Un apeirogon est un polygone infini, à multipes facettes. Le roman de Colum McCann est, de la même façon, une construction très élaborée, en forme de boomerang ou de boustrophédon : des chapitres de longueur variable, allant de la phrase à la dizaine de pages, tels des versets ou des sourates, vont croissant de 1 à 500, avec un point d’orgue ou acmé à 1001, puis vont décroissant de 500 à 1. On pense à un retour temporel, à un parallèle existentiel, à l’Hyperion de Dan Simmons et à la course des pèlerins contre le temps.
On pense aussi à une fresque multifocale, extrêmement documentée, dans laquelle le lecteur est assailli d’informations à la fois tragiques et poétiques : ainsi, on apprend que « le terme mayday -apparu en Angleterre en 1923, mais dérivé du français « Venez m’aider »- est toujours répété trois fois, mayday, mayday, mayday. La répétition est vitale : dit une seule fois, le mot pourrait être mal interprété […] » ; de même, « le seelonce mayday, ou silence de détresse, est maintenu sur la fréquence radio jusqu’à ce que le signal de détresse soit terminé.