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Amérique Latine

L’oubli que nous serons, Héctor Abad

Ecrit par Nathalie de Courson , le Lundi, 11 Décembre 2017. , dans Amérique Latine, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Folio (Gallimard)

L’oubli que nous serons, trad. espagnol (Colombie) Albert Bensoussan, 400 pages, 8,30€ . Ecrivain(s): Héctor Abad Edition: Folio (Gallimard)

 

L’année France-Colombie qui s’achève nous a permis de mieux connaître certains artistes et écrivains colombiens de grande valeur, dont Héctor Abad Faciolince, aussi sensible et chaleureux dans son œuvre romanesque que dans son contact avec le public. Le titre énigmatique de son livre autobiographique, L’Oubli que nous serons, provient d’un sonnet de Borges (1) trouvé dans la poche du père de l’auteur après son assassinat en 1987 à Medellín par une milice paramilitaire : « Nous voilà devenus l’oubli que nous serons ». Mais la dédicace du livre à deux amis survivants du père, et l’épigraphe du poète israélien Yehuda Amichaï dissipent un peu la mélancolie de ce titre en affirmant d’emblée la volonté de mémoire qui anime le livre :

Et pour l’amour de la mémoire

je porte sur mon visage le visage de mon père.

Comment construire un livre autour d’un père exceptionnel sans tomber dans la mièvrerie hagiographique ? se demande le narrateur.

Le neveu d’Amérique, Luis Sepúlveda

Ecrit par Cathy Garcia , le Lundi, 09 Octobre 2017. , dans Amérique Latine, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Métailié

Le neveu d’Amérique, traduit de l’espagnol (Chili) par François Gaudry, 174 pages, 9 € . Ecrivain(s): Luis Sepulveda Edition: Métailié

 

Des notes disséminées, prises au cours d’un voyage, un très long voyage étalé sur des années, voyage intérieur autant que de kms parcourus, qui mena l’auteur d’une des plus infâmes prisons de la dictature chilienne, celle de Temuco, où il passera deux années et demi de sa jeunesse, jusqu’à Martos en Andalousie, village natal de son grand-père anarchiste, exilé lui aussi, afin de tenir une promesse faite à ce dernier. Pour cela, il lui faudra errer à travers une bonne partie de l’Amérique du sud pendant très longtemps. Errance épique avec le poids de cette interdiction de quitter le continent, le poids d’une seule stupide et incompréhensible lettre qui marque son passeport.

Une vieille chanson chilienne dit : « Le chemin a deux bouts et aux deux quelqu’un m’attend ». L’ennui c’est que ces deux bouts ne limitent pas un chemin rectiligne, mais tout en courbes, lacets, ornières et détours, qui ne conduisent nulle part.

Un dimanche de révolution, Wendy Guerra

Ecrit par Stéphane Bret , le Vendredi, 25 Août 2017. , dans Amérique Latine, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, La rentrée littéraire, Buchet-Chastel

Un dimanche de révolution, 24 aout 2017, trad. Espagnol (Cuba) Marianne Millon, 211 pages, 19 € . Ecrivain(s): Wendy Guerra Edition: Buchet-Chastel

 

La littérature d’un pays peut révéler, d’une manière convaincante et efficace, les réalités de la société décrite par ses auteurs, ses blocages, ses drames, ses souffrances. C’est le cas de Cuba, pays de l’espérance révolutionnaire tiers-mondiste dans les années soixante, puis le théâtre d’un développement inexorable de la répression vis-à-vis de ceux qui « pensent autrement », les dissidents. Roberto Ampuero avait fort bien décrit la perversion des idéaux de l’origine dans son roman Quand nous étions révolutionnaires. Zoe Valdès avait évoqué cette situation de l’artiste confronté aux limitations de sa liberté d’écrire dans Chasseuse d’astres.

Dans Un dimanche de révolution, Wendy Guerra reprend cette thématique, celle de la situation de l’artiste, de son identité face à un régime hostile, omniprésent, s’immisçant sans cesse dans la vie privée des citoyens, au point de l’anéantir ou de la rendre très illusoire.

Une chance minuscule, Claudia Pineiro

Ecrit par Martine L. Petauton , le Jeudi, 22 Juin 2017. , dans Amérique Latine, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Actes Sud

Une chance minuscule, mars 2017, trad. espagnol (Argentine) Romain Magras, 261 pages, 22 € . Ecrivain(s): Claudia Piñeiro Edition: Actes Sud

 

Absolument prenant. Au croisement – subtil mélange – du récit peut-être autobiographique ou pas loin, du thriller, du drame intimiste. Plongée en apnée au fond des composantes troublantes d’un « soi » qui n’est pas celui de n’importe qui. Vraie réussite que ce Une chance minuscule, peut-être parce qu’il est composé de tout ce qui définit la littérature, dans le vaste comme le simple : d’abord une histoire racontée, des personnages et situations qu’on enfourche sans redescendre, et puis, une écriture et une architecture. Sans oublier une musique, un rythme, qu’on n’oubliera pas…

En Argentine, de nos jours – ce n’est pas sans intérêt – mais transférable partout, pour peu qu’on reste dans une bourgeoisie bienséante et catholique. Une famille, maison, école – le chic collège Saint Peter dans le grand Buenos Aires ; la femme qui parle y enseigne un peu pour s’occuper sans doute et son fils y est scolarisé. Usages précisément détaillés de riches contemporains comme il en est ailleurs. Elle s’ennuie et le mari – chirurgien – amasse. Terre et ciel, comme on dit de certains. Des familles en arrière-plan, la sienne, modeste, bercée par Piazzolla, celle de l’époux, abondante, quelque peu invasive, se voulant protectrice comme on sait l’être en Amérique Latine. Un seul enfant, un garçon, le héros-double, reflet présent/absent de l’histoire de sa mère.

Buenos Aires noir, anthologie présentée par Ernesto Mallo

Ecrit par Marc Ossorguine , le Mardi, 06 Juin 2017. , dans Amérique Latine, Les Livres, Critiques, Polars, La Une Livres, Anthologie, Asphalte éditions

Buenos Aires noir, anthologie mai 2016, trad. espagnol Olivier Hamilton, Hélène Serano, 215 pages, 21 € . Ecrivain(s): Ernesto Mallo Edition: Asphalte éditions

 

 

Nouvelle escale des guides noirs des éditions Asphaltes, après Londres, Barcelone, Haïti, La Havane, Marseille… c’est à Buenos Aires que nous sommes invités à faire étape pour en découvrir les coulisses, accompagnés de quelques plumes portègnes parmi des plus expertes et incisives. La vie n’est ni rose ni bleue sur les rives du Río de la Plata, mais cela ne nous surprendra pas vraiment avec ces étranges « guides touristiques » que publie régulièrement Asphalte. Pas encore assez étrange semble-t-il puisque nous avons découvert une librairie qui classe vraiment cette série d’anthologie(s) au rayon des guides touristiques. Pas sûr que cela convainque les candidats au voyage de se rendre à Buenos Aires, du coup, même si Ernesto Mallo nous annonce dès les premiers mots de sa présentation que la capitale argentine est « un endroit tellement invraisemblable ».