Identification

La Une CED

Compost (par Isabelle Morino)

Ecrit par Isabelle Morino , le Lundi, 11 Janvier 2021. , dans La Une CED, Ecriture, Création poétique

 

Compotée crasse

Héraut du pur

 

Gatoire de masse morte

En tresses enchâssées

 

Litière premium spécial as

Ticots tickets de troc

 

Tout ventre dehors

Dans la touille. À la porte,

Sur Jejuri d’Arun Kolatkar (par Patrick Abraham)

Ecrit par Patrick Abraham , le Vendredi, 08 Janvier 2021. , dans La Une CED, Les Livres, Les Chroniques, Asie

 

C’est un événement que la traduction en français par Roselyne Sibille, dans une belle édition bilingue (1), du court recueil d’Arun Kolatkar, Jejuri, sorti en anglais en 1976 et récompensé par le prestigieux Commonwealth Poetry Prize en 1977. Jejuri est une petite ville de l’Etat du Maharastra, dans l’ouest de l’Inde, à deux cents kilomètres de Bombay et à cent cinquante kilomètres de Pune environ, où est vénéré le dieu Khandoba, considéré comme l’une des manifestations locales de Shiva.

Qu’on ne s’attende pas dans ces trente-et-un brefs textes à la rare ponctuation à trouver une Inde conforme aux clichés usuels. Ce ne sont ni des slums misérables, ni des émeutes interreligieuses, ni des yogis impavides méditant sur les ghâts d’un fleuve sacré qui captivent Kolatkar mais, précisément, ce qui ne retiendrait sans doute pas l’attention d’un littérateur trop prévenu ou d’un voyageur en mal d’exotisme.

Le Monstre de la mémoire, Yishaï Sarid (par Mona)

Ecrit par Mona , le Jeudi, 07 Janvier 2021. , dans La Une CED, Les Livres, Les Chroniques, Actes Sud, Israël

Le Monstre de la mémoire, Yishaï Sarid, Actes Sud, Coll. Lettres hébraïques, février 2020, trad. hébreu, Laurence Sendrowicz, 160 pages, 18,50 €

 

Dans son dernier roman, Yishaï Sarid, dont le nom signifie rescapé en hébreu, et qui a perdu sa famille à Auschwitz, pose une question iconoclaste : « à quoi bon tous ces rabâchages ? ». Il affole par un récit grinçant (« Ras-le-bol du mythe, des idées brassées et de cette curiosité malsaine ») sous la forme d’une longue lettre au « représentant officiel de la mémoire », le directeur de Yad Vashem, écrite par un accompagnateur de voyages mémoriels qui veut rendre un compte-rendu loyal de ses missions. Par amour des livres d’histoire, le narrateur s’est retrouvé, presque à son insu, expert sur les camps de la mort. Ses cauchemars l’ont dissuadé de rempiler à l’armée et comme gagne-pain, il a choisi de « s’atteler au devoir de mémoire ». Soucieux de « bien faire le job » dit-il, apprécié des spécialistes en comm’, il sait conseiller les soldats chargés des commémorations militaires comme les concepteurs d’un jeu vidéo pour un projet de modélisation des camps de concentration. En somme, il emballe la marchandise comme il faut avec juste un peu de mal à rajouter la petite touche personnelle d’émotion qu’on attend de lui. Jugé trop négatif, il perd bientôt la confiance de ses supérieurs et se voit relégué au service de touristes vulgaires plus intéressés par le shopping que par les exactions des Einsatzgruppen. On finit par lui confier un projet de collaboration avec un grand réalisateur allemand et c’est l’apothéose.

La Styx Croisières Cie Novembre 2020 (par Michel Host)

Ecrit par Michel Host , le Mercredi, 06 Janvier 2021. , dans La Une CED, Les Chroniques, Chroniques régulières

 

Ère Vincent Lambert, An II

Humain, citoyen le plus vulnérable, la République française, la médecine, la banque et la magistrature réunies, t’ayant baptisé Légume, te tueront.

 

« Pour ne pas insulter aux croyances ou au labeur des autres, pour qu’ils ne m’accusent ni de sécheresse ni de fainéantise, je me suis lancé dans le Désarroi (*) jusqu’à en faire une forme de piété ».

« Le spermatozoïde est le bandit à l’état pur ».

E.M. Cioran, Syllogismes de l’amertume

Lµ-1. Cioran est un visionnaire doublé d’un sage. Il remonte à l’origine, au spermatozoïde. Pourquoi ne cite-t-il pas l’ovule, sa (*) partenaire, sans qui rien ne serait possible de cette abjection de l’humain ? Sans doute parce qu’il ne veut pas accabler le féminin, violé et torturé à l’envi, sous l’emprise constante des grands mâles de toutes les couleurs, patriarches pédophiles, misogynes, têtes creuses, mais élevés en maîtres absolus du monde, n’eussent-ils que deux, ou vingt ans et quatre neurones !

L’arrestation, Derrida-Kafka, Jean Esponde (par Murielle Compère-Demarcy)

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Mardi, 05 Janvier 2021. , dans La Une CED, Les Livres, Les Chroniques

L’arrestation, Derrida-Kafka, Jean Esponde, éd. Atelier de l’Agneau, février 2020, 154 pages, 18 €

 

Fiction, roman épistolaire, journal de bord, prose autobiographique, essai, critique littéraire – ce roman protéiforme brasse un peu et en un livre ces genres dans une dynamique réflexive qui nous embarque dans un récit initiatique, à l’aune du miroir de la littérature romanesque, surtout lorsqu’elle s’exerce en période historique de crise.

L’arrestation de Jean Esponde (qui a déjà écrit des livres concernant Rimbaud, la Corne d’Afrique et le désert afar, Segalen et la Chine, Héraclite et la Grèce ancienne, Barthes… où des cycles s’enchaînent, prose et poésie se nourrissant et avançant parallèlement) se situe dans l’ère du juridique, dans laquelle notre société s’englue progressivement jusqu’à menacer les libertés individuelles. Cet aspect est signalé dès le choix du titre, dans les citations de Kafka et Derrida en exergue, dans les propos du roman et la présence de l’auteur tchèque et du penseur français.