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La Une CED

Tropique de la violence, Nathacha Appanah, par Sandrine Ferron-Veillard

Ecrit par Jeanne Ferron-Veillard , le Vendredi, 15 Juin 2018. , dans La Une CED, Les Chroniques

Tropique de la violence, Nathacha Appanah, Folio, mai 2018, 192 pages, 6,60 €

 

« Ils prennent leur élan sur la jetée de béton, leurs jambes noires et maigres comme des bâtons filant à vive allure. Arrivés au bout, ils se jettent dans l’océan en remontant leurs genoux, ouvrant leurs bras, criant leur joie ».

La légèreté du désespoir. L’attraction du vide lorsque l’espoir ne retient plus.

À propos de ce livre magistral, qu’ajouter sinon saluer ici la note de lecture de Pierre Perrin, rédacteur à La Cause Littéraire.

Et pourtant !

Ici les odeurs ont un corps. Les sons. L’invisible est omniprésent.

Il faut écouter Mayotte pour qu’elle ne sombre pas. Le rapport à l’Autre qui ne fonctionne plus, l’accueil qui n’opère plus, le chômage et la pauvreté qui sont inacceptables, les politiques et la parole impeccable. Impraticable. Sentir ses couleurs, la couleur de ses peaux, la peau de ses enfants que même la terre n’accroche plus. Les enfants seuls, les enfants abandonnés. Ils errent, ils se terrent. Ils grandissent comme des fruits sur un arbre. Ils pourrissent.

Des fleurs dans le vent : Le cas Ristić, par Hans Limon

Ecrit par Hans Limon , le Jeudi, 14 Juin 2018. , dans La Une CED, Les Chroniques

Des fleurs dans le vent, Sonia Ristic, Intervalles éditions avril 2018

 

Si Rimbaud s’est mis du vent sous la semelle, comme il est dit, nul doute que ce dernier, je veux dire le vent, s’est de Sonia Ristić fabriqué deux paires à la mesure de ses élans. Car à celui qui voudrait la suivre, il faut savoir garder patience ou de ses mots se contenter. Or il arrive à la trombe humaine de s’alunir et livre en main de se prêter au jeu de l’entretien. Parfois. D’où ce jeudi 12 avril 2017 à Paris. Jour de sortie. Soir de partage. Dédicaces à tout rompre. Bizarre, enfin, de l’aborder par le bruit et l’odeur, Sonia. Les moins jeunes le savent bien. Les autres au diapason se mettront.

Des fleurs dans le vent. De prime(ur) abord, ça pue la bluette kitsch à trois centimes rouillés ou la dystopie bio pour masturbateurs de chevrotins lyophilisés. Pas possible… Rembobinons.

Quand la menthe pousse à Montréal !, par Amin Zaoui

Ecrit par Amin Zaoui , le Mercredi, 13 Juin 2018. , dans La Une CED, Les Chroniques, Chroniques régulières

 

La menthe pousse-t-elle à Montréal ? Pourquoi les jeunes Algériens, les garçons comme les filles, rêvent-ils de partir au-delà des frontières ? Pas uniquement les jeunes d’ailleurs, les vieux aussi. Tout le monde souhaite enjamber la mer. Sortir du pays. Quitter le village et la mère. Tourner le dos aux aïeux et à la montagne.

Et pourtant, nous avons un pays aussi beau que les autres terres d’Allah. Et nous avons une littérature aussi belle que les autres littératures du monde. Et nous avons trois langues, l’arabe, le tamazigh et le français. Et nous avons de belles femmes aussi belles que les autres femmes du monde. Et nous avons un soleil qui se lève et qui se couche à l’heure hivernale et à une autre estivale. Et nous avons des étoiles sur des têtes et des âmes pleines de dégoût ! Et nous avons du vin, du bon et du mauvais. Et nous avons des belles chansons. Et nous avons un désert vierge en forme d’un conte vivant. Et nous avons un Dieu qui nous guette, matin et soir, par le biais des yeux de ses deux anges fixés sur nos deux épaules, des yeux qui ne dorment jamais ! Et nous avons des fêtes nationales, d’autres religieuses et d’autres agricoles. Et nous avons des oranges. Et nous avons des olives et de l’huile d’olive. Et nous avons des banques (je ne suis pas sûr !).

Non mai dis donc… 68, par Joëlle Petillot

Ecrit par Joelle Petillot , le Mercredi, 13 Juin 2018. , dans La Une CED, Ecriture

J’eusse aimé raconter les réunions passionnées, le bazar jubilant, une belle histoire d’amour libre nouée sur les pavés lancés par ma révolte. Dzim et boum.

Joker.

Née en 1956, je m’employais à clore en ce chaud printemps une sixième paisible dite « classique » parce que le latin y figurait en place d’honneur, enseigné par une dame minuscule que ses colères tsunamiques rendaient immense. Elle nous formait, nous façonnait, traduisant la beauté, remontant le français à la source, faisant de l’étymologie une épopée, discutant parfois une heure entière avec nous qui devions lui dire quels livres on aimait, et pourquoi. Quand le mot « dialogue » s’imposa lors de cette période où tout valsait en l’air, il fut accueilli par elle d’un haussement d’épaule suivi d’un cassant : « Je le pratique déjà ».

À mon aimable honte, l’agitation ambiante m’offrit des cadeaux sans prix, bien éloignés d’une prise de conscience politique ; plus encore d’un sentiment d’urgence contre le vieil ordre des choses. Mes douze ans-qui-en-paraissaient-quinze (détail crucial en ce mai-là…) y trouvèrent le goût exquis de l’imprévu, la cassure dans le temps, un été précoce à la petite cuiller.

Histoire du scandale, Jean Claude Bologne, par Michel Host

Ecrit par Michel Host , le Mardi, 12 Juin 2018. , dans La Une CED, Les Chroniques, Chroniques Ecritures Dossiers, Chroniques régulières

Histoire du scandale, Jean Claude Bologne, Albin Michel, février 2018, 300 pages, 20,90 €

 

De la crucifixion aux femen

 

« …je reste convaincu que la notion de scandale s’est maintenue au cours des âges parce qu’elle correspond à une nécessité de notre culture occidentale, sinon de l’âme humaine » Jean Claude Bologne

« La multiplication des scandales a fini, pour un certain nombre d’électeurs, par jeter le discrédit sur la démocratie représentative », J.C. B.

« … le scandale n’a peut-être qu’une fonction dont découleraient toutes les autres : nous tenir en permanence en éveil… », J.C. B.

« Le scandale ne se résume pas au fait scandaleux : il suppose sa publicité et une réaction du public qui l’intègrent dans un processus dynamique où chaque concept trouve sa place », J.C. B.