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Récits

Petite, Sarah Gysler (par Lionel Bedin)

Ecrit par Lionel Bedin , le Mardi, 11 Juin 2019. , dans Récits, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Editions des Equateurs

Petite, juin 2018, 190 pages, 18 € . Ecrivain(s): Sarah Gysler Edition: Editions des Equateurs

 

Sarah Gysler est née « au milieu des années nonante » à Lausanne, « exactement quarante-huit jours après que Kurt Cobain eut été retrouvé mort dans sa maison de Seattle ». Coïncidence ? En tout cas comme la promesse d’un récit rock’n’roll…

Première partie : la colère.

Mais l’enfance de Sarah ne l’est pas tellement rock’n’roll. Quand elle a trois ans, ses parents « cessent légalement de s’aimer ». Premier choc. Le deuxième vers l’âge de huit ans, quand elle apprend qu’elle a des « origines ». Ça se voit sur sa figure : sa mère est algérienne. « En Algérie, c’est une plus-value d’avoir un passeport suisse, en Suisse c’est un malus d’être arabe ». Éternel problème : être étrangère partout. Puis d’autres événements s’enchaînent : les gardes alternées, le chantage de la mère (« j’aurais mieux fait d’avorter »), la maladie du père.

Mes années japonaises, René de Ceccatty (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Lundi, 27 Mai 2019. , dans Récits, Les Livres, Critiques, Livres décortiqués, La Une Livres, Biographie, Mercure de France

Mes années japonaises, mai 2019, 248 pages, 18 € . Ecrivain(s): René de Ceccatty Edition: Mercure de France

Mes années japonaises est le 45ème livre (si l’on compte Adulte ? Jamais, et La Persécution, deux anthologies pasoliniennes, avec traductions et préfaces) de l’écrivain français, né à Tunis le 1er janvier 1952, grand connaisseur de la littérature italienne, essayiste, romancier, poète, dramaturge, éditeur (au Seuil), directeur de collection (on pense à « Haute Enfance » chez Gallimard, entre autres ; chez Rivages pour la regrettée Elisabeth Gille), traducteur du japonais.

À le suivre depuis L’Accompagnement (admirable « accompagnement » amical d’un ami atteint du sida à l’hôpital Broussais, Gilles Barbedette, mort en 1992), et pour avoir apprécié Fiction douce, La Sentinelle du rêve, Enfance, dernier chapitre, Pasolini (biographie dans la collection dirigée chez Gallimard par de Cortanze), le premier essai en français consacré à « Elsa Morante », puis-je assurer que les lecteurs fidèles à de Ceccatty ne seront pas déçus par ses « Années » japonaises, essai de biographie au meilleur sens du terme pour un spécialiste de la chose à l’endroit des auteurs qu’il chérit (Pasolini, Moravia, Callas, Morante), clin d’œil par le titre à Annie Ernaux, publié dans la collection bleue du Mercure (là parut, et ce fut l’une de ses dernières grandes critiques du Monde, le très beau livre de Françoise Lefèvre, manière aussi d’essai biographique, Un album de silence, 2008).

Révoltée, Evguénia Iaroslavskaïa-Markon (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Lundi, 20 Mai 2019. , dans Récits, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Russie, Biographie, Seuil

Révoltée, trad. russe Valérie Kislov, 176 pages, 16 € . Ecrivain(s): Evguénia Iaroslavskaïa-Markon Edition: Seuil

 

« Mon autobiographie » est le récit hallucinant d’une vraie « révoltée » contre les abus d’une société communiste et qui va le payer très cher. Le parcours de cette jeune Russe, née en 1902 et exécutée en 1931, appelle tous les qualificatifs : extraordinaire, terrifiant, naturaliste en diable, affolant de vérité.

Dès l’adolescence, Evguénia s’oppose, se rebelle, se voit exclue du secondaire ; elle est une âme qui bout sans cesse, exalte la franchise, décourage les tièdes. Entre Moscou et Leningrad, sa vie connaît une foultitude de soubresauts.

Epouse du poète Alexandre  Iaroslavski (1896-1930), elle explique dans son autobiographie comment elle en est arrivée à défier tous les pouvoirs. Dès les années 20, le couple connaît nombre d’intimidations, d’exils (voyage à Berlin, Paris), d’arrestations, d’assignations à résidence. Le poète terminera son parcours dans les camps des îles Solovki. Sa femme, condamnée, sera exécutée. Elle avait vingt-neuf ans.

Travelling, Un tour du monde sans avion, Christian Garcin, Tanguy Viel (par Sylvie Zobda)

Ecrit par Sylvie Zobda , le Mercredi, 15 Mai 2019. , dans Récits, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Jean-Claude Lattès, Voyages

Travelling, Un tour du monde sans avion, mars 2019, 281 pages, 18,90 € . Ecrivain(s): Christian Garcin, Tanguy Viel Edition: Jean-Claude Lattès

 

A l’heure de la mondialisation, de l’internet 4G, des liaisons satellitaires, des flux où vitesse et densité vont de pair, qu’est-ce qui pousse Christian Garcin et Tanguy Viel à réaliser un tour du monde sans avion, en cent jours, pour faire une boucle dans l’hémisphère Nord, entre le 35ème et le 55ème parallèle ? Le titre de ce roman écrit à quatre mains annonce un travelling, un déplacement de l’ordre de la promenade, et non du survol rapide, un voyage doux posé sur des rails préétablis, délimitant les routes du cargo, de la voiture, du bus, du train, passant par l’Atlantique, les Etats-Unis, le Pacifique, le Japon, la Chine, la Russie puis l’Europe.

La géographie s’annonce donc variée, mais le livre est bien plus encore un voyage dans le temps, celui du réel, et non du fictionnel, encore moins de la légende collective, des représentations grossières, du passé plus ou moins glorieux. Les deux écrivains, pour parvenir à leur fin, restent dans le terre-à-terre, ils s’accrochent au sol présent.

Un sacré gueuleton, Jim Harrison (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Mardi, 14 Mai 2019. , dans Récits, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Flammarion

Un sacré gueuleton, novembre 2018, trad. anglais (USA) Brice Matthieussent, 374 pages, 21,50 € . Ecrivain(s): Jim Harrison Edition: Flammarion

 

Jim Harrison est mort le 26 mars 2016, dans sa « résidence d’hiver », en Arizona. Il est rare que, deux ans et demi après son départ, un écrivain adresse à ses lecteurs un salut aussi plein de vie.

Pour diverses raisons, les livres de Jim Harrison se vendaient mieux en France que dans son pays natal. La postérité dira s’il n’y eut pas quelque malentendu dans cette réception (le chef-d’œuvre écrit en neuf jours qu’est Légendes d’automne est ce qu’il y a de moins « harrisonien » chez Jim Harrison). Mais il est indéniable que la France l’aimait et il le lui rendait bien. Son itinéraire gastronomique le conduisait de Paris à Collioure en passant par Lyon, Arles et le Morvan. Il ne faisait pas partie de ces Américains qui, en période de brouille diplomatique, achètent des flacons de vins français pour les vider à l’égout (imagine-t-on une manière de protester plus stupide ?). Certes, le vin français acheté par Jim Harrison au long des ans a également fini à l’égout, mais non sans un certain nombre d’étapes, de transformations – de sublimations.