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Les Livres

Quarantaine, Jim Crace

Ecrit par Didier Smal , le Mercredi, 13 Septembre 2017. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Iles britanniques, Roman, Rivages poche

Quarantaine, mai 2016, trad. anglais Maryse Leynaud, 336 pages, 8,90 € . Ecrivain(s): Jim Crace Edition: Rivages poche

Jim Crace (1946), auteur anglais multi-primé, a publié en 1997 un curieux roman, à qui il a fallu douze ans pour trouver éditeur francophone et sept ans de plus pour aboutir dans une collection de poche ; ce curieux roman s’intitule Quarantaine et raconte ni plus ni moins qu’un épisode évangélique frappant, mentionné par Marc, Matthieu et Luc : le séjour de Jésus dans le désert et les tentations auxquelles le Diable se propose de le soumettre. Du moins Crace raconte-t-il l’histoire d’un pèlerin parmi d’autres se livrant à une retraite pénitentielle dans le désert de Judée assortie de jeûne diurne, la « quarantaine » du titre. Cinq personnages se retrouvent en même temps dans le désert, près de grottes dans lesquelles ils vont vivre et prier, trois hommes et une femme, et un cinquième, énigmatique par son silence et la distance qu’il maintient entre lui et les autres : « C’était un voyageur nommé Jésus, venu des vallées du Nord plus fraîches et cultivées, un Galiléen, peu habitué à ce genre de privations. Il avait passé la nuit dans la paille, hôte payant chez un berger, et ce matin il avait laissé sac, outre, sandales et bâton là où il avait dormi. Il accomplirait sa quarantaine sans le recours et les tentations des vêtements, de la nourriture et de l’eau. Il mettrait sa confiance en dieu, comme font les jeunes gens. Il allait rencontrer dieu ou mourir, point final. C’était pour ça qu’il était venu. Pour parler directement à son dieu. Pour laisser à son dieu le soin de lui fournir eau et nourriture. Ou laisser le démon accomplir son œuvre. Ce serait une épreuve pour tous trois »

Les buveurs de lumière, Jenni Fagan

Ecrit par Cathy Garcia , le Mardi, 12 Septembre 2017. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Iles britanniques, Roman, Métailié, La rentrée littéraire

Les buveurs de lumière, août 2017, trad. anglais (Écosse) Céline Schwaller, 304 pages, 20 € . Ecrivain(s): Jenni Fagan Edition: Métailié

 

Si le contexte des buveurs de lumière est une dystopie – nous sommes en 2020 et la planète entière bascule dans une ère glaciaire –, ce qui nous est raconté est très intimiste et contraste nettement avec le chaos dans lequel plonge le monde. Bien que la plupart des personnages soient plus ou moins des marginaux, ils en ressortent surtout splendidement ordinaires, juste humains, avec peut-être un peu plus de courage, d’amour et de douceur que la norme, ce que les difficultés de la situation ne font que mettre en lumière.

Dans la petite communauté de Clachan Fells située au nord de l’Écosse, Stella et Constance, sa mère, vivent en caravane, dans un quartier de caravanes au pied des montagnes, entre des champs, une zone industrielle, une grande décharge et la mer. Quartier qui abrite une faune hétéroclite, star du porno, couple sataniste…, chacun vivant plus ou moins dans sa bulle sans déranger les autres et se débrouillant comme il peut. L’hiver est déjà habituellement rude dans la région, mais cette fois il est plus qu’hors norme. Les températures chutent peu à peu jusqu’à atteindre -56 au mois de mars, un immense iceberg dérive vers le port et la petite vie de l’agglomération est complètement chamboulée.

Après l’incendie, Robert Goolrick

Ecrit par Anne Morin , le Mardi, 12 Septembre 2017. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Roman, Anne Carrière

Après l’incendie, février 2017, trad. anglais (USA) Marie de Prémonville, 312 pages, 22 € . Ecrivain(s): Robert Goolrick Edition: Anne Carrière

 

Roman de la décadence, écrit par ce décadent moderne qu’est Robert Goolrick, Après l’incendie retrace l’histoire d’une grande famille de Virginie à la veille des grandes guerres européennes. Mais pas seulement. C’est aussi une histoire d’amour cruelle et romanesque. Mais pas seulement. C’est aussi l’histoire d’une traque où, par hasard, le narrateur journaliste en quête de vérité sur le mystérieux personnage de Diana Cooke, propriétaire disparue dans l’incendie de sa magnifique demeure… disparue, volatilisée, personne ne sait ce qu’elle est devenue après l’incendie, ni même si elle a brûlé. On n’a pas retrouvé d’elle la moindre trace. Et c’est ce qui attire le narrateur dans cette ruine d’un monde ancien et cruel où les êtres, en fonction de la couleur de leur peau, avaient des droits différents.

Ses droits, la nature les a repris mais dans la friche, il reste quelques vestiges de cette demeure hautaine, comme une personne ruinée garde quelque prestige de son origine, de sa naissance.

Azarphaël, Roi du monde, suivi de Jean Montségur (Novellas), Christophe Lartas

Ecrit par Patryck Froissart , le Mardi, 12 Septembre 2017. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman

Azarphaël, Roi du monde, suivi de Jean Montségur (Novellas), Ed. de l’Abat-Jour, juin 2017, 243 pages, 16 € . Ecrivain(s): Christophe Lartas

 

Novella : roman court, où tous les événements sont reliés à un seul événement principal, laissant des périodes de repos au lecteur et dont la chute est normalement lente.

Cette définition convient parfaitement aux deux novellas réunies dans ce volume des Editions de l’Abat-Jour : Arzaphaël, roi du monde, et Jean Montségur.

Les deux fictions sont de nature très différente, bien qu’appartenant au même genre littéraire du roman d’anticipation.

Azarphaël, roi du monde, écrit à la première personne, place le narrateur en situation à la fois de témoin et d’acteur d’un monde en totale déréliction, proche de son implosion cataclysmique terminale, caractérisé par l’instauration d’un régime mondial ultralibéral, d’un « tissu économique et social reposant en premier lieu sur les biens patrimoniaux » et « la prééminence de l’argent et de l’appât du gain », et ayant pour conséquence le retour de « privilèges héréditaires comme aux plus beaux jours des régimes aristocratiques ou féodaux ».

Le salut viendra de la mer, Chrìstos Ikonòmou

Ecrit par Marc Ossorguine , le Lundi, 11 Septembre 2017. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Bassin méditerranéen, Roman, Quidam Editeur

Le salut viendra de la mer, avril 2017, trad. grec Michel Volkovitch, 190 pages, 20 € . Ecrivain(s): Christos Ikonòmou Edition: Quidam Editeur

(…) Et tu vas me dire c’est quoi ces histoires que tu me sors là, ces mains blanches et ces bouches noires, mais je te l’ai dit dès le début, je te dirai tout, je me souviens de tout, je me souviens de ce qui est arrivé de ce qui n’est pas arrivé de ce qui aurait pu arriver de ce qui aurait dû arriver, je me souviens de tout, et que ça te plaise ou non je dirai tout.

Ils sont venus de Grèce, tout simplement. Ils se sont réfugiés sur une île. Une île où d’autres vivaient. Ils sont devenus les autres des autres. Les îles ne sont pas des paradis et l’on y survit pas mieux qu’ailleurs. Fermées sur elles-mêmes, elles laissent peu ou pas d’échappatoire. Peur haine et violence en font vite des enfers, des lieux où l’on peut se perdre, entre vie et mort.

Quatre récits nous sont donnés à entendre, quatre voix qui résonnent entre les falaises, la mer et une grotte. Entre menace prophétique, ironie cynique, lamentation funèbre et espoir têtu, quatre voix nous saisissent, nous giflent, nous bousculent sans aucun ménagement, nous décillent le regard et nous font entendre l’inaudible et l’inouï. Sous le ciel bleu et les blanches maisons des dépliants pour touristes, il y a la nuit qui est en chacun et qui nous envahit tous. Une nuit où résonnent les appels et les errements, privés d’échos, si ce n’est dans la violence du soleil et l’égarement de l’alcool.