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Pierre Dhainaut ou La Parole, par Didier Ayres

Ecrit par Didier Ayres , le Jeudi, 24 Mai 2018. , dans La Une CED, Les Chroniques

Et même le versant nord, Pierre Dhainaut, éd. Arfuyen, 2018, 11 €

 

Pour tout dire, mon sentiment à l’égard de ce livre est entièrement instruit par l’idée de la maturité de l’expression poétique. Et si la poésie, comme la peinture du reste, est un art qui supporte l’âge, ce recueil parvient à dessiner un territoire de dernier recours, de dernier expédient devant le temps. Dans ce sens, on a à faire avec ce que j’appellerais l’écume du langage. Car au sein de ce recueil qui rassemble des poèmes par deux ou trois, ou sous divers chapitres plus ou moins longs, en vers ou en prose, circonstanciels ou non, la totalité de l’ouvrage confine à la découverte d’un texte presque fragile, et en un sens neuf, nouveau, pur, quintessencié. Et avec cette expression d’une idée de l’homme.

Cette idée est d’ailleurs pour moi la question de la qualité idéale de la parole. Dire. Exprimer. Écrire le souffle, écrire ce qui amplifie, ce qui augmente, ce qui grandit l’homme en lui-même. C’est une poésie qu’il faut parcourir lentement, sans hésiter à revenir plusieurs fois sur certains passages, et avec ces précautions connaître le poète, imaginer avec lui, en communion, le mystère de vivre, et avec lui le mystère de l’expression poétique.

Maison d’âme, Mireille Gansel, par Didier Ayres

Ecrit par Didier Ayres , le Jeudi, 17 Mai 2018. , dans La Une CED, Les Chroniques

Maison d’âme, Mireille Gansel, La Coopérative, avril 2018, 112 pages, 15 €

À la croisée

De la Maison d’âme de Mireille Gansel, il faut retenir la maison et l’âme. Pour mieux ressentir cette territorialisation spirituelle et affective. On se trouve avec ce livre dans une demeure qui demeure dont la démarche intelligible motive la pensée et la poésie. Nous sommes loin d’une poésie sans action – action au sens que prête Paul à la charité – ne serait-ce que pour la perspective humaniste qui fait de la maison de la poétesse, une habitation physique pour des concepts errants alliés cependant à des migrants de toute origine et de tout temps. Je me permets de souligner cela en préambule, car il est utile de savoir où s’ancre cette pensée, et de voir avec tant de clarté et de signes la présence de l’auteure dans une matérialité de sa personne.

Je dis préambule en pesant mes mots, parce que je crois que cela fait partie bel et bien de la portée véridique et de la valeur de ce chemin à travers le langage. Chemins, terres, frontières, langues, et aussi rivières, villes et pays se croisent ici et font l’arrière-plan du livre. Et cela avec l’émotion noble et profonde des grands thèmes de l’écrivaine : l’amour, la beauté, l’hospitalité, la parole, les mots et toute la cohorte des belles idées qui agrandissent l’homme et lui font une invitation céleste, supérieure, pleine d’humanité.

À propos de Tous des oiseaux de Wajdi Mouawad, par Didier Ayres

Ecrit par Didier Ayres , le Mercredi, 18 Avril 2018. , dans La Une CED, Les Chroniques

Tous des oiseaux de Wajdi Mouawad, éd. Leméac/Actes-Sud, mars 2018, 96 pages, 14 €

 

Identité

En quatre actes et 26 scènes, Wajdi Mouawad dresse le portrait violent d’un problème éthique et interroge le spectateur/lecteur. Avec cette question : qu’est-ce que l’identité ? Et même s’il faut taire le dénouement et le coup de théâtre qui clôt la pièce, tout confine à la plasticité en relation avec l’identité, notamment religieuse ou nationale.

Énonçons quand même deux mots de l’histoire, laquelle rejoint celles des grands mythes de notre patrimoine théâtral. Et ici, nous revisitons l’amour impossible de Roméo et Juliette, dont les familles respectives ennemies traversent des douleurs et des batailles historiques. Là, le conflit israélo-palestinien qui se calque sur l’amour de Wahida et Eitan. Donc l’amour impossible entre un Israélien et une Palestinienne, nœud gordien que ne tranche pas vraiment la pièce.

À propos de Conversation avec le torrent, Henry Bauchau, par Didier Ayres

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 12 Mars 2018. , dans La Une CED, Les Chroniques

Conversation avec le torrent, Henry Bauchau, Actes Sud, février 2018, 288 pages, 23 €

 

 

Un journal de l’âme ou de L’Être

Il y a le beau titre du roman de Joyce, Portrait de l’artiste en jeune homme, qui conviendrait parfaitement à l’émotion que j’ai ressentie à la lecture du premier tome du Journal d’Henry Bauchau (lequel compte pour finir 3000 pages et s’arc-boute sur la vie entière de l’auteur). Car c’est bien ce sentiment qui s’est installé en moi au fur et à mesure, en voyant comment s’instaure la création artistique en une vie d’homme – qui par ce détour devient artiste. Je dis cela d’autant que ce n’est pas tout à fait un jeune homme qui écrit ce journal, mais un homme mûr, qui va devenir psychanalyste et qui doit se débattre comme tout adulte avec les difficultés matérielles inhérentes justement à ce choix de la vie d’artiste – mais est-ce un choix délibéré ou un destin ? je n’ai pas la réponse.

À propos de Pressée de vivre d’Anise Koltz, par Didier Ayres

Ecrit par Didier Ayres , le Mardi, 27 Février 2018. , dans Chroniques régulières, La Une CED, Les Chroniques

Pressée de vivre d’Anise Koltz, Arfuyen, janvier 2018, 170 pages, 10 €

 

Le dernier recueil d’Anise Koltz que publie Arfuyen est un ouvrage de grande importance. Tout d’abord parce qu’il est d’une écriture claire, presque aveuglante. Et en même temps, parce qu’il dénonce la condition de la vie déterminée par la mort. Ces deux notions, vie et mort, s’opposent naturellement comme l’ombre et la lumière, le mal et le bien, et mettent en évidence ce en quoi la clairière n’existe que grâce à la forêt. Ainsi dans cette sorte d’antagonisme, l’on débouche sur la lucidité, lucidité que donnent immanquablement la mort et sa triste lumière, lucidité sur la valeur des croyances, lucidité sur la qualité de notre ici-bas.

 

Des visions apparaissent

de quelles zones indécises

ressurgissent-elles ?