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Les Livres

La Jolie Madame Seidenman, Andrzej Szczypiorski (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Lundi, 04 Septembre 2023. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Pays de l'Est, Roman, Editions Noir sur Blanc

La Jolie Madame Seidenman, Andrzej Szczypiorski, Les Éditions Noir Sur Blanc, mai 2023, trad. polonais, Gérard Conio, 272 pages, 23 € Edition: Editions Noir sur Blanc

 

Le titre choisi pour l’édition française du septième roman d’Andrzej Szczypiorski (1928-2000), le plus connu avec Messe pour la ville d’Arras, est malheureux, La Jolie Madame Seidenman (1986), bien que permettant d’articuler un réseau d’interactions après son arrestation dans la Varsovie de 1943, n’est au fond qu’un prétexte pour l’auteur destiné à montrer l’état d’esprit de cette Varsovie au travers du sort et des réflexions d’une poignée de personnages, certains récurrents, d’autres passagers clandestins, la narration oscillant entre le point de vue d’un narrateur omniscient et celui des différents personnages. Le titre polonais est Le Commencement, comme celui d’une Pologne qui doit continuer après la Seconde Guerre mondiale, écartelée, perdant peu à peu sa polonitude, si l’on permet ce barbarisme. Même si le texte de quatrième de couverture présente Irma Seidenman, devenue Maria Magdalena Gotomska afin d’échapper aux persécutions allemandes, comme le personnage auquel le lecteur va s’attacher, au fond, le vrai personnage central de ce roman, c’est la Pologne.

Les terres sans sommeil, Emmanuelle Grandjean (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 04 Septembre 2023. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED, Poésie

Les terres sans sommeil, Emmanuelle Grandjean, éditions de Corlevour, juin 2023, 96 pages, 16 €

 

Éléments

Avec le livre d’Emmanuelle Grandjean, j’ai traversé des thèmes qui me sont proches, notamment tout ce qui se rattache à la philosophie de Gaston Bachelard, et surtout ses découvertes de l’importance des quatre éléments d’Empédocle, à savoir : la terre, le feu, l’eau et l’air. Je n’ai cessé de rencontrer des gouttelettes faites de feu, des brumes humides, de la pluie, du travail de la lumière sur les choses, l’ombre, la clarté de certains ciels, et toutes les ambiguïtés inhérentes à ces mélanges.

Et pour résumer tout cela à un seul terme, je dirais : étoile, astre de feu pendu dans le vide de l’air, conglomérat de glaces martiennes, lumière tournoyant dans l’univers. Éther, vertige d’une espèce d’enivrement, qui semble venu de la nature, de l’océan – donc d’un espace maritime attiré et repoussé par l’astre lunaire, lumière blanche, éblouissement du ciel nocturne.

Dictionnaire paradoxal de la philosophie, Penser la contradiction, Pierre Dulau, Guillaume Morano, Martin Steffens (par Marc Wetzel)

Ecrit par Marc Wetzel , le Vendredi, 01 Septembre 2023. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED

Dictionnaire paradoxal de la philosophie, Penser la contradiction, Pierre Dulau, Guillaume Morano, Martin Steffens, Éditions du Cerf, octobre 2022, 760 pages, 34 €

 

La fameuse réplique de Churchill à une dame acariâtre (qui venait de lui lancer publiquement : « Si j’étais votre épouse, monsieur, j’empoisonnerais votre verre de whisky ») : « Et moi, madame, si j’étais votre époux, je le boirais » – dit merveilleusement la puissance révélatrice de la négation humaine, et l’usage décisif du paradoxe. Le paradoxe, c’est l’auto-contradiction féconde, l’alliance éclairante et lucide d’incompatibilités aveuglantes, le conflit victorieux d’une raison avec elle-même. Pas une simple astuce rhétorique (« saper le sens pour faire sens »), mais la soudaine révélation d’une contradiction qui nous hantait, et que notre pensée qui l’assume dépasse. C’est comme la simple visite d’une impossibilité logique qui saurait souligner la réalité de sa porte d’entrée cachée. C’est comme un lapsus expérimental (si mon inconscient fait des siennes, en quoi est-il mien ? mais si j’ai dû choisir ce que j’exclus de pouvoir penser, en quoi est-il inconscient ?), un non-être partant à l’aventure, un « tremblé » de la possible construction du vrai.

Entre les jambes, Huriya (par Patryck Froissart)

Ecrit par Patryck Froissart , le Vendredi, 01 Septembre 2023. , dans Les Livres, Recensions, La Une Livres, Roman

Entre les jambes, Huriya, Editions Le nouvel Attila, avril 2021, 350 pages, 20 €

 

Ce roman puissamment provocateur, pour une bonne part autobiographique, écrit par l’écrivaine franco-marocaine Huriya, a pour thèmes la confrontation des cultures au sein d’un couple mixte et l’hypocrisie à laquelle peuvent être contraints les individus nés et évoluant au sein d’une société qui les soumet à des règles de vie morales et sociales omni oppressantes. Le personnage principal et narrateur à la première personne se raconte depuis le jour où sa mère, ayant décidé que la présence embarrassante, inconvenante à ses côtés, de cet enfant sans père, de ce « bâtard » non voulu, l’empêche de vivre pleinement sa vie de femme célibataire libérée, voire libertine, l’abandonne sans préavis chez ses propres parents, un couple mixte franco-marocain résidant à Marrakech.

Je crie en direction de ma mère :

« Maman, ne me laisse pas !

– Ne m’appelle pas maman. Je ne suis pas ta mère ».

Monsieur Nostalgie, Thomas Morales (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Jeudi, 31 Août 2023. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman

Monsieur Nostalgie, Thomas Morales, éd. Héliopoles, juin 2023, 192 pages, 17 € . Ecrivain(s): Thomas Morales

 

« Tout ce que j’ai aimé disparaît peu à peu ; tous mes repères se désagrègent, je ne reconnais plus mon pays aigri et vengeur. Alors, inlassablement, par souci d’équilibre, je mélancolise le passé ».

« À 30 km/h, la vie défilait sur un mode primesautier. Trenet chantait et Cerdan boxait. Mi-vélo, mi-mobylette, le Solex brouillait tous les genres ».

Depuis plus de dix ans qu’il nous offre ses livres, Thomas Morales est devenu l’un des chroniqueurs littéraires français des plus brillants, des plus piquants, des plus gracieux, et des plus inspirés qui soient. Un chroniqueur qui, à chaque livre, révèle son talent de romancier. Il y a chez Thomas Morales des graines de Hussard qui ne cessent de germer, une façon toute française, donc profondément stylée, de célébrer des hommes et des objets qui ont marqué un temps qui avait tout de déraisonnable, autrement dit un temps qu’il était heureux de fréquenter, c’était au siècle dernier, une fin de siècle, qui nous enchantait et nous faisait chanter des chansons que tout le monde connaissait sur le bout des lèvres, nous passions du Solex à la 4L dans une grande jubilation, et goûtions avec délectations aux films de Claude Sautet et les dessins de Sempé – (il a) tapissé notre imaginaire de facteurs, de kermesses, de banderoles et de galurins.