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Seuil

Les Éditions du Seuil sont une maison d'édition française créée en 1935.

Maison très respectée dans le milieu de l'édition, entretient de bons rapports avec ses auteurs. Elle a notamment publié les œuvres de Jacques LacanRoland BarthesPhilippe Sollers (première période) ou plus tard Edgar MorinMaurice Genevoix ou Pierre Bourdieu.

Fonds perdus, Thomas Pynchon

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Vendredi, 15 Janvier 2016. , dans Seuil, Les Livres, Critiques, Livres décortiqués, La Une Livres, USA, Roman

Fonds perdus, trad. Nicolas Richard, 441 pages, 24 € . Ecrivain(s): Thomas Pynchon Edition: Seuil

Avec Fonds perdus (Bleeding Edge), « l’auteur reclus », Thomas Pynchon, signe l’un de ses meilleurs livres, un « thriller policier » où se mêlent comme dans ses opus précédents absurde et érudition. Situant son roman dans NYC (New York City) 2001, Pynchon transpose ici les anciens codes du polar dans l’univers des nouvelles technologies. Dans un décor de Web profond se pratique, au travers de l’enquête de l’héroïne Maxine Tarnow, une radiographie des bas-fonds de la vie new-yorkaise. La vie newyorkaise telle qu’elle se déroulait, juste après l’éclatement de la bulle Internet (The Bubble dot-com), juste avant les événements tragiques du 11 septembre 2001 – dans une interzone trouble, troublante. Une problématique sert de fer de lance à l’intrigue : comment se fait-il que la start-up hashslingrz du très louche Gabriel Ice, société de sécurité informatique downtown très active dans l’Alley, n’ait pas bu le bouillon au moment de l’éclatement de la bulle ?

Un « thriller policier » vraiment ? Le genre est plus difficile à fixer. Le nom de la collection aux éditions du Seuil, Fiction & Cie, suffit sans doute et sonne plus juste. Certes le rythme haletant et la visite des bas-fonds très troubles où nous entraîne l’ère dot-com flirtent avec le genre du thriller. De même que l’enquête que nous fait suivre ce roman nous rapproche du genre policier. Mais – et cela ressemble à son auteur – tenter de définir ici avec justesse le genre de Fonds perdus est plus compliqué que cela.

Le règne de barbarie, Abdellatif Laâbi

Ecrit par Patryck Froissart , le Jeudi, 29 Octobre 2015. , dans Seuil, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie, Pays arabes, Maghreb

Le règne de barbarie, 1980 (Préface de Ghislain Ripault), 160 pages, 13 € . Ecrivain(s): Abdellatif Laâbi Edition: Seuil

 

Ce recueil de poèmes est un long cri de souffrance et de révolte. Publié en 1972 alors que son auteur, le poète marocain Abdellatif Laâbi, fondateur de la revue Souffles, dépérissait et pourrissait au secret des cellules de la prison de Kenitra, livré au bon vouloir sadique des tortionnaires de Hassan II, en pleines années de plomb, Le règne de barbarie se lit avec les tripes, avec les poings serrés, avec des saccades de sanglots, durs comme du fer, qui vous montent, ligne après ligne, exploser à la gueule.

Ce recueil de colères est un long hurlement de loup blessé, aux chairs prises dans les crocs de l’arbitraire du traqueur de liberté.

Préfacé par Ghislain Ripault, autre poète, qui en 1972 était coopérant français au Maroc, Le règne de barbarie ne se lit pas, mais se vit, se chevauche, se galope comme la noire monture de l’apocalypse, annonciatrice de la fin des temps des sombres seigneurs et de l’époque des vengeances éclatantes et justes des peuples : « Il est temps de dire pourquoi je dégueule ce monde ».

Un cheval entre dans un bar, David Grossman

Ecrit par Anne Morin , le Mercredi, 07 Octobre 2015. , dans Seuil, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, La rentrée littéraire, Israël

Un cheval entre dans un bar, août 2015, traduit de l’hébreu par Nicolas Weill, 228 pages, 19 € . Ecrivain(s): David Grossman Edition: Seuil

 

Qui n’a jamais vu un humoriste se pencher en bord de scène pour apostropher un ou plusieurs spectateurs qu’il ne « lâchera » plus de tout le spectacle ?

Dans la plus pure tradition du one man show, Dovalé harponne le public de la salle minable où il se produit pour un spectacle dont on apprendra que c’est le dernier : « Je vous offrirai un pot-pourri de mes vingt dernières années de carrière, comme c’était pas écrit dans l’annonce » (p.33).

C’est aussi le jour de son anniversaire. Peu à peu, son numéro de « clown » se délite. Un homme est là, dans la salle, invité par l’humoriste qui a suivi sa trace pendant des années (il a cinquante-sept ans), un ancien camarade de classe perdu de vue et retrouvé dans un camp de jeunesse, puis à nouveau emporté par la vie. Ironie du sort ? C’est un juge que Dovalé a invité là en lui demandant de lui dire, très précisément, comment il se tire de son spectacle, ce que les autres en face, le public et plus particulièrement lui, le juge à la retraite, renvoient de lui et ce qu’il retourne aux autres :

Une disparition inquiétante, Dror Mishani (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 03 Septembre 2015. , dans Seuil, Les Livres, Critiques, Polars, La Une Livres, Roman, Israël

Une disparition inquiétante, trad. de l’hébreu par Laurence Sendrowicz, 336 pages, 21 € . Ecrivain(s): Dror Mishani Edition: Seuil

Avraham Avraham est sans doute le frère littéraire de Meyer Meyer – l’un des héros du 37ème district d’Isola dans les romans d’Ed McBain. Comme lui, il est Juif. Comme lui ses parents ont trouvé drôle de le prénommer en l’affublant de son nom de famille. Comme lui, il est flic, introverti, plutôt timide et discret. Comme lui il admire sa cheffe (Pour Meyer c’était son chef, Steve Carella).

Pourtant, le cadre de ce roman, le talent époustouflant de Mishani, la narration fascinante, nous mènent vite au-delà d’une lecture de divertissement. C’est un grand roman policier, haletant, surprenant jusqu’au bout, qui nous tient incrédules dans ses rebondissements, ses contrepieds, son stupéfiant dénouement.

Tel Aviv. Enfin sa banlieue de Holon. Plutôt triste, ennuyeuse, faite de cités populaires. Le commissariat est à l’image du quartier : pas de quoi faire rêver de carrière pour un flic. Et Avraham Avraham ne rêve pas. Il fait son boulot, avec application, honnêteté, humanité. C’est un bon flic. Mais dans cette enquête, il se trompe. Pas un peu : il se trompe de la première page à la dernière, sans exception ! Ça n’enlève rien à ses qualités, ni à la sympathie qu’il provoque chez les gens, ses collègues. Chez nous, lecteurs. « Un homme compétent est un homme qui se trompe selon les règles » écrivait Paul Valéry (Mauvaises pensées et autres). Avraham Avraham est, à n’en pas douter, un homme compétent.

Les eaux troubles du mojito, Philippe Delerm

Ecrit par Victoire NGuyen , le Mercredi, 19 Août 2015. , dans Seuil, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Nouvelles, La rentrée littéraire

Les eaux troubles du mojito, août 2015, 110 pages, 14,50 € Edition: Seuil

 

Impressions fugaces

La prose de Philippe Delerm relève d’une volonté particulière de s’intéresser à des instants de vie. Dans cet opus d’une poésie manifeste, l’auteur offre à son lecteur un vrai plaisir de lecture. En effet, Les eaux troubles du mojito est un ouvrage qui condense quarante deux récits très brefs à la thématique surprenante et teintée de la couleur de l’été. L’approche de Philippe Delerm est originale à plus d’un titre. D’abord, il valorise les petites choses de la vie quotidienne en objets littéraires. Ainsi, la pastèque se voit le protagoniste d’un récit de deux pages dans lequel ses qualités gustatives et sa couleur « rouge-rose » à « la solide écorce vert profond » sont mises en valeur. Il y a aussi ce petit navet qu’on oublie tant de citer ! L’auteur, quant à lui, s’y intéresse et lui redonne de la noblesse. Ecoutons son chant sur le navet, le mal-aimé :

« Il est toujours le parent pauvre, réduit à quelques unités précieuses et menacées. Couronné de mauve, il avait un petit côté vieillot et rondouillard, idéalement conçu pour l’idée de la soupe. Mais passé à l’épreuve de l’épluche-légumes, il a gagné une blancheur immaculée… »