Identification

La Une CED

Yannick Kujawa : La manche et la pioche, par Hans Limon

Ecrit par Hans Limon , le Jeudi, 05 Avril 2018. , dans La Une CED, Les Chroniques

 

Soyons limpides et concentrés comme sait l’être à merveille ce bon vieux-jeune Kujawa. Simples et souples. Chez lui, tout vient du bassin. Du bassin minier, plus particulièrement. Au point du jour il se retrousse la manche, à froid se ramasse et fait gémir la pioche. Ses romans suintent l’humilité nordique. Pas vraiment du genre à chasser le prix littéraire ni même la bête à cornes. Paysan pas revenu. Imaginez-le rien qu’un instant sur la couv’ de Télérama, portant fièrement le daim sur les godasses et les épaules… Il pourrait, mais ne le fait pas. Comment nommer cette anomalie ? La modestie.

Yannick est un diseur. Il dit. « Elle dit », lunaire et laconique. Un Zola taillé à la hache. Non, à la pioche, vous dis-je. Un fils de la terre. De cette glaise qui s’accroche aux souliers polonais pour se disséminer partout sur le sol franco-allemand. Le marc de café ressemble aussi à la tourbe, après tout. Laissons conter la griotte :

Islamo-féminisme, des femmes relisent les textes religieux, Feriel Bouatta, par Nadia Agsous

Ecrit par Nadia Agsous , le Mercredi, 04 Avril 2018. , dans La Une CED, Les Chroniques

Islamo-féminisme, des femmes relisent les textes religieux, Feriel Bouatta, Koukou Editions, Alger, octobre 2017

 

Des femmes osent l’exégèse islamique

 

Le féminisme islamique. Que signifie cette expression formée de deux mots jugés antinomiques ? L’islam et le féminisme sont-ils compatibles ? Est-il possible d’atteindre l’égalité entre les sexes en réinterprétant le Coran, les hadiths (paroles et actes du prophète) et le fiqh (jurisprudence musulmane) ? Si l’on se réfère aux féministes islamiques, la réponse est oui !

Qui sont ces femmes musulmanes, universitaires et intellectuelles pour la plupart, qui ont formé un courant de pensée féministe de nature théologique ? Dans quel contexte mondial leur mouvement a-t-il émergé ? Quelles sont leurs théories ? Leurs méthodes ?

C’est ce à quoi s’attelle Feriel Bouatta dans son livre intitulé Islamo-féminisme. Dans cet essai de 113 pages structuré en quatre chapitres, l’auteure présente le mouvement sous un angle historique et théorique.

Olga et les siens, Alain Jomy, par Pierrette Epsztein

Ecrit par Pierrette Epsztein , le Vendredi, 30 Mars 2018. , dans La Une CED, Les Chroniques

Olga et les siens, Alain Jomy, Alma Editeur, février 2018, 450 pages, 23 €

 

– Oui, on nous oubliera. C’est notre sort, rien à faire. Un temps viendra où tout ce qui nous paraît essentiel et très grave sera oublié, ou semblera futile. Curieux, mais il nous est impossible de savoir aujourd’hui ce qui sera considéré comme élevé et grave, ou comme insignifiant et ridicule… Anton Tchékhov (Les Trois Sœurs, trad. Génia Cannac et Georges Perros).

Alain Jomy a décidé de faire mentir cette affirmation. Il va remonter le cours du temps, réactiver la mémoire et creuser l’histoire de sa filiation avec la minutie d’un détective à l’affût du moindre indice et la compétence d’un documentariste en liant l’atmosphère d’une époque agitée, retrouvée dans des archives, avec toutes les traces conservées par chacun des membres de sa famille pour reconstituer les pérégrinations de sa lignée depuis le dix-neuvième siècle jusqu’à aujourd’hui. C’est pour lui, au moment où il a atteint un âge respectable et où il est un des rares ascendants encore en vie, comme une mise en demeure impérative de faire revivre tous ces disparus. Depuis l’enfance, il écoutait beaucoup. En prenant de l’âge, il a fouillé partout, il a voyagé dans tous les pays où sa lignée avait à un moment de ses pérégrinations déposé ses valises et son existence, avec une curiosité en éveil de reporter. Comme le documentariste qu’il est, il s’est donné comme mission de retisser cette histoire qui est aussi son histoire et de la transmettre.

L’air du dehors, par Marianne Braux

Ecrit par Marianne Braux , le Mercredi, 28 Mars 2018. , dans La Une CED, Ecriture

 

Ça veut sortir. Là, tout au milieu de soi, quelque part entre la gorge et le sexe, quelque chose de trop grand pour soi demande à voir le jour (lapsus, j’avais écrit « le dire »). On ne sait pas ce que c’est (à y réfléchir, il y a peut-être un terme pour ça, je le dirai le moment venu), on ne sait pas non plus de quoi ça aura l’air. On peut seulement se mettre à sa place, à la place de cette chose en soi, coincée sous la peau pour encore un peu de temps – on ne sait pas combien. En fermant les yeux, on peut imaginer ce qu’elle voit, la chose, et alors on voit du rouge. Un rouge sourd et battant, translucide, teinté ici et là d’ombres sans contours, qui parfois disparaissent. Un rouge… incubation (IN-CU-BA-TION, cela faisait des jours que je cherchais le mot !). C’est comme une série de beaux tableaux qui ramènent l’œil morne et expérimenté à un état d’avant la vie qu’on aurait oublié. La vision brûle un peu la cornée – on se demande si la chose au-dedans de soi a mal comme nous et si, elle aussi, elle prend plaisir à cette douleur. Car ce n’est pas une brûlure comme les autres ; c’est une brûlure saine, semblable à celle que fait une musique que l’on aime trop (une folie d’Espagne, une tarentelle), ou un poème, une phrase, sur la peau ténue de l’âme.

Où sont les philosophes ?, par Mustapha Saha

Ecrit par Mustapha Saha , le Mardi, 27 Mars 2018. , dans La Une CED, Ecriture, Création poétique

 

Où sont libres parleurs au forum des torcols

Où sont merles moqueurs des belles tragédies

Où sont magots railleurs aux barbes des blancs cols

Où sont génies farceurs des saintes parodies

 

Où sont veilleurs d’esprit dépurés de pétrole

Où sont déconstructeurs d’imprenables bastilles

Où sont maîtres-penseurs délivrés du contrôle

Où sont débroussailleurs d’impossibles tortilles