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Pays nordiques

Betty, Arnaldur Indridason (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Dimanche, 23 Octobre 2011. , dans Pays nordiques, Les Livres, Recensions, Polars, La Une Livres, Métailié, La rentrée littéraire

Betty. Trad. de l’islandais par Patrick Guelpa. 27 octobre 2011. 206 p. 18€ . Ecrivain(s): Arnaldur Indridason Edition: Métailié

Diamant d’un noir étincelant, Betty est un chef-d’œuvre du genre. Un chef-d’œuvre qui va compter dans la littérature noire. Donc dans la littérature tout court.

On a l’habitude avec Indridason de plonger dans un univers sombre, fatidique, marqué par la course tragique des êtres. Avec Betty, notre Islandais favori, qui abandonne pour ce livre son détective fétiche Erlendur Sveinsson, atteint des sommets, signant un polar digne de la plus belle époque, celle des Chandler, des Goodis. Et puis celle de James Cain. Betty commence bien sûr par une épigraphe de lui :

« Ceci devrait être un meurtre tellement désolant que ça n’en serait même pas un, mais seulement un banal accident de voiture qui arrive quand des hommes sont soûls et qu’il y a de l’eau-de-vie dans la voiture et tout ce qui va avec . » (James M. Cain, Le Facteur sonne toujours deux fois)

Et la citation ne s’arrête pas là. En fait, elle ne s’arrête pas du tout ! Jusqu’à la fin du livre, Indridason nous offre une merveille de « remake » du Facteur. Ce n’est pas nouveau. Ce chef-d’œuvre de la littérature noire a inspiré des centaines de livres et de films.

Les vaches de Staline, Sofi Oksanen

Ecrit par Paul Martell , le Jeudi, 15 Septembre 2011. , dans Pays nordiques, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Stock, La rentrée littéraire

Les Vaches de Staline, Stock La Cosmopolite, 524 pages, 22,50 € . Ecrivain(s): Sofi Oksanen Edition: Stock

Après l’énorme succès obtenu par Purge l’an dernier, les éditions Stock publient l’un des précédents livres de Sofi Oksanen, paru initialement en 2003, Les Vaches de Staline.

Les vaches de Staline, c’est ainsi que les Estoniens déportés en Sibérie désignèrent les maigres chèvres qu’ils trouvèrent là-bas pour se moquer de la propagande soviétique qui assurait que le régime produisait des vaches exceptionnelles.

« La vache de Staline, c’est une chèvre ». Une chèvre toute maigre, comme Anna, une brindille de quarante kilos qui souffre de troubles alimentaires. Anna ne sait pas manger. Elle est boulimarexique, c’est-à-dire qu’elle est à la fois boulimique et anorexique.

Pour soulager son ventre « interminablement avide de sucreries », elle ingurgite des quantités astronomiques de nourriture, de quoi nourrir un régiment pendant plusieurs jours.


« Je me suis mise à mesurer le temps en kilocalories », dit-elle.


Entre ciel et terre, Jon Kalman Stefansson

Ecrit par Yann Suty , le Mercredi, 10 Août 2011. , dans Pays nordiques, Les Livres, Recensions, Roman, Gallimard

Entre ciel et terre. 2010. 21 €. Traduit de l'islandais par Eric Boury . Ecrivain(s): Jon Kalman Stefansson Edition: Gallimard

Ne vous fiez pas à son titre un peu bateau : Entre ciel et terre est une merveille.

L’une des toutes premières phrases du livre donne le ton : « C’était en ces années où, probablement, nous étions encore vivants ». Vivants mais en même temps morts, comme Stefánsson l’écrit un peu plus loin : « Nous errons ici, morts, mais pourtant vivants ».

Entre ciel et terre se déroule en Islande, à une époque où on peut écouter Dickens donner des lectures de ses œuvres et où Emile Zola fait l’actualité pour la sortie d’un nouveau roman. L’Islande se trouve alors « à l’extrême limite du monde », si loin à l’écart « que bien des gens ignorent [son] existence ». « Il n’y a aucune ville, pas de chemin de fer, aucun palais » et « rien à voir que des montagnes, des chutes d’eau, des étendues de terre accidentées ». La vie y est rude, d’autant plus qu’il faut faire avec « le voisinage constant de la mort ».

Mais c’est aussi un pays qui devient magnifique sous la plume poétique (image quelque peu galvaudée, mais ô combien vraie !) de Stefánsson. Un pays dans lequel « les montagnes sombrent dans l’eau », où « la mer est bleu de froid », et « respire lourdement ». Un pays où la mer « rêve que le clair de lune est la somme de ses rêves ». C’est aussi un pays qui a « cette lumière capable de te transpercer et de te changer en poète ».

Les Bûcherons, Roy Jacobsen (par Yann Suty)

Ecrit par Yann Suty , le Dimanche, 08 Mai 2011. , dans Pays nordiques, Les Livres, Recensions, Critiques, La Une Livres, Roman, Gallimard

Les Bûcherons, Gallimard, 194 pages, 16,90 € . Ecrivain(s): Roy Jacobsen Edition: Gallimard

Finlande, Hiver 1939. Alors que les forces soviétiques envahissent le pays, la petite ville de Suomussalmi est évacuée. Ses habitants incendient leurs maisons pour qu’elles ne tombent pas aux mains de l’Armée Rouge. Seul Timmo Vatanen, considéré comme l’idiot du village, refuse de partir. « La plupart des gens de la région ont pitié de moi, quand ils ne sont pas agacés par mon apparence ».
Rapidement, il découvre qu’il n’est pas tout seul.
« Et puis, j’ai fait deux découvertes : premièrement, tous les êtres vivants n’avaient pas déserté la ville, il restait les chats, j’en ai vu certains de mes yeux, quant aux autres, j’ai vu seulement leurs traces, il y en avait toujours plus qui zébraient la neige, telle une farine d’un blanc étincelant saupoudrée sur toute cette noirceur ».
Bientôt, les Soviétiques arrivent et bouleversent la ville. « Une foule d’hommes qui courent, marchent, en camion, à cheval, des étrangers, des silhouettes en noir et leurs machines qui ont brisé le silence et rempli la ville d’odeurs et de bruits qui n’y ont jamais existé, des milliers de silhouettes étrangères qui ont toutes quelque chose de bizarre et d’incertain, comme si elles avaient émergé du sol et ne supportaient pas la lumière du jour ».

Amour, Hanne Orstavik (par Anne Morin)

Ecrit par Anne Morin , le Samedi, 16 Avril 2011. , dans Pays nordiques, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Roman, Les Allusifs

Amour, 2011, 134 pages, 14 € . Ecrivain(s): Hanne Orstavik Edition: Les Allusifs

 

Libéré de l’espoir… non, le petit Jon est trop jeune pour penser cela, penser que c’est cela qui s’installe dans sa tête quand il se couche, au seuil de sa porte, dans la nuit glaciale : il aura neuf ans le lendemain.

Il en a rêvé, de ce train électrique pour son anniversaire, ce train qui siffle dans son esprit et qui les emporte, Vibeke, sa mère et lui. Loin d’ici, dans cet endroit reculé de Norvège où l’on dirait que l’hiver et la nuit ne finiront jamais… Vibeke, sa mère, il ne l’appelle pas autrement, ne pense à elle que sous ce prénom. Une seule fois, vers la fin, il pensera « maman ». Ces deux-là ne se sont pas trouvés, ne se retrouvent pas. Leurs routes se croisent, à un moment, mais implacable, le destin les trace et les traque.

Le fil du récit passe de la mère au fils, enchevêtrant leur soirée d’abord légèrement, puis effroyablement. On assiste, impuissant, à l’inéluctable.