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Critiques

Le Mardi à Monoprix, Emmanuel Darley

Ecrit par Marie du Crest , le Jeudi, 20 Octobre 2016. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Théâtre, Actes Sud/Papiers

Le Mardi à Monoprix, 56 pages, 11 € . Ecrivain(s): Emmanuel Darley Edition: Actes Sud/Papiers

 

« Telle quelle »

Le Mardi à Monoprix, sans doute la pièce la plus connue d’Emmanuel Darley, dévoile ce qui a constitué la trajectoire de l’ensemble de son œuvre. En effet, rare écrivain « total », romancier à ses débuts puis auteur de pièces en 1998 avec Badier Grégoire, E. Darley n’a eu de cesse de passer de l’écriture dramatique à l’écriture romanesque. Ainsi Le Mardi à Monoprix est-il, certes, le monologue d’un transsexuel, qui laisse entendre d’autres voix que la sienne : celle de son père « qui dit » en tout premier lieu ou celle par exemple d’une femme rencontrée dans la rue. Mais le texte est élaboré aussi comme un récit à la première personne (récit d’une nouvelle), qui avance par étapes, par blocs typographiques. Marie-Pierre, la narratrice, évoque la journée du mardi, qu’elle consacre à son père qui vit seul, dans une autre ville. Rituel attentif avec ses gestes et ses tâches ménagères que des phrases simples au présent, proches de notes sèches, souvent en l’absence de ponctuation, énumèrent :

Le mardi c’est dit je passe la journée là-bas à faire ceci cela la poussière et tout. Je secoue la nappe je change les draps. Je vide la poubelle.

L’amour a le goût des fraises, Rosamund Haden

Ecrit par Theo Ananissoh , le Mercredi, 19 Octobre 2016. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Afrique, Roman, Sabine Wespieser

L’amour a le goût des fraises, mai 2016, trad. anglais (Afrique du Sud) Diane Meur, 399 pages, 24 € . Ecrivain(s): Rosamund Haden Edition: Sabine Wespieser

 

La disposition des personnages dans L’amour a le goût des fraises fait penser (parallèle peu littéraire, concédons) au tirage au sort qui précède une compétition sportive. Deux têtes de série regroupent chacune autour d’elles plusieurs autres personnages secondaires : Françoise d’un côté et Stella de l’autre. Et, fédérant tout ce monde, l’artiste Ivor Woodall et son atelier où tous viennent pour une raison ou une autre.

Le récit s’ouvre et s’achève avec deux faire-part de décès à propos du même Ivor Woodall. Pour ainsi dire, il meurt une première fois subitement à l’âge de quarante-deux ans ; puis une seconde fois à soixante-trois ans, qui plus est en 2022. Le premier décès est le fait singulier et étrange du roman autour duquel s’organise une narration calme et minutieuse. Dans son atelier du Cap (Afrique du Sud) qui est aussi son domicile, Ivor donne des cours de dessin pour des jeunes et de moins jeunes amateurs. Françoise, la vingtaine, est un des modèles qu’Ivor engage pour ce faire. Françoise est une réfugiée rwandaise ayant pu fuir juste à temps le génocide qui a ravagé son pays en compagnie de sa petite sœur Doudou. Elle voudrait bien faire des études, mais il lui faut gagner de quoi vivre ou survivre comme caissière dans un supermarché et comme modèle donc malgré sa forte réticence à poser nue devant des inconnus.

Albert le magnifique, Brigitte Benkemoun

Ecrit par Stéphane Bret , le Mercredi, 19 Octobre 2016. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Roman, Stock, La rentrée littéraire

Albert le magnifique, septembre 2016, 300 pages, 19,50 € . Ecrivain(s): Brigitte Benkemoun Edition: Stock

 

Dans ce récit, Brigitte Benkemoun retrouve la trace de son arrière-grand-oncle Albert sur les stèles du mémorial de la Shoah. Elle est intriguée par le changement de patronyme : Albert est mentionné sous le nom d’Achache-Roux. Pourquoi ?

L’explication sera distillée au lecteur, chapitre après chapitre, chacun d’eux éclairant les différents épisodes de la vie d’Albert le Magnifique. Tout commence dans la famille Achache, née à Tlemcen, dans l’Ouest algérien. Cette ville est alors « la perle du Maghreb, la Grenade africaine », vieille cité hispano-mauresque capitale du Maghreb oriental et se posant en rivale de Fès, la Marocaine. Le père Younah est commerçant, Saada, l’épouse, veille à l’éducation de ses quatre enfants, trois garçons Ghali, Léon, Daniel, Albert… et une fille Sarah. L’Algérie de cette époque est ambivalente ; elle est marquée par des campagnes antisémites régulières, orchestrées par certains colons, elle vient aussi, par le décret  Crémieux, d’accorder la citoyenneté française aux juifs d’Algérie, considérés encore comme des « Indigènes ».

Looking for the Masters in Ricardo’s Golden Shoes, Catherine Balet

Ecrit par Jean-Paul Gavard-Perret , le Mardi, 18 Octobre 2016. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Arts

Looking for the Masters in Ricardo’s Golden Shoes, with Ricardo Martinez Paz, Dewi Lewis Publishing Londres, 2016 . Ecrivain(s): Catherine Balet

 

 

Looking for the Masters in Ricardo’s Golden Shoes est le fruit d’une collaboration entre Catherine Balet et celui qui est devenu à la fois sa muse et son « modèle » dans l’art photographique. A travers ce jeu, la créatrice se pose la question de ce qui accorde à une photographie le statut d’icône.

Ayant rencontré il y a trois ans Ricardo Martinez Paz à Arles, elle l’a métamorphosé en renversant les rôles, une muse et son « complice ». Les deux ont revu des grands classiques de la photographie et Catherine Balet a inséré ensuite la silhouette de Ricardo sur chacun des clichés en prouvant de facto comment les techniques nouvelles modifient les données premières de la représentation. Ses clichés en deviennent la re-présentation.

Baby spot, Isabel Alba

Ecrit par Marc Ossorguine , le Lundi, 17 Octobre 2016. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Roman, Espagne, La rentrée littéraire, La Contre Allée

Baby spot, août 2016, trad. espagnol Michelle Ortuno , 93 pages, 13 € . Ecrivain(s): Isabel Alba Edition: La Contre Allée

 

Si vous avez aimé… Vous aimerez… On pourrait être tenté de présenter le premier roman d’Isabel Alba de cette façon. Un roman qui précède de huit années La véritable histoire de Matias Bran, que La Contre Allée nous a fait découvrir en 2014. Si ce Baby Spot montre déjà le talent de son auteur, le projet n’en est par contre pas le même. Ici la force du récit tient à sa brièveté autant qu’à son style, travaillé dans une certaine « maladresse », qui s’impose et que l’auteur maîtrise.

Tomás. 12 ans. Tomás vit dans un monde dont l’ordinaire est le chômage, la violence, le machisme basique et « naturel ». Un père inconnu… Mais bon, il s’en fait une raison !

Je m’appelle Tomás, j’ai douze ans et je ne sais pas qui est mon père. Mais après tout, c’est banal dans la vie d’un gamin, et d’ailleurs je crois que ça n’intéresse personne, même pas moi, et puis j’en ai vraiment marre de toujours entendre la même histoire.