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Roman

Nous sommes les chardons, Antonin Sabot (par Catherine Dutigny)

Ecrit par Catherine Dutigny/Elsa , le Mercredi, 21 Octobre 2020. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Presses de la Cité

Nous sommes les chardons, Antonin Sabot, octobre 2020, 272 pages, 20 € Edition: Presses de la Cité

 

Créé en 2019, le prix Jean Anglade, fondé par les Presses de la Cité à l’initiative des membres du Cercle Jean Anglade, récompense un premier roman portant les valeurs chères au romancier : humanisme et universalité. Cette année, Agnès Ledig a remplacé Franck Bouysse à la présidence d’un jury composé de journalistes, universitaires, bibliothécaires, libraires et blogueurs. Leur choix s’est porté en cette édition 2020, sur l’ouvrage d’Antonin Sabot, Nous sommes les chardons.

Le roman est un long monologue, entrecoupé de courts dialogues, de Martin, un jeune homme d’une vingtaine d’années, élevé par son père, ex-professeur à la Sorbonne, vivant dans un coin reculé d’une région montagneuse. Privé des cours de l’Éducation nationale, l’enfant a grandi sous l’œil à la fois ferme et bienveillant de cette figure paternelle qui a coupé les ponts avec son ancien métier, Paris, la mère de Martin, et ses amis, pour vivre au contact de la nature, jardiner, élever des vaches, produire du fromage, en ne gardant pour fidèles compagnons que des livres, une amie, Marie-Louise, et Mado, mémoire des anciens paysans de la région, une vieille éleveuse de chèvres.

Ragtime, E.L. Doctorow (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mardi, 20 Octobre 2020. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Pavillons (Poche)

Ragtime (1975), trad. américain, Janine Hérisson, 399 pages, 8,90 € . Ecrivain(s): Edgar Laurence Doctorow Edition: Pavillons (Poche)

 

Doit-on vraiment continuer à chercher le « roman américain » ? Ce fameux roman qui serait pétri de l’Amérique même, son histoire, sa folie, sa grandeur, sa violence ? La lecture de Ragtime est assurément l’occasion de se poser la question tant on a l’impression de le tenir dans les mains. L’épopée américaine du premier XXème siècle – celle de l’époque dite « belle » – se fait roman sous la plume corrosive, ironique, puissante de Doctorow. Une épopée en noir et blanc bien sûr tant la présence des esclaves et descendants d’esclaves a scandé d’épisodes sanglants et effroyables l’Histoire des États-Unis. C’est avec une finesse aiguë que Doctorow a choisi son titre, Ragtime, musique noire qui, durant des décennies du XXème siècle, a fait danser les Blancs. C’est le roman entier qui est écrit à ce rythme effréné, syncopé, haletant : Changements de temps dans la scansion des phrases, passages d’un thème à l’autre, d’une histoire à l’autre, d’un personnage à l’autre.

2 romans de Kathya de Brinon aux éditions Maïa (par Jean-Jacques Bretou)

Ecrit par Jean-Jacques Bretou , le Mardi, 20 Octobre 2020. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres

 

Des larmes dans les yeux et un monstre par la main, Kathya de Brinon, Éditions Maïa, 2018, 334 pages, 19 €

La femme aux cicatrices, Survivante de l’inceste, Kathya de Brinon, Éditions Maïa, 2019, 315 pages, 24 €

 

Deux livres pour pousser un cri, deux livres pour appeler au secours contre l’inceste et la pédocriminalité. Et un lourd réquisitoire prononcé par l’auteure qui témoigne de plus de 60 ans de souffrance après son viol par l’un de ses grands-pères à l’âge de 9 ans.

Kathya de Brinon a attendu longtemps mais sa parole n’en est que plus forte pour parler de son enfance définitivement gâchée et de sa vie d’adulte morcelée le 15 août 1948. Pour porter l’éclairage le plus juste sur les dégâts causés par ce traumatisme initial elle a pris son courage à deux mains et sa rage aidant a écrit sa biographie.

Le Cafard, Ian McEwan (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Mardi, 20 Octobre 2020. , dans Roman, Les Livres, Les Chroniques, La Une CED, Iles britanniques, Gallimard

Le Cafard, Ian McEwan, Gallimard, mai 2020, trad. anglais, France Camus-Pichon, 154 pages, 16 €

Les cafards dorment-ils ? On suppose que oui, même si on avoue ne s’être jamais posé la question. Quoi qu’il en soit, un cafard s’est réveillé un beau matin dans un corps qui n’était pas le sien, un corps immense, dépourvu de carapace, mais avec une tête volumineuse, sans antennes, et (seulement) deux paires de membres. De surcroît, si ce corps n’était pas le sien, ce n’était pas non plus celui d’un quidam. C’était le corps du Premier Ministre anglais.

Cette histoire de cafard rappellera quelque chose au moins érudit des lecteurs. Ian McEwan le sait et il convoque également les mânes de Swift, maître en satire et en misanthropie. Le Cafard ressuscite deux genres anciens : le roman à clefs et le roman à thèse. Le roman à clefs procure toujours au lecteur un plaisir spécial, fait de connivence, même si – comme ici – les clefs sont plutôt grosses. Jim Sams (le cafard) est bien entendu Boris Johnson (à l’état-civil Alexander Boris de Pfeffel Johnson), ce pur produit de l’élite britannique, lettré et polyglotte, devenu le porte-parole d’un vif (res)sentiment anti-élitaire ; exactement comme Donald J. Trump, l’énergique milliardaire new-yorkais. Dans Le Cafard, ce dernier correspond évidemment à Archie Tupper, le président des États-Unis, qui commence sa journée par écrire des tweets depuis son lit. Ceux qui connaissent les méandres de la vie politique anglaise ne manqueront sans doute pas d’observer d’autres correspondances.

La naissance d’un père, Alexandre Lacroix (par Arnaud Genon)

Ecrit par Arnaud Genon , le Lundi, 19 Octobre 2020. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Allary Editions

La naissance d’un père, Alexandre Lacroix, Allary Éditions, août 2020, 461 pages, 20,90 € Edition: Allary Editions

 

Le père, ce héraut…

La figure paternelle hante depuis son premier roman l’œuvre d’Alexandre Lacroix. Premières volontés (Grasset, 1998) commençait par l’image du corps du père du narrateur, pendant au bout d’une corde, et contenait l’histoire d’un pardon, celui d’un fils qui avait honte de l’avoir ainsi perdu, qui souffrait, dans une violence sans nom, de cet abandon. Dans la deuxième partie de L’Orfelin (Flammarion, 2010), le narrateur revenait à La Villedieu, la ville natale, pour faire l’inventaire, vingt ans après sa mort, des dix-sept cartons qu’avait laissés ce même père. Ce roman se clôturait par l’évocation de sa propre paternité. L’enfant était à son tour devenu père. La boucle, disait-il, était bouclée…

Comment Alexandre Lacroix aurait-il pu cependant s’arrêter là ? La paternité n’est-elle pas un sujet en or d’autant plus précieux que rares sont les écrivains à l’avoir exploré ?