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Essais

Considérations sur l’Etat des Beaux-Arts, Jean Clair

Ecrit par Didier Smal , le Jeudi, 10 Septembre 2015. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Folio (Gallimard)

Considérations sur l’Etat des Beaux-Arts, juin 2015, 204 pages, 6,40 € . Ecrivain(s): Jean Clair Edition: Folio (Gallimard)

 

Dès sa parution en 1983, cet essai de Jean Clair (1940) fit l’effet d’une petite bombe : ces Considérations sur l’Etat des Beaux-Arts se voulaient en effet une « Critique de la Modernité » comme l’indiquait leur sous-titre, et allaient poser leur auteur en chef de file de ceux que l’art contemporain laissait au mieux indifférents, rendait au pire virulents, Jean-Philippe Domecq et Aude de Kerros en tête. Trente-deux ans après sa première publication, cette critique de la modernité artistique connaît enfin une édition de poche, la rendant ainsi accessible au plus grand nombre – ce qu’elle est, ou presque, par son style (parfois l’une ou l’autre expression en allemand ou en italien, heureusement traduite, semble quelque peu affectée). D’ailleurs, on peut admirer à quel point est accessible et compréhensible l’image de couverture, une parodie du Balloon Dog de Jef Koons, ou plutôt la baudruche de fête foraine dont s’est inpiré l’artiste de Wall Street, entourée de dangereuses punaises : qui s’y frotte, s’y pique, et que se dégonflent littéralement les baudruches (de toute façon, Koons lui-même s’est dégonflé, puisque cette parodie est due à son refus de la reproduction de Balloon Dog en couverture de ces Considérations…, comme s’il savait à quel point sa « sculpture » ne pourrait qu’être dépréciée par tout lecteur du présent essai, et tant pis si elle s’est vendue cinquante-huit millions de dollars).

Langage et langue de la poésie française contemporaine, Giovanni Dotoli

Ecrit par Patryck Froissart , le Mercredi, 09 Septembre 2015. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Hermann

Langage et langue de la poésie française contemporaine, janvier 2015, 335 pages, 30 € . Ecrivain(s): Giovanni Dotoli Edition: Hermann

Qu’est-ce que la poésie ?

Comment définir la spécificité du langage poétique ? Où se situe et comment se manifeste, parmi les diverses fonctions de la langue, la fonction poétique de la langue ? Qu’est-ce qui oppose et qu’est-ce qui unit la poésie française contemporaine et la poésie française classique ?

Giovanni Dotoli, universitaire, critique et poète italien, brillant francophone, parfait connaisseur de l’art poétique français et de son histoire, fouille et trifouille en ce riche ouvrage les œuvres de poètes de tous horizons qui ont choisi notre langue pour en faire leur langage poétique.

Fondant sa réflexion sur l’étude d’un corpus impressionnant d’extraits de poèmes et de professions de foi poétique formulées dans l’espace et le temps de la poésie francophone par un vaste panel de poètes, Dotoli aligne et confronte les multiples fonctions du langage poétique et les représentations innombrables du fait poétique qui s’en dégagent, soit affirmées et revendiquées explicitement par les auteurs francophones de toutes époques, soit exprimées de façon plus ou moins subliminale dans l’œuvre même de nos poètes.

La parole contraire, Erri de Luca

Ecrit par Marie-Josée Desvignes , le Lundi, 07 Septembre 2015. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Gallimard, Italie

La parole contraire, traduit de l’italien Danièle Vain, janvier 2015, 40 pages, 8 € . Ecrivain(s): Erri de Luca Edition: Gallimard

 

« Ptàkh pìkha le illèm » : « ouvre ta bouche pour le muet »

(Proverbes/Mishlé 31/8) cité par Erri de Luca, p.18

 

La parole contraire est le récit, ou plutôt une sorte d’argumentaire de Erri de Luca dans sa condamnation pour « incitation au sabotage »… Incitation au sabotage… Vraiment ? C’est en tout cas ce qu’a déclaré le tribunal à partir des phrases écrites dans le Huffington Post Italie, et l’Ansa (équivalent de l’AFP) par Erri de Luca lui-même. Erri de Luca refuse le terme « acte terroriste » même s’il se reconnaît une maladive incitation à la résistance qui lui vient de son enfance et plus exactement de ses lectures.

Les chemins de retour, Alfons Cervera

Ecrit par Marc Ossorguine , le Jeudi, 27 Août 2015. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Espagne, La Contre Allée

Les chemins de retour (Los caminos de vuelta), juin 2015, traduit de l’espagnol par Georges Tyras, 96 pages, 8,50 € . Ecrivain(s): Alfons Cervera Edition: La Contre Allée

 

Dans ce court livre, l’auteur de ce qu’on a désigné en Espagne comme les romans de la mémoire – cinq romans ouvrant les portes de la mémoire des vaincus oubliés du franquisme (La Couleur du crépuscule, Maquis, La Nuit immobile, L’Ombre du ciel et Cet hiver-là, dont seuls les deux premiers sont à ce jour disponibles en France) – revisite son travail, retissant les liens entre réalité et fiction, entre mémoire et littérature, entre témoins et œuvre littéraire.

Un texte un peu paradoxal qui peut sembler aussi un drôle de pari éditorial, l’œuvre d’Alfons Cervera n’étant pas encore complètement traduite et le livre en question n’étant pas à ce jour publié dans sa langue d’origine. Cela pourrait du coup sembler ne s’adresser qu’aux « afficionados » (mais le mot résonne bizarrement concernant cette œuvre unique, exigeante dans sa simplicité et sa poésie), aux connaisseurs qui ont lu les éditions françaises, voire plus en se plongeant dans le texte original. Complété par des photos qui n’ont rien de spectaculaire, qui sont comme le quotidien dont on parle peu, comme la mémoire que l’on oublie et que l’auteur traque de livre en livre, ces chemins reviennent sur l’œuvre autant que sur les pas de l’écrivain.

La beauté du métis, réflexion d’un francophobe, Guy Hocquenghem

Ecrit par Guy Donikian , le Mardi, 25 Août 2015. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Serge Safran éditeur

La beauté du métis, réflexion d’un francophobe, avril 2015, préface de René Scherer, 248 pages, 22,90 € . Ecrivain(s): Guy Hocquenghem Edition: Serge Safran éditeur

 

C’est en 1979 que La beauté du métis est publié pour la première fois, et c’est en avril 2015 que le texte est à nouveau publié par Serge Safran éditeur. C’est l’heur de (re)lire un texte qui présente de multiples intérêts à différents titres. Mais en 2015, c’est surtout l’occasion de pouvoir comparer les audaces littéraires de la fin des années 70 à la frilosité ambiante. La liberté d’expression est ici à l’œuvre, servie par une maîtrise littéraire au service d’une dialectique sarcastique qu’on aurait du mal à repérer dans la profusion éditée de nos jours. Une liberté d’expression qui sous-tend un amour de la France et de sa culture, mais qui ne rend pas aveugle pour autant, aimer la France et sa culture suppose alors quelques conditions : Guy Hocquenghem écrit donc la « france » sans majuscule, parce qu’il place ce pays et sa culture au-dessus de tout. Et c’est la raison pour laquelle il n’eut de cesse de vilipender, de moquer, de railler ou de mépriser ce qui, dans cette actualité des années 70, renvoyait à une certaine médiocrité.