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Les Livres

L’océan, une nuit…, La savane, une nuit…, Isabelle Simler (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Jeudi, 13 Juillet 2023. , dans Les Livres, Recensions, La Une Livres, Jeunesse, La Martinière Jeunesse

L’océan, une nuit…, La savane, une nuit…, Isabelle Simler, La Martinière Jeunesse, mai 2023, 12,50 € chacun Edition: La Martinière Jeunesse

 

Les deux pôles du monde

Ces deux récents livres-jeunesse ont pour thème l’océan et la savane et font partie d’une nouvelle série d’albums documentaires, conçus par Isabelle Simler (diplômée des Arts décoratifs de Strasbourg, Grand Prix de l’Illustration jeunesse 2022). Au format paysage (25,5 x 18,2 cm), forts de 32 pages chacun, ces albums offrent une immersion dans deux pôles du monde, entre deux milieux opposés – terre et mer.

L’on apprécie la découpe ouvragée des deux couvertures des albums. L’une, à propos de L’océan, une nuit…, révèle, comme à travers un écran, le monde silencieux et secret des zones abyssales aquatiques. Sous une pleine lune blanche, après un éblouissant coucher de soleil, diverses créatures subaquatiques ainsi que des oiseaux marins, se livrent à des acrobaties et des vols plongés. Le jeune public va découvrir que les marées sont rythmées par la lune.

Céline, Romans en La Pléiade (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Jeudi, 13 Juillet 2023. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED, Roman, La Pléiade Gallimard

Céline, Romans 1932-1934 (1), Romans 1936-1947 (2), Album Louis-Ferdinand Céline, Frédéric Vitoux, Bibliothèque de la Pléiade, Gallimard, mai 2023, 1552 pages, 1952 pages, 149 € le coffret jusqu’au 31/12/2023

« Le travail, l’écriture sous le signe de la grand-mère, on ne saurait mieux dire. L’écriture pour distinguer le vrai du faux. Ou l’émotion du frelaté. La modeste besogne du styliste à l’écart des charlatans de la littérature… Tout est là ! » (Frédéric Vitoux).

« Les intervalles provoqués par la dislocation de la phrase sont partout là pour suggérer ce que les mots sont impuissants à dire. Qu’il s’agisse de laisser vibrer une note, de suppléer ce qui n’a pas été dit, ou seulement d’attendre, en retenant son souffle, que la parole reprenne, ces silences si spectaculaires dans l’écriture célinienne sont une des justifications les plus sûres du nom qu’il lui donne de musique » (Henri Godard, Préface).

« C’est la première fois dans cette mélasse d’obus qui passaient en sifflant que j’ai dormi, dans tout le bruit qu’on a voulu, sans tout à fait perdre conscience, c’est-à-dire dans l’horreur en somme. Sauf pendant les heures où on m’a opéré, j’ai plus jamais perdu tout à fait conscience. J’ai toujours dormi ainsi dans le bruit atroce depuis décembre 14. J’ai attrapé la guerre dans ma tête. Elle est enfermée dans ma tête » (Guerre).

Une femme en contre-jour, Gaëlle Josse (par Pierrette Epsztein)

Ecrit par Pierrette Epsztein , le Jeudi, 13 Juillet 2023. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED

Une femme en contre-jour, Gaëlle Josse, Éditions Noir sur Blanc, 2019, 160 pages, 14 €

Une silhouette de « vieille dame solitaire » est assise sur un banc. Elle se fond dans le paysage : « Jour blanc. Le froid entrave sa respiration comme si des glaçons s’insinuaient dans ses poumons à chaque inspiration ». Qui se préoccupe de sa présence ? Les passants passent indifférents pourtant ils la retrouvent chaque jour à la même place. « Elle est sortie malgré le froid qui enserre la ville dans son emprise… ». « Quelques fragments épars surnagent peut-être dans l’océan enténébré d’une mémoire oscillante, fugitivement embrasée, par instants, comme le faisceau d’un phare à éclat ». Ainsi démarre l’histoire passionnante dans laquelle Gaëlle Josse embarque son lecteur dans une étrange pérégrination à travers la vie d’un personnage énigmatique.

Gaëlle Josse s’empare d’une destinée devenue célèbre pour en faire l’objet d’un biographe éminemment littéraire, Une femme en contre-jour. Par le plus grand des hasards, un agent immobilier découvre un jour le travail d’une photographe dans un garde-meuble. Résoudre l’énigme de la personne qui a amassé une quantité innombrable de clichés, de négatifs, non développés, devient une véritable obsession pour cet homme qui espère avoir découvert un trésor et devenir riche et célèbre. Mais l’aventure prendra un tour imprévu. « Entrer dans une intimité, c’est brasser des ténèbres, déranger des ombres, convoquer des fantômes… ». Il ne sera pas le seul. Un historien s’intéressera de près à cette histoire. L’entreprise s’avérera longue et pleine d’embûches.

Le Royaume de Pierre d’Angle, Tome 1, l’Art du Naufrage, Pascale Quiviger (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Mercredi, 12 Juillet 2023. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Fantastique, Folio (Gallimard)

Le Royaume de Pierre d’Angle, Tome 1, l’Art du Naufrage, Pascale Quiviger, Folio, mars 2023, 496 pages, 9,70 € Edition: Folio (Gallimard)

 

Ouvrons sur une taquinerie de lecteur attentif : dans un univers de type médiéval, Quiviger fait dire à un personnage le mot « résilience » (page 463) ; c’est une maladresse lexicale, et l’on en sourit – parce que c’est bien le seul défaut à la cuirasse narrative de ce premier tome du Royaume de Pierre d’Angle que l’on ait trouvé. Enfin, on en connaît un autre, qui est en fait une grande qualité : sa dernière page, qui donne envie de se jeter sur ses trois successeurs afin de connaître la suite et la fin des aventures du prince Thibaut et sa fascinante femme, Ema Beatriz Ejea Casarei. Bien sûr, puisqu’on est au fait des codes de la fantasy, on se doute schématiquement de cette suite et de cette fin, et cette connaissance des codes en question nous a d’ailleurs déjà fait lâcher maints volumes récemment publiés. Mais impossible de laisser choir L’Art du Naufrage, qui a envoûté dès la première page et qu’on a lu goulûment, chaque pause, au travail, à la maison, même brève, étant l’occasion de quelques pages au moins.

Le Magicien, Colm Tóibín (par Jacques Desrosiers)

Ecrit par Jacques Desrosiers , le Mercredi, 12 Juillet 2023. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED, Iles britanniques, Roman, Grasset

Le Magicien, Colm Tóibín, Grasset, août 2022, trad. anglais (Irlande), Anna Gibson, 608 pages, 26 €

 

Cette biographie de Thomas Mann est en fait un roman qui raconte sa vie sur un rythme trépidant en l’émaillant de suspenses. Au revers de la médaille, des chapitres entiers accumulent les péripéties, beaucoup fabriquées de toutes pièces par l’auteur, avec de longues conversations et la description rapprochée de situations intimes. C’est ce qu’on appelle aujourd’hui une exofiction. À cela près qu’elle est assise sur une masse de recherches, comme le montre la bibliographie que Tóibín a annexée à la fin. On lui fait confiance sur le tableau qu’il brosse de l’Allemagne à l’approche du 20ème siècle et de l’adolescence de Mann à Lübeck, que sa mère brésilienne quittera à la mort de son mari pour Munich, où Mann commencera à publier et rencontrera la riche Katia Pringsheim. Sur les mille contrariétés de son exil aux États-Unis et les contacts avec la Maison-Blanche. Sur l’épreuve finale, où Tóibín nous fait voir combien l’écrivain a gardé intacte jusqu’à ses derniers jours son admiration pour la musique, capable d’atteindre une pureté impossible en littérature où il faut se salir les mains. Tóibín suit à la trace cette chronologie d’une vie secouée par les coups de tonnerre des deux guerres mondiales dans un style neutre et réaliste.