublier d’ajouter ce supplément romanesque aux arômes fruité, floral et succulent, que nous offrent les histoires d’amour.

Scrabble, Une enfance tchadienne, Michaël Ferrier (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Mardi, 03 Septembre 2019. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Mercure de France, La rentrée littéraire

Scrabble, Une enfance tchadienne, septembre 2019, 200 pages, 21 € . Ecrivain(s): Michaël Ferrier Edition: Mercure de France

 

« J’eus une enfance de sable et de poussière. La vie nous avait posés là, sans crier gare, entre la savane et la steppe ».

« C’est ici que j’ai pris langue avec les bêtes et avec la terre, et ce négoce ne m’a jamais quitté ».

« La guerre s’approchait mais nous le savions pas. Elle chemine toujours ainsi, à petits pas. C’est une louve qui a perdu ses petits et qui est prête à tout pour dévorer ».

Scrabble est un lumineux livre de l’enfance, d’Une enfance tchadienne, tous sens en éveil. Une enfance placée sous le regard des hommes et des bêtes. Une enfance au ras de la terre pour mieux s’en inspirer, l’enfance d’un écrivain, béni des dieux africains. Michaël Ferrier offre ici des Traits et Portraits (1) de cette enfance unique et exceptionnelle entre la savane et la steppe. Ce livre est étourdissant de beauté, il grouille d’images, de sons, d’odeurs, de couleurs, de parfums d’Afrique, de mots et de gestes.

Le Temps des orphelins, Laurent Sagalovitsch (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Mardi, 03 Septembre 2019. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, La rentrée littéraire, Buchet-Chastel

Le Temps des orphelins, août 2019, 220 pages, 16 €. . Ecrivain(s): Laurent Sagalovitsch Edition: Buchet-Chastel

 

Du discours prononcé par Churchill le 13 mai 1940, on connaît la fameuse énumération : « du sang, du labeur, des larmes et de la sueur ». Mais on ignore souvent la suite : « faire la guerre contre une tyrannie monstrueuse, qui n’a jamais eu d’égale dans le sombre catalogue des crimes humains ». Elle montre que le Premier Ministre anglais savait que, sur le continent, se déroulait une entreprise qui n’avait rien à voir avec les horreurs traditionnelles de la guerre. De manière générale, oui, les chefs d’État alliés savaient que des dizaines de milliers de Juifs disparaissaient pour ne plus reparaître nulle part en ce monde. Ils avaient entendu parler de « camps de la mort », mais cette expression demeurait abstraite. Et, au milieu d’un flot ininterrompu d’informations, le grand public en avait vaguement connaissance. Mais entendre parler du processus d’extermination est une chose ; le découvrir dans sa matérialité, son épaisseur, sa réalité, en est une autre. Ce furent les soldats soviétiques (lesquels avaient mieux qu’une idée de ce que le totalitarisme signifie) qui pénétrèrent les premiers dans les camps nazis. Leurs témoignages là-dessus sont, semble-t-il, rares.

Le Nuage et la valse, Ferdinand Peroutka (par Guy Donikian)

Ecrit par Guy Donikian , le Lundi, 02 Septembre 2019. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Pays de l'Est, La Contre Allée

Le Nuage et la valse, avril 2019, trad. tchèque Hélène Belletto-Sussel, 573 pages, 25 € . Ecrivain(s): Ferdinand Peroutka Edition: La Contre Allée

 

Ce fut tout d’abord une pièce de théâtre jouée en 1947-1948, pièce écrite par Ferdinand Peroutka qui fut interné à Buchenwald par les nazis en raison de ses convictions démocratiques ; ce n’est qu’en 1976, alors exilé aux USA en raison du Coup de Prague, qu’il publie son texte sous la forme d’un roman.

La structure du texte donne une vision kaléidoscopique du nazisme, de la guerre jusqu’à la libération et les excès et autres « erreurs » commises alors. Ce n’est pas, en effet, une structure romanesque classique obéissant à une linéarité « confortable », mais plutôt un rhizome de personnages dont les trajectoires peuvent se recouper. Il y a malgré tout un fil conducteur cristallisé par une méprise liée à une homonymie. Un employé de banque est interné par erreur par les nazis, et ce personnage sera confronté à d’autres individus, des internés comme lui mais aussi des gardiens nazis.

L’éternel printemps, Marc Pautrel (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Vendredi, 30 Août 2019. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Gallimard, La rentrée littéraire

L’éternel printemps, août 2019, 128 pages, 13 € . Ecrivain(s): Marc Pautrel Edition: Gallimard

 

« Nous nous décrivons nos royaumes respectifs, et chacun de ces pays est un délice pour l’autre. Nous nous faisons la cour mutuellement. La conversation française est bel et bien une forme de pratique érotique ».

L’éternel printemps est un roman d’amour et de séduction. Un roman parfait, une vie princière, un voyage humain, l’écrivain possède, comme son éditeur, l’art rare de savoir choisir les noms qu’il donne à ses livres. Comme il possède celui de composer ses romans, et c’est bien de cela dont il s’agit, de composition, comme on le dit pour la musique et la peinture. Marc Pautrel possède cet art d’écrire avec la précision d’un artisan joaillier, chaque geste est pesé, chaque phrase millimétrée, chaque mot choyé. L’éternel printemps est un roman qui mise sur l’amour et la littérature, comme l’on mise sur la vie. L’éternel printemps est le portrait à la plume d’une femme aimée, aimée sur l’instant, pour le timbre de sa voix, cette intonation, cette tessiture, pour ses doigts fins comme des crayons-mines, la grande mèche de cheveux qui lui barre le front, avec ce mouvement réflexe adorable dont je ne me lasse pas, mais aussi pour ses pertes d’équilibre – Je guette ses secondes de folie, les éclairs durant lesquels elle quitte la route et s’envole pour quelques minutes –, et sa conversation, cet art de vivre si Français. L’éternel printemps est un roman de la conversation, de la fréquentation.