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Les Chroniques

La Condition solitaire, Olivier Larizza (par Murielle Compère-Demarcy)

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Mardi, 05 Septembre 2023. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED, Poésie

La Condition solitaire, Olivier Larizza, éditions Andersen, mars 2023, 120 pages, 9,90 €

Publiée par les éditions Andersen dans la Collection Poesia, La Condition solitaire nous offre un nouveau rendez-vous avec l’écrivain et universitaire Olivier Larizza (poète, romancier, nouvelliste, essayiste, conteur et dramaturge, enseignant-chercheur à la faculté de Strasbourg, des Antilles puis de Toulon). Rendez-vous d’autant plus rayonnant qu’il était inattendu, puisque le poète de La Mutation, précédemment publiée chez le même éditeur dans la Collection Confidences (2021), nous avait annoncé que « la poésie c’était en quelque sorte fini pour (lui) : (qu’il avait) arrêté avec cette drogue douce ». Il nous expliquait alors que sa situation autobiographique avait amoindri avec le temps la source de son inspiration poétique, le poète étant parvenu à une période de sa vie (comme il la transpose via ses poèmes dans le cycle « La vie paradoxale » amorcé en 2016 avec L’Exil suivi de L’Entre-deux en 2017 puis de La Mutation en 2021).

Les terres sans sommeil, Emmanuelle Grandjean (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 04 Septembre 2023. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED, Poésie

Les terres sans sommeil, Emmanuelle Grandjean, éditions de Corlevour, juin 2023, 96 pages, 16 €

 

Éléments

Avec le livre d’Emmanuelle Grandjean, j’ai traversé des thèmes qui me sont proches, notamment tout ce qui se rattache à la philosophie de Gaston Bachelard, et surtout ses découvertes de l’importance des quatre éléments d’Empédocle, à savoir : la terre, le feu, l’eau et l’air. Je n’ai cessé de rencontrer des gouttelettes faites de feu, des brumes humides, de la pluie, du travail de la lumière sur les choses, l’ombre, la clarté de certains ciels, et toutes les ambiguïtés inhérentes à ces mélanges.

Et pour résumer tout cela à un seul terme, je dirais : étoile, astre de feu pendu dans le vide de l’air, conglomérat de glaces martiennes, lumière tournoyant dans l’univers. Éther, vertige d’une espèce d’enivrement, qui semble venu de la nature, de l’océan – donc d’un espace maritime attiré et repoussé par l’astre lunaire, lumière blanche, éblouissement du ciel nocturne.

Dictionnaire paradoxal de la philosophie, Penser la contradiction, Pierre Dulau, Guillaume Morano, Martin Steffens (par Marc Wetzel)

Ecrit par Marc Wetzel , le Vendredi, 01 Septembre 2023. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED

Dictionnaire paradoxal de la philosophie, Penser la contradiction, Pierre Dulau, Guillaume Morano, Martin Steffens, Éditions du Cerf, octobre 2022, 760 pages, 34 €

 

La fameuse réplique de Churchill à une dame acariâtre (qui venait de lui lancer publiquement : « Si j’étais votre épouse, monsieur, j’empoisonnerais votre verre de whisky ») : « Et moi, madame, si j’étais votre époux, je le boirais » – dit merveilleusement la puissance révélatrice de la négation humaine, et l’usage décisif du paradoxe. Le paradoxe, c’est l’auto-contradiction féconde, l’alliance éclairante et lucide d’incompatibilités aveuglantes, le conflit victorieux d’une raison avec elle-même. Pas une simple astuce rhétorique (« saper le sens pour faire sens »), mais la soudaine révélation d’une contradiction qui nous hantait, et que notre pensée qui l’assume dépasse. C’est comme la simple visite d’une impossibilité logique qui saurait souligner la réalité de sa porte d’entrée cachée. C’est comme un lapsus expérimental (si mon inconscient fait des siennes, en quoi est-il mien ? mais si j’ai dû choisir ce que j’exclus de pouvoir penser, en quoi est-il inconscient ?), un non-être partant à l’aventure, un « tremblé » de la possible construction du vrai.

Jérusalem, William Blake (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 28 Août 2023. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED, Poésie, Arfuyen

Jérusalem, William Blake, éd. Arfuyen, juin 2023, trad. anglais, Romain Mollard, 192 pages, 17 €

 

Énigme

Le voyage complexe qu’est le voyage du lecteur ici doit rester actif jusqu’à la fin du recueil, poursuivant une déambulation langagière pleine d’énigmes, de mots, d’épithètes et de noms propres qui dessinent comme une épopée tout autant articulée sur un récit que sur une musique ou un travail d’orfèvrerie au sein du langage. C’est en vérité une vision du monde – vision sujette à l’intellection. On ressent nettement que cette imagination est celle aussi d’un peintre, donc hanté par les images. On ressent nettement le peintre derrière le poète.

Oui, mais quelles images ? Breughel l’Ancien, Odilon Redon, toutes les versions classiques du thème de la Tentation d’Antoine, bien sûr Gustave Moreau. Enfin une peinture chargée de symboles et de clés subjectives. Et quels livres ? Un peu de l’Apocalypse, de la Légende des Nibelungen, d’Homère, de l’Enfer de Dante, et tout cela dans un art de la surcharge, un travail ressemblant en un sens à l’épopée de Milton.

Fils, Olivier Vossot (par Marc Wetzel)

Ecrit par Marc Wetzel , le Mercredi, 23 Août 2023. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED

Fils, Olivier Vossot, La Crypte, avril 2023, 108 pages, 15 €

Un père alcoolique, faible et qui « brûle seul » (qui déploie sa rare énergie à la consumer, et ne paraît rayonner que pour « éteindre tout » le reste, p.40) ; voilà le viatique éducatif de l’auteur, donnant lieu à une sorte de pénitentiel et pénitentiaire récit – ou plutôt relation impressionniste, car tout revient comme voleter au-dessus d’un centre qui toujours se dérobe – de formation. C’est que le géniteur a pris pour lui (et non sur lui !) tout le vestiaire des conditions, n’a pas laissé vacante la place à prendre, par l’autre, pour devenir soi. Il aura comme muré le préau d’investiture :

« je commence

et tu n’as pas de fin

tout menace d’éteindre tout

brûle du feu déçu piétiné

brûle seul

ne brûle pas » (p.40)