Identification

Roman

Les Vilaines, Camila Sosa Villada (par Sandrine Ferron-Veillard)

Ecrit par Jeanne Ferron-Veillard , le Vendredi, 12 Février 2021. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Amérique Latine, Métailié

Les Vilaines, Camila Sosa Villada, Métailié, janvier 2021, trad. espagnol (Argentine) Laura Alcoba, janvier 2021, 208 pages, 18,60 € Edition: Métailié

 

À chaque nouvelle lecture, on se dit qu’un livre est une rencontre, la vraie celle-ci, l’objet littéraire que l’on n’attend pas, la rencontre qui détourne, transforme. La lecture en expérience. Pour changer son propre rythme et sa lecture du monde.

Ici, la lecture est un témoignage.

Aucun chapitre numéroté pour s’y tenir. Tel le tronc contre lequel les corps s’appuient dans le Parc, contre lesquels ils jouissent ou ils succombent. Elles tombent. Les incubes et les succubes. Ici, les Trans travaillent. La ville imprimée dans les lignes qu’elles forment en marchant dans le Parc, les lignes qu’elles prennent, les lignes qu’elles suivent. À Cordoba, avec un accent sur le premier « o », en Argentine. L’alignement des fenêtres, qui ne sont plus si blanches, toutes grillagées, et des portes condamnées comme autant d’alarmes pour se protéger des vols. Des viols. Des coups de feu, des coups de poing, des coups meurtriers dans les reins.

La Robe blanche, Nathalie Léger (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Vendredi, 12 Février 2021. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, P.O.L

La Robe blanche, Nathalie Léger, 144 pages, 16 € Edition: P.O.L

 

Quatrième livre de la romancière française, La Robe blanche déroule plusieurs facettes d’une fiction, qui joue entre chronique familiale, accompagnement délirant d’une aventure aussi délirante, et enfin domaine d’écriture rendue nécessaire, impérieuse.

En 2008, une artiste de Milan, Pippa Bacca, décide d’entamer un voyage, vêtue d’une seule robe blanche, pour réparer des injustices, et ce, par un long périple qui la mène à traverser toute l’Europe. L’épilogue est tragique. On retrouvera dans un fossé la belle robe assassinée.

Ecrire sur cette histoire à la fois dramatique, surréaliste et volontaire, c’est le projet de la narratrice, qui se livre à sa mère, lui explique les tenants et aboutissants de cette intrigue à laquelle la mère ne croit guère.

En contrepoint de ce projet d’écriture et du récit étonnant de l’artiste italienne au destin brisé, il y a la propre tragédie de la mère, et la volonté chez la fille d’en rendre compte, comme si elle aussi devait réparer quoi que ce soit.

Sols, Laurent Cohen (par Laurent Fassin)

Ecrit par Laurent Fassin , le Mercredi, 10 Février 2021. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Actes Sud, Israël

Sols, Laurent Cohen, 166 pages, 19,10 € Edition: Actes Sud

 

Evitons le dithyrambe (« le plus beau », « le plus grand », « le plus fort », etc.) pour évoquer ce livre. L’abus devenu courant (désignant notre époque) des superlatifs en tous genres déclasse vite ce qui, hier à peine, était porté aux nues. Préférons-lui l’audace : Sols, premier roman de l’exégète, essayiste et traducteur Laurent Cohen, eût assurément enchanté Jean Paulhan, Raymond Queneau et, plus près de nous, Georges Pérec. Gageons que ces trois-là auraient vite apprécié en ces pages, outre un tableau particulièrement réussi de Paris à diverses époques, une imagination foisonnante ; des vies et histoires multiples qui s’y croisent et s’entrecroisent ailleurs en Europe, au Proche-Orient et beaucoup plus loin encore ; une verve et une espièglerie jamais prises en défaut ; l’impressionnante (parfois farceuse notent les éditeurs) et étourdissante (quoique nullement écrasante) érudition sur laquelle la narration s’appuie.

A dire le vrai, depuis maintenant dix années et plus que l’ouvrage a paru, Sols surnage avec brio au milieu de la mer de papier en laquelle sombrent généralement la plupart des romans nouveaux – dits français.

Le portrait de la Traviata, Do Jinki (par Jean-Jacques Bretou)

Ecrit par Jean-Jacques Bretou , le Mardi, 09 Février 2021. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Asie

Le portrait de la Traviata, Do Jinki, Matin Calme Éditions, juin 2020, trad. coréen, Choi Kyungran, Delphine Bourgoin, 250 pages, 19,80 €

 

Ce livre est un roman à énigme, ou whodunit, de l’anglais « who [has] done it ? », roman policier basé sur une enquête et la recherche d’un coupable parmi plusieurs suspects, un peu comme les romans d’Agatha Christie ou ceux du juge Ti, mais en plus sobre encore. Le décor est réduit à l’essentiel, mais les Coréens sont friands de ces livres.

Dans l’appartement 204, bâtiment 3, résidence H à Seocho, un quartier de Séoul, on retrouve assassinée une jeune femme, Jeong Yumi, de coups de couteau, et à côté un homme mort tué par un poinçon, reconnu par les proches comme étant Lee Pilho, un individu peu recommandable qui harcelait Jeong Yumi. Figurent en tant que premiers « témoins » la sœur de la victime Jeong Aera, Kim Hyeongbin, le prétendant de la jeune femme, et Jo Pangeol, le gardien de la résidence. L’enquête est entre les mains du policier Lee Yuhyeon. Ce dernier, en compagnie de son assistant, commence par dresser un plan du logement avec l’emplacement des objets et meubles importants, ainsi que des ouvertures, puis dispose les corps des victimes là où on les a trouvés. Ils vont ensuite disserter sur : qui a pu pénétrer dans l’appartement et comment, et tenter de reconstituer ce qui a pu se passer.

Histoire du fils, Marie-Hélène Lafon (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Vendredi, 05 Février 2021. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Buchet-Chastel

Histoire du fils, août 2020, 176 pages, 15 € . Ecrivain(s): Marie-Hélène Lafon Edition: Buchet-Chastel

 

Le Prix Renaudot 2020 va à une romancière française d’une dizaine d’ouvrages pour une chronique familiale.

Lafon a-t-elle nourri son roman des œuvres romanesques d’un Mauriac ou d’une Suzanne Prou ? On pourrait le pressentir vu la matière abordée.

Jouant de la chronologie et d’un siècle l’autre (entre 1908 et 2008), le livre révèle les secrets d’une famille cossue. La narration avance ainsi à grands pas pour suivre de près les personnages principaux de cette saga généalogique. En effet, ce « fils » du titre n’a pas de père connu, est élevé par sa tante Hélène, tandis que sa mère Gabrielle vit sa vie à Paris. Entre Paris et Chanterelle, dans le Lot, l’histoire dévide ses attendus, ses surprises, ses découvertes. On suit ainsi deux familles, les Léoty, les Lachalme, pressentant les liens, les alliances.