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Les Livres

Renaître par les contes, Le rire de la grenouille, Henri Gougaud

Ecrit par Marie-Josée Desvignes , le Samedi, 24 Octobre 2015. , dans Les Livres, Critiques, Essais, La Une Livres

Renaître par les contes, Le rire de la grenouille, Editions du Relié, juin 2015, 192 pages, 18 € . Ecrivain(s): Henri Gougaud

 

Dans son avant-propos, Henri Gougaud mentionne que ce livre a d’abord été oral, plus exactement, il est « né de conversations avec [son] ami Benoît Chantre ». On n’en attendait pas moins du célèbre conteur qui d’ailleurs complète son ouvrage en nous offrant un CD rom de quelques contes dont il nous régale dans le livre.

Les contes peuvent-ils encore nous dire quelque chose de notre monde si effrayant fût-il encore ? Genre méprisé par les intellectuels, nous dit-il, il a encore tant à nous révéler. Et la démonstration qu’il en fait est un vrai régal ! Gougaud, d’abord conteur, se défend d’être un spécialiste mais il a des choses intéressantes à dire pour le bienfait de l’humanité. Dans un livre qui n’a rien de formaté, « il n’est pas un produit d’usine » mais « a poussé dans [mon] jardin », il nous délivre une leçon de vie empreinte d’une forte poésie et d’un métissage qui fait du bien à l’âme et au cœur.

Rien de plus anodin qu’un conte ? Pas sûr, nous dit-il. Les contes existent depuis la nuit des temps, ils continuent d’exister parce qu’ils ont quelque chose à nourrir en nous.

La septième fonction du langage, Laurent Binet

Ecrit par Patryck Froissart , le Vendredi, 23 Octobre 2015. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Grasset, La rentrée littéraire

La septième fonction du langage, Qui a tué Roland Barthes ?, août 2015, 495 pages, 22 € . Ecrivain(s): Laurent Binet Edition: Grasset

 

On a beaucoup parlé, on parle toujours beaucoup, et on parlera longtemps de ce deuxième roman de Laurent Binet.

Parmi les critiques en vogue qui se sont exprimés, il y en a eu qui ont affirmé, parfois avec une étrange emphase, l’ennui qu’ils auraient ressenti à la lecture de ce livre. Ceux-là sont des cuistres, des ignares, des béotiens, évidemment incapables d’apprécier l’ouvrage, qui croient pouvoir dissimuler leur inculture en dénigrant ce qu’ils ne peuvent comprendre, à la manière de tel personnage politique s’exclamant à propos de La Princesse de Clèves qu’il n’y a pas de texte plus ennuyeux…

Car ce roman est le chef d’œuvre de l’année, c’est une évidence.

Mais c’est un chef d’œuvre qui se mérite.

Plusieurs trames narratives s’y superposent, plusieurs intrigues s’y intriquent.

La fiancée de Bruno Schulz, Agata Tuszynska

Ecrit par Stéphane Bret , le Jeudi, 22 Octobre 2015. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Pays de l'Est, Roman, Grasset, La rentrée littéraire

La fiancée de Bruno Schulz, septembre 2015, traduit du polonais par Isabelle Jannès-Kalinowski, 400 pages, 22 € . Ecrivain(s): Agata Tuszynska Edition: Grasset

 

Dans quelle mesure le souvenir, la mémoire, et l’imagination peuvent-elles concourir à la restitution d’une vie ? Ou la travestir par le mensonge ? C’est ce processus passionnant que décrit Agata Tuszynska dans son roman, La fiancée de Bruno Schulz. Mais qui est Bruno Schulz ? Nous le découvrons au cours des différentes phases du récit, composé de trois parties distinctes : L’avant-guerre, se déroulant dans la ville de Drohobycz, dans les Carpates polonaises, et à Varsovie, dans les cercles littéraires et artistiques de la ville, la période de l’occupation et l’après-guerre qui clôt le récit. Jozefina Szelinska, dite Juna, muse, compagne de Bruno Schulz, le fréquenta de 1933 à 1937. Cette dernière est professeure, elle aime, comme lui, Kafka et Rilke qu’ils lisent tous deux dans le texte.

Ce qui fascine d’emblée le lecteur dans ce roman, c’est de constater que rapidement, d’une manière presque évidente, Bruno Schulz, auteur de nouvelles et de romans, dessinateur, est habité par la peur, des crises d’angoisse, de profonds doutes : « Je ne me rendais pas compte que les rues inconnues le fatiguaient, qu’il était effrayé par le trafic urbain et la foule (…) Il se recroquevillait comme un escargot dans sa coquille de peur que quelqu’un l’écrase. J’ai compris cela trop tard ».

L’Ouzbek muet et autres histoires clandestines, Luis Sepulveda

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Jeudi, 22 Octobre 2015. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Amérique Latine, Nouvelles, Métailié

L’Ouzbek muet et autres histoires clandestines, avril 2015, 133 pages, 16 € . Ecrivain(s): Luis Sepulveda Edition: Métailié

 

L’Ouzbek muet constitue le titre de l’une des nouvelles de cet opus avec, comme dans les autres histoires clandestines qui le composent, pour toile de fond les années 1960 où la politique occupait une place prépondérante, au Chili et dans les pays environnants, où la jeunesse partageait « le beau rêve/d’être jeunes sans en demander la permission » (dédicace de la première nouvelle de ce recueil, Le soldat Tchapaïev à Santiago du Chili). Une jeunesse militante – camarades des Jeunesses Communistes du Chili, de la Fédération des Jeunes Socialistes – en lutte dans une révolution ardente contre l’impérialisme américain, la montée du libéralisme capitaliste.

Originaire du Chili, Luis Sepύlveda connaît le décor de ces histoires émouvantes qu’il met en intrigue, et le charme de ce recueil tient à ce que l’auteur du Vieux qui lisait des romans d’amour, de Histoire d’une mouette et du chat qui lui apprit à voler, de La Folie de Pinochet, entre autres, nous rapporte ici des récits de vie teintés parfois d’une drôlerie décalée par rapport à la gravité et l’extrême dangerosité des faits, avec une tendresse délicate et touchante. Récits de vie rapportés par l’intermédiaire de témoins, par le truchement de témoignages oraux, retranscrits souvent près d’un demi-siècle plus tard.

Le Goût du divin, Franck Aria

Ecrit par Philippe Chauché , le Jeudi, 22 Octobre 2015. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Edilivre

Le Goût du divin, juin 2015, 118 pages, 13 € . Ecrivain(s): Franck Aria Edition: Edilivre

 

« Que vienne la grande Musique, celle dont on s’éprenne, la belle, la vraie, celle de Bach à Coltrane, de Mozart, de Stravinski, de Vivaldi à Miles, cette merveille qui chaque jour promet du jouir en combattant les peines, offre du libre à penser, éveille à la pensée et au recueillement de l’être. Un chef d’œuvre ne s’épuise jamais ».

Le Goût du divin est le livre de ce désir, désir de musique, du divin, désir d’amour, mais aussi et c’est fort heureux désir de croiser la plume, comme l’on croise le fer avec la Réforme, le Diable et ceux qui s’en réclament. Le Goût du divin chemine aux côtés d’écrivains vivants, qu’ils n’aient plus ouvertement donné signe de vie ne change rien à l’affaire, ils sont là, et bien là : Voltaire, De Maistre, Faulkner, mais aussi Dante, Pascal, tour à tour saisis par le divin et son art, qui n’est pas étranger à leur style – ce nectar de la pensée. Franck Aria est aussi un lecteur attentif de Philippe Sollers – La guerre du goût –, des scissionnistes de Ligne de Risque* et de Stéphane Zagdanski qui l’accueille parfois dans sa librairie**. Il sera donc question du religieux, du divin, de sa musique, de sa joie, et de ses divines occupations, c’est l’un des enjeux du Goût du divin, qui s’emploie également à retourner Luther, comme l’on retourne une mauvaise carte.