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Biographie

Freddie Mercury, Selim Rauer (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Vendredi, 24 Mai 2019. , dans Biographie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Fayard

Freddie Mercury, octobre 2018, 342 pages, 20,90 € . Ecrivain(s): Selim Rauer Edition: Fayard

 

« Nous prêtons peu d’attention, dans les biographies d’hommes illustres, aux événements de l’enfance. Nous tendons à nous concentrer sur l’épopée, les hauts faits de l’âge mûr. Mais moi qui n’ai été qu’une ombre […] je sais ce qu’il en est de l’enfance, de ce que l’enfance laisse comme trace ou comme oubli » (Camille de Toledano). Sur son enfance comme sur ses origines, celui qui se nommait à l’état-civil Farrokh Bulsara fut extrêmement discret. C’était, il est vrai, en ces temps lointains où un individu ne se définissait nullement par son appartenance à telle ou telle communauté ; en ces temps où ni l’Internet, ni le tintamarre hystérique des réseaux « sociaux », ni les smartphones n’existaient, qui font de chaque individu un voyeur et un paparazzo en puissance, un suppôt du panoptisme et de la surveillance généralisée.

La biographie que Selim Rauer a consacrée à Freddie Mercury parut pour la première fois en 2008. Elle est réimprimée dix ans plus tard, comme on le devine, dans le sillage du « film biographique » Bohemian Rhapsody. Elle est, qu’on se rassure, bien supérieure à cette production cinématographique.

Révoltée, Evguénia Iaroslavskaïa-Markon (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Lundi, 20 Mai 2019. , dans Biographie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Russie, Récits, Seuil

Révoltée, trad. russe Valérie Kislov, 176 pages, 16 € . Ecrivain(s): Evguénia Iaroslavskaïa-Markon Edition: Seuil

 

« Mon autobiographie » est le récit hallucinant d’une vraie « révoltée » contre les abus d’une société communiste et qui va le payer très cher. Le parcours de cette jeune Russe, née en 1902 et exécutée en 1931, appelle tous les qualificatifs : extraordinaire, terrifiant, naturaliste en diable, affolant de vérité.

Dès l’adolescence, Evguénia s’oppose, se rebelle, se voit exclue du secondaire ; elle est une âme qui bout sans cesse, exalte la franchise, décourage les tièdes. Entre Moscou et Leningrad, sa vie connaît une foultitude de soubresauts.

Epouse du poète Alexandre  Iaroslavski (1896-1930), elle explique dans son autobiographie comment elle en est arrivée à défier tous les pouvoirs. Dès les années 20, le couple connaît nombre d’intimidations, d’exils (voyage à Berlin, Paris), d’arrestations, d’assignations à résidence. Le poète terminera son parcours dans les camps des îles Solovki. Sa femme, condamnée, sera exécutée. Elle avait vingt-neuf ans.

La chance de l’écrivain, David Lodge (par Sylvie Ferrando)

Ecrit par Sylvie Ferrando , le Mardi, 07 Mai 2019. , dans Biographie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Iles britanniques, Récits, Rivages

La chance de l’écrivain, avril 2019, trad. anglais Maurice et Yvonne Couturier, 540 pages, 24 € . Ecrivain(s): David Lodge Edition: Rivages

 

Après Né au bon moment (2016), dont le titre original est Quite a good time to be born, A Memoir, 1935-1975 (2015), Lodge renoue ici avec ses mémoires autobiographiques, à présent dans les années 1980. C’est son identité d’écrivain qu’il interroge dans ce livre.

Lodge s’est toujours intéressé à la pratique de la fiction et à l’écriture créative des écrivains, dont il parle dans au moins deux ouvrages : The Practice of Writing, non traduit (1996) et The Art of Fiction, recueil de chroniques littéraires qu’il a écrites pour The Independant (L’Art de la fiction, Payot et Rivages, 2008). Pour lui, l’étude des textes littéraires et des intentions de son auteur sont le pendant de l’écriture de fiction narrative. Sa carrière d’universitaire, qui plus est de professeur de littérature anglaise moderne et contemporaine à l’université de Birmingham, a nourri ses romans. Contenu biographique et factuel et contenu fictionnel interfèrent, faisant de cet écrivain un partisan de l’« intégrationnisme », c’est-à-dire de la concordance entre l’expérience de l’auteur et le matériau textuel.

Celui qui dut courir après les mots, Gil Jouanard (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Mercredi, 20 Février 2019. , dans Biographie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie, Phébus

Celui qui dit courir après les mots, novembre 2018, 208 pages, 18 € . Ecrivain(s): Gil Jouanard Edition: Phébus

 

Signaler en épigraphe qu’on a aimé et qu’on aime, dans le désordre, Montaigne, Calet, Follain, Fargue et Supervielle, c’est enjoindre son lecteur à lire ce livre sous la bannière heureuse de ces dénicheurs d’enfance, si j’ose ainsi appeler ces poètes et prosateurs qui ont dû nourrir durablement notre Gil.

Bien sûr, passant du « il » au « je », sans en faire un jeu factice, Jouanard, avec ce long titre, tire de sa vie mission à comprendre, au-delà de ses propres signes, celle des autres, et loin, derrière, dans une volonté anthropologique de saisie des éléments (à l’aune de Bachelard), celle des ancêtres qui découvrirent pas à pas chasse, outils, langage, expression artistique.

De quoi une vie, pour celui qui la commente à l’âge respectable de plus de quatre-vingts printemps, est-elle tissée ? Du bois des ancêtres ? De cette insigne conquête des mots ? D’une timidité combattue à force de solitude et d’âpre lutte ? Ou encore de cette science personnelle qui pousse un être à se deviner très tôt, dans la forge des mots ?

Comment je suis devenu moi-même, Irvin D. Yalom (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Mardi, 29 Janvier 2019. , dans Biographie, Les Livres, Critiques, Essais, La Une Livres, USA, Albin Michel

Comment je suis devenu moi-même, août 2018, trad. anglais (USA) Françoise Adelstain, 428 pages, 23,90 € . Ecrivain(s): Irvin D. Yalom Edition: Albin Michel

 

Toute autobiographie est prétentieuse, d’une manière explicite ou implicite. Elle postule que la vie de qui tient la plume s’est distinguée de la vie des cent milliards d’êtres humains qui l’ont précédée ou accompagnée, de manière suffisamment nette et remarquable pour qu’elle vaille la peine d’être racontée et imprimée. C’est un peu comme si on inaugurait sa propre statue, dans un parc de sa ville natale.

Cette idée, que peu d’entreprises littéraires sont a priorimoins modestes que l’autobiographie, ressurgit en considérant un titre pareil : Comment je suis devenu moi-même. L’original anglais (Becoming myself. A Psychiatrist’s Memoir) est un ton en-dessous et a le mérite de relier l’entreprise autobiographique à ce qui fut, pour Irvin D. Yalom, l’aventure de sa vie.

Auteur de The Theory and Practice of Group Psychotherapy, un manuel de psychiatrie estimé aux États-Unis (c’est en tout cas lui qui l’affirme et il n’y a pas de raison d’en douter), Irvin D. Yalom est connu en France par ses romans, prenant pour personnages de grands philosophes du passé (Le Problème SpinozaLa Méthode SchopenhauerEt Nietzsche a pleuré).