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La Une Livres

L’écorce rouge, Murielle Compère-Demarcy (par Charles Duttine)

Ecrit par Charles Duttine , le Lundi, 04 Mai 2020. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Poésie, Z4 éditions

L’écorce rouge, Murielle mars 2020, 166 pages, 15 € . Ecrivain(s): Murielle Compère-Demarcy Edition: Z4 éditions

 

Le livre des heures naturelles

Ouvrir un recueil de poésie et écouter la voix d’un poète, c’est abandonner pour un temps l’utilitarisme étriqué et mettre à distance le monde pragmatique dans lequel nous oublions trop souvent l’essentiel de nos vies. C’est aussi écouter une musique singulière, partager l’originalité d’un regard et encore suivre « la magnifique et sauvage déraison » selon le mot de Nietzsche dans Le Gai Savoir. Tout cela, nous le ressentons en abordant le recueil de la poétesse Murielle Compère-Demarcy, L’écorce rouge.

L’ouvrage se présente comme un triptyque. Les textes de L’écorce rouge sont suivis de Prière pour Notre-Dame de Paris (texte de circonstance, s’il en est) et de Hurlement (ce dernier étant dédié à Patti Smith). Il y a dans les poésies de Murielle Compère-Demarcy, qui publie également sous le nom de MCDem, une force d’écriture, une ardeur et une volonté entêtée de marquer sa présence, ce qu’elle appelle le « Vivre » et « l’Ecrire » face au monde. « J’écris, rai de lumière vacant battant des ailes / sur le seuil de la porte obstruée du jour ».

Le Cercle des Hommes, Pascal Manoukian (par Patrick Devaux)

Ecrit par Patrick Devaux , le Vendredi, 01 Mai 2020. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman, Seuil

Le Cercle des Hommes, Pascal Manoukian, janvier 2020, 336 pages, 19,50 € Edition: Seuil

 

Il faut savoir lire lentement. Ecrire aussi, parfois. Qualité oblige. Et c’est certainement le cas avec ce superbe roman inventif, porteur d’un sublime message, avec aussi le ton du divertissement tant on souhaite croire en l’intrigue.

Il n’y a que des héros et des héroïnes de tous les jours dans ces pages pensées dans le décor de l’Amazonie.

Quelques indiens, les Yacou, se sont volontairement limités en nombre pour jouir avec densité d’un substrat de vie préservée de ce qu’on appelle d’habitude la civilisation.

Un homme d’affaires, égaré aux commandes de son avion, survole le « Cercle des hommes » quand survient l’accident.

Pertes de repères, bien sûr et prise de connaissance, étonnante, avec les Yacou :

Œuvres complètes I, Roberto Bolaño (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Jeudi, 30 Avril 2020. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Amérique Latine, Roman, L'Olivier (Seuil)

Œuvres complètes I, février 2020, trad. espagnol (Chili) Robert Amutio, Jean-Marie Saint-Lu, 1227 pages, 29 € (25 € jusqu’au 31 août 2020) . Ecrivain(s): Roberto Bolaño Edition: L'Olivier (Seuil)

 

« Celui qui cligne des frontières s’appelle Destin

mais moi je l’appelle Petite fille Folle.

Celle qui court très vite sur les lignes de ma main

s’appelle Destruction

mais je l’appelle Petite fille Silencieuse

Avui i sempre,

Amics ».

 

Les Editions de l’Olivier se lancent dans une étourdissante aventure éditoriale : publier l’ensemble des poèmes, des courtes histoires et des romans de Roberto Bolaño, qui doit s’achever en 2022.

Hank Stone et le cœur de craie, Carl Watson (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mercredi, 29 Avril 2020. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, USA, Roman

Hank Stone et le cœur de craie (Hank Stone and the Heart of Chalk), Carl Watson, éditions Vagabonde. Traduit de l’américain par Brice Matthieussent. 63 p. 7,50 €

 

Une novella peut-être, un très court roman qui laisse sous le coup le lecteur incrédule. La puissance de ces brèves de quartier, d’un immeuble, le Stratford Arms – le héros vit, regarde et raconte ce qu’il voit de la fenêtre de son appartement – est proprement extraordinaire. Et c’est pourtant de l’ordinaire qu’il s’agit, de gens ordinaires, dans des scènes ordinaires, dans un quartier ordinaire de … New York peut-être ou bien ailleurs, partout.

Hank Stone est un regard et une oreille. On ne saura rien de plus de lui. Ni son allure, ni son métier (travaille-t-il ou passe-t-il tout son temps à regarder à travers sa fenêtre ?), ni ses pensées, ni ses émotions. Non. Juste un regard et une oreille. Sans le moindre commentaire. Il est difficile de ne pas évoquer le Grand Raymond Carver dans ce parti pris d’objectivation des scènes, dans cette mise à distance du vécu. Les bruits et les lumières/ombres peuplent ces brèves, les emplissant d’une inquiétude permanente, d’une tension dont il faut tenter de trouver l’origine. Des obsessions de Hank Stone sûrement. Son regard est panoptique, son écoute hyper perceptive. Il y a dans ces obsessions la fiche clinique d’un paranoïaque qui regarde le monde comme si, de chaque personne, de chaque objet, de chaque scène ordinaire pouvait surgir soudain, terrible et menaçante, une horreur.

Les Vagues, Virginia Woolf (par François Baillon)

Ecrit par François Baillon , le Mardi, 28 Avril 2020. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Iles britanniques, Roman, Le Livre de Poche

Les Vagues, trad. Marguerite Yourcenar, 320 pages, 7,30 € . Ecrivain(s): Virginia Woolf Edition: Le Livre de Poche

 

Dans son journal, Virginia Woolf a noté : « Il y a peu de livres que j’aie écrits avec autant d’intérêt que Les Vagues. (…) Je trouve que cela valait la peine de lutter ». Est-ce à en déduire que la rédaction de ce roman fut une véritable épreuve pour l’écrivaine ? Et d’ailleurs, est-ce un roman, comme on peut se poser la question pour d’autres œuvres de Virginia Woolf ?

Dans tous les cas, il est intéressant de relever une contradiction : se donnant pour but de représenter « la vie elle-même qui s’écoule », la romancière a vraisemblablement eu à se battre pour exprimer les mouvements d’une fluidité propre à l’eau. Cependant, à la façon d’un musicien qui doit lutter longtemps avant de donner naissance à une virtuosité sans effort, Virginia Woolf honore ses intentions de départ : nous voguons, en effet, et le courant n’est pas particulièrement violent. On pourrait même déplorer une forme de lenteur, notamment dans la description des paysages qui ouvre chaque partie du livre (descriptions au reste composées comme de véritables tableaux).