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L’amour simplement, Nane Beauregard

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 14 Janvier 2016. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Joelle Losfeld, Récits

L’amour simplement, décembre 2015. 201 p. 17 € . Ecrivain(s): Nane Beauregard Edition: Joelle Losfeld

 

Parler d’amour n’est pas une sinécure. Ecrire l’amour c’est pire encore. Quant à écrire l’amour conjugal c’est carrément de l’inconscience. Comment ne pas sombrer très vite dans le sentimentalisme, la psychologie à deux sous, le gémissement, l’érotisme du dimanche, le moralisme, les états d’âme ? Sans se poser la question, Nane Beauregard le fait et évite tous les écueils susdits. Avec légèreté, vivacité, intelligence et un humour de chaque instant, la narratrice de ce livre (l’auteure ?) évoque son mari, sa vie conjugale, les choses de la vie.

Aucun état d’âme. Juste des instantanés, des toutes petites tranches de vie, dans lesquelles elle observe son compagnon et, à travers lui, elle s’observe et s’étonne elle-même. L’étonnement est d’ailleurs le maître mot de ce petit (quoi ? Roman ? Nouvelle ?) recueil, sorte de dictionnaire de la vie conjugale. Il faut dire que le mari de la narratrice est étonnant, et qu’ainsi il lui facilite grandement la tâche. Il est drôle, inattendu, philosophe, décalé, attachant. En un mot, séduisant. Evidemment, ce qui nous retient en lui est exactement se dont se nourrit l’amour de « Nane » pour lui. Il est séduisant dans ses bons moments (nombreux) aussi bien que dans ses mauvais (occasionnels). Même ses défauts contribuent à tisser le lien profond du couple. Elle est agacée, parfois furieuse, mais toujours séduite. Qu’on en juge (il est difficile de résister à l’envie de partager un petit bout de ce plaisir) :

Raymond Carver, une vie d’écrivain, Carol Sklenicka

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 07 Janvier 2016. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, L'Olivier (Seuil), Biographie, USA

Raymond Carver, une vie d’écrivain, novembre 2015, trad. anglais (USA) Carine Chichereau, 780 pages, 25 € . Ecrivain(s): Carol Sklenicka Edition: L'Olivier (Seuil)

Raymond Carver est un aventurier. Assertion qui peut faire bondir les passionnés du grand Ray. Nulle trace d’aventure dans sa vie, pas d’engagement militant, pas d’équipées lointaines (un séjour de quelques années en Israël le déprimera durablement), pas de guerre d’Espagne (Hemingway l’a pourtant fait rêver), pas de grandes histoires d’amour (à l’exception d’une seule, Maryann bien sûr). Carver est l’anti-héros parfait de la littérature américaine, une sorte de pantouflard. Sauf que.

Sauf que les grands vents et marées d’une vie, s’ils ne sont pas chez lui dans l’aventure épique, sont – intensément – dans les tourbillons d’une vie personnelle et familiale dont on peut dire qu’elle vaut toutes les aventures. La famille, l’alcool, la passion d’écrire, voilà qui chez Ray vaut en intensité toutes les expéditions. Et voilà qui sera pour lui la matière – l’unique matière – de son œuvre.

Carol Sklenicka l’a évidemment parfaitement compris et parfaitement déployé dans cette biographie magnifique. La trame de son récit – car c’est bien d’un récit qu’il s’agit, presque romanesque – est tricotée dans le va et vient permanent de scènes de vie/nouvelle et/ou nouvelle/scènes de vie. On comprend, à travers tout le livre, que l’écriture est pour Ray Carver une extension du domaine de l’existence, une fonction quasi organique, une matière qui lui permet la respiration, la survie.

En toute franchise, Richard Ford

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 05 Novembre 2015. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, L'Olivier (Seuil), Roman, USA

En toute franchise (Let me be frank with you), août 2015. 232 p. 21,50 € . Ecrivain(s): Richard Ford Edition: L'Olivier (Seuil)

 

Frank Bascombe est de retour. C’est évidemment une belle nouvelle pour les lecteurs de Richard Ford qui ont – forcément – adoré « Un week-end dans le Michigan » « Indépendance » ou « Etat des lieux ». Frank, qui vieillit avec son auteur, mais qui garde bon pied, bon œil encore. Bascombe, avec son empathie, sa patience, son ironie bonhomme.

L’ouragan Sandy a dévasté le New Jersey, laissant derrière lui destruction, malheur, dévastation des choses et des gens. Frank, qui a quitté la côte depuis quelques années, décide de revenir, en visite, en particulier pour y rencontrer un ami sinistré. Devant le tableau effroyable de la côte, c’est au tour de Frank d’être dévasté, dans son âme.

« Et puis tout à coup je ne supporte plus d’être là. Toutes les défenses dont je m’étais bardé dans l’intérieur des terres se sont délitées ; me voici devenu… une cible. Celle de la perte. De la tristesse. C’est ce que je tenais à éviter et la raison même pour laquelle je me suis abstenu de me risquer ici, ces dernières semaines. J’ai eu tort de venir. »

Ce monde disparu, Dennis Lehane

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Lundi, 26 Octobre 2015. , dans La Une Livres, La rentrée littéraire, Les Livres, Critiques, Rivages/Thriller, Polars, Roman, USA

Ce Monde disparu (World gone by), Octobre 2015. Traduit de l’américain par Isabelle Maillet. 348 p. 21 € . Ecrivain(s): Dennis Lehane Edition: Rivages/Thriller

 

Dennis Lehane creuse le sillon ouvert par son dernier opus « Ils vivent la nuit » (voir la critique de cette œuvre dans la Cause Littéraire), explorant l’univers du gangstérisme. C’est d’ailleurs Joe Coughlin, plus vieux de 15 ans, que l’on retrouve ici.

La présentation de ce roman le rapproche du « Parrain ». Le lien est d’autant plus incontestable que l’on pourrait aussi faire au livre le reproche – ce sera le seul - qui a été fait au film de Coppola : la nostalgie de ce « monde perdu » charrie forcément un discours ambigu sur le gangstérisme et ses figures. Les personnages – y compris les pires – sortent un peu « blanchis » du récit, la poétisation romanesque jouant le rôle d’une absolution des méchants. Malgré la mise à distance à laquelle procède Lehane par l’ironie qui s’insère dans les propos des personnages.

« On décide de notre façon de vivre, on établit nos règles, on se comporte en hommes. (il se pencha en avant.) Ça me botte d’être un gangster, merde ! »

« Je n’ai jamais gagné honnêtement un seul dollar, et je n’ai pas l’intention de commencer un jour ».

La Guerre des Mouches, Jacques Spitz

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 17 Septembre 2015. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman, Science-fiction

La Guerre des Mouches. Petite bibliothèque Ombres. 151 p. . Ecrivain(s): Jacques Spitz

 

Un jour les mouches. Jacques Spitz a écrit ce chef-d’œuvre de la Science-Fiction en 1938 et, malheureusement, après une brève notoriété dans les années 70, ce livre est retombé dans un relatif oubli. La seule édition qui existe encore, celle dont je vous parle (Petite Bibliothèque Ombres), date de 1997 et devient rare.

Et pourtant, quel roman parfait ! Pétillant d’humour et d’intelligence sur un scénario passionnant.

Tout commence au Vietnam pour Juste-Evariste Magne, jeune chercheur en entomologie, spécialiste des mouches Rue Cujas, dans le laboratoire du Pr Carnassier. Des faits troublants ont été signalés dans ce pays : une invasion de mouches, porteuses de typhus, inquiète les autorités. Du Vietnam au … monde entier, la menace va s’étendre et devenir une guerre pour la survie de l’espèce humaine. Spitz, avec un talent de narrateur remarquable, va nous mener de l’horreur au sourire et à l’horreur encore.