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Les Livres

Comme une lettre, Mireille Gansel

Ecrit par Didier Ayres , le Vendredi, 30 Juin 2017. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie

Comme une lettre, La Coopérative, mai 2017, 144 pages, 16 € . Ecrivain(s): Mireille Gansel

 

 

Comment réduire des impressions de lecture, et cela de façon aussi peu cérébrale que possible, mais plutôt ressenties de l’intérieur, à l’image d’un chemin personnel que l’on fait en lisant de la poésie, sans en trahir le secret ? Cette question est bien vive ici, au sujet du recueil que Mireille Gansel publie ce mois-ci. Car il offre à la fois un voyage physique – Italie, Allemagne, mais aussi Paris ou Lyon – et nous fait partager un spleen. Et à travers lui, ce sentiment si particulier que chacun éprouve à sa manière sur l’hiver et ses lumières froides et blanches. Et là est la poésie justement, dans ce dénuement, dans ces mots éthérés, dans le rien, dans l’aube décharnée de janvier, principe intellectuel de la poésie qui raréfie les signes, qui les rend à eux-mêmes comme simple élément verbal, mais d’une telle simplicité hivernale, que la poésie naît et se développe, fait sens, épaissit le feuilletage de la signification, tout en se déchargeant des lourdeurs et des artifices brillants de l’été, par exemple, et de sa nature prospère.

Polonaise, Emmanuel Moses

Ecrit par Matthieu Gosztola , le Jeudi, 29 Juin 2017. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie, Flammarion

Polonaise, avril 2017, 125 pages, 16 € . Ecrivain(s): Emmanuel Moses Edition: Flammarion

 

« Je voulais écrire un poème mais il était trop tôt. Il fallait que j’entende encore quelques bribes de conversations, des conversations de femmes et des conversations de famille, bavardages d’enfants, bavardages de grands-parents, bavardages de parents. Il fallait que j’entende le vent du soir, les rires qui éclatent le soir, le cliquetis des premiers couverts à la terrasse des restaurants. […] »

 

« Je bois du vin et toi, de l’autre côté du couloir, tu bois du vin aussi. Je bois du vin et toi, de l’autre côté de la mer, tu bois du vin aussi. Je bois du vin et toi, de l’autre côté du fleuve que l’on ne traverse jamais deux fois, tu bois du vin aussi. Mais moi, mon vin a le goût de la terre et toi, ton vin a le goût du ciel ».

Suivre Jésus et faire du business, Une petite société tribale dans la mondialisation, Maurice Godelier

Ecrit par Martine L. Petauton , le Jeudi, 29 Juin 2017. , dans Les Livres, Critiques, Essais, La Une Livres, Thierry Marchaisse

Suivre Jésus et faire du business, Une petite société tribale dans la mondialisation, avril 2017, 160 pages, 17,90 € . Ecrivain(s): Maurice Godelier Edition: Thierry Marchaisse

Maurice Godelier est un de nos plus éminents ethnologues-anthropologues, et Thierry Marchaisse, un éditeur toujours à l’affût de belles pépites. Là, cela accouche d’un bonheur de lecture, certes, mais tellement davantage…

Le titre – peut-être un peu trop accrocheur – aurait pu simplement s’abriter sous « La métamorphose » si cela n’était déjà préempté. Parce qu’il y va en si peu de pages, si denses, de quelque chose au croisement des itinéraires de l’homme, groupes et individus, de la mondialisation en marche – pas moins ! – du monde d’avant qui résiste et ne meurt pas complètement, ce qui nous rassure pour la fin de notre âge, de nous tous, spectateurs de ces changements-là, et nous regardant forcément en miroir – car que serait un livre sans son impact sur nous. Il y va surtout d’un formidable hommage à une discipline, de pensée et de vie, à moins que le contraire, pas assez connue, ou tellement en surface : l’ethnologie, l’anthropologie. Juste un livre en fait pour nous chambouler – quota d’émotionnel garanti – et nous faire ressortir de ce voyage de découvertes – avec ces Baruya, petit peuple minuscule, immense tribu, et leur ethnologue – riches, et mieux armés pour la suite de tous nos chemins, ce qui n’est pas si fréquent en lectures.

Miniatures, Patricia Castex Menier

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Jeudi, 29 Juin 2017. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie

Miniatures, éd. Tensing, 2015, 76 pages, 9 € . Ecrivain(s): Patricia Castex Menier

 

Dédié au poète Pierre Dhainaut, ce recueil rassemble des tercets, quelques distiques, répartis en cinq parties.

Leur force provient de l’efficience qu’il suppose du Langage. De l’efficacité poétique qui en résulte.

Que le poème soit invoqué, et il vient. Il ouvre même le recueil, sans nous avoir jamais quitté :

« Oh !

Le poème revient,

Mais où était-il donc ? »

Une Mère, Alejandro Palomas

Ecrit par Gilles Brancati , le Mercredi, 28 Juin 2017. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Espagne, Le Cherche-Midi

Une Mère, mars 2017, trad. espagnol Vanessa Capieu, 310 pages, 21 € . Ecrivain(s): Alejandro Palomas Edition: Le Cherche-Midi

 

C’est un voyage en émotions. Un mille-feuille. Chaque fois qu’une feuille se détache, un personnage se découvre un peu plus. Le principal, en fil rouge, est celui de la mère de deux filles et d’un garçon. Elle n’a plus pour famille que ses enfants et un frère quelque peu hâbleur. Une amie, aussi, qui lui sert tour à tour d’alibi ou de justification.

Le soir de la Saint-Sylvestre, ils sont tous réunis autour de la table familiale. Le couvert est dressé pour tous plus un autre, à une place qui reste vide. On apprendra pourquoi.

La mère pourrait paraître fantasque, mais en vérité elle détourne d’un revers de main (elle est assez maladroite) ou par un biais de langage tout ce qui pourrait contrarier l’équilibre de sa famille. Elle sait, comme une mère, les souffrances de ses enfants, leurs difficultés, plus celles qu’elle découvre ce soir-là, ce que jusqu’à présent on ne lui avait pas dit. Son devoir est de les aider à se restaurer, sans jamais tomber dans un méli-mélo dramatique, car le sujet s’y prête (et l’auteur a été très attentif à ce piège), sans jamais aller vers l’excès. Cette femme est attachante et touchante dans son efficace simplicité !