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Roman

L’empereur à pied, Charif Majdalani

Ecrit par Theo Ananissoh , le Vendredi, 18 Août 2017. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Seuil, La rentrée littéraire

L’empereur à pied, août 2017, 393 pages, 20 € . Ecrivain(s): Charif Majdalani Edition: Seuil


En vérité, l’Histoire – grande ou petite, ancienne ou contemporaine –, ce sont des mots ! Imaginons que l’homme soit dépourvu de toute capacité locutoire et donc de celle de mettre en relation ce qu’il voit, ce qu’il fait, ce qui est – de les « organiser » mentalement ; y aurait-il… Histoire ? On en vient à méditer ainsi à mesure qu’on avance dans le puissant roman que publie en cette rentrée Charif Majdalani. Rassurons : L’empereur à pied est un pur roman, un récit d’aventures même ; des aventures volontiers rocambolesques étalées sur un siècle et demi et étendues sur trois continents. Une épopée familiale, celle des Jbeili. L’ancêtre fondateur, Khanjar, apparaît un jour tel un spectre quelque part dans les montagnes du Liban. Il est accompagné de ses trois fils. Apparition de l’humanité. Apparition double. Khanjar Jbeili et ses fils surgissent de nulle part en même temps que… la parole qui dit ce surgissement. Cette parole qui énonce est elle-même de nulle part ; elle se met d’emblée en scène.

« Mais que viendraient-ils faire et qui sont-ils ? A cette question, même moi (moi qui observe à travers le regard rusé des hommes en séroual debout sur leurs toits, moi qui suis les arbres, et le bas-relief antique représentant un sanglier attaquant Adonis et à ses côtés une Aphrodite éplorée, moi qui suis aussi les calvaires chrétiens avec leurs images frustes de Vierge et de Christ), à cette question même moi je n’ai pas encore la réponse ».

Le Jour d’avant, Sorj Chalandon

Ecrit par Pierrette Epsztein , le Jeudi, 17 Août 2017. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Grasset, La rentrée littéraire

Le Jour d’avant, août 2017, 336 pages, 20,90 € . Ecrivain(s): Sorj Chalandon Edition: Grasset

 

Après quatre jours d’arrêt de la mine, à la reprise de l’activité, le 27 décembre 1974, à 6h30 du matin, un bruit sourd retentit au fond d’une galerie de la fosse 3 dite Saint-Amé du siège 19 du groupe Lens-Liévin à Liévin dans le Pas-de-Calais. C’est un quartier de Six sillons qui a été touché, situé à 50 mètres en aval du niveau -70, dans le secteur de la taille 31. Le carreau de la mine se trouve bientôt envahi par les proches en quête d’informations. Le bilan est très lourd : 42 morts. Une enquête sera ouverte. Les syndicats CGT et FO se porteront partie civile. Assez rapidement, des faits de négligence seront révélés. Le coup de grisou sera confirmé par des experts. La bataille juridique durera jusqu’en 1981 (Extrait emprunté au site de l’INA intitulé Mémoire de mines qui relate la catastrophe). Le dernier roman de Sorj Chalandon, Le Jour d’avant, est dédié à la mémoire de ces Quarante-deux mineurs.

L’auteur s’empare de ce fait divers pour construire une fiction.

Ce n’est pas le premier roman où Sorj Chalandon trouve le chemin d’une histoire singulière pour rendre compte d’un évènement historique.

Les attachants, Rachel Corenblit

Ecrit par Martine L. Petauton , le Jeudi, 17 Août 2017. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, La rentrée littéraire, La Brune (Le Rouergue)

Les attachants, août 2017, 188 pages, 18,50 € . Ecrivain(s): Rachel Corenblit Edition: La Brune (Le Rouergue)

 

 

« Les gens lisent ce genre de récit. Ils sont curieux des histoires qu’ils ne vivent pas et qu’ils parcourent en s’étonnant. Ils disent : les jeunes, de nos jours, ils vivent des choses horribles, des choses qu’ils ne devraient pas connaître. Les gens frissonnent derrière leurs livres… »

 

Que vous dire, madame Corenblit, sinon notre admiration, notre solidarité, affection même, si d’aventure on vous lit en parent, en collègue, en citoyen simplement. Votre livre prend aux tripes ; on en sort tourneboulé, et bien sûr différent. Magnifique écrit politique que votre ouvrage, que vous revendiquez fort justement comme tel : peut-on vivre dans cette société ? Et quelle place pour l’école face à elle ; quelle utilité.

Survivre, Frederika Amalia Finkelstein

Ecrit par Philippe Chauché , le Mercredi, 16 Août 2017. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, La rentrée littéraire, L'Arpenteur (Gallimard)

Survivre, août 2017, 144 pages, 14 € . Ecrivain(s): Frederika Amalia Finkelstein Edition: L'Arpenteur (Gallimard)

 

« Je fais ce cauchemar de façon régulière depuis que j’ai vu la photographie sordide de la fosse du Bataclan. Quand je revois les corps troués, déchiquetés, abandonnés dans des positions humiliantes, quand je revois cette boucherie dans ma mémoire : j’ai la haine. Quand je revois le sang répandu sur le sol, un goût métallique, c’est comme si j’avais ce sang dans ma bouche, c’est comme si leur sang était mon sang, et de nouveau j’ai la haine ».

Survivre est un roman étourdissant, éblouissant, âpre, troublant, saisissant par sa force, sa rage, sa composition, un roman à l’écoute des morts. Ceux du Bataclan hantent ce roman inouï, comme ceux du 11 septembre nourrissaient celui tout aussi exceptionnel de Don DeLillo (1). Ces morts anonymes, puis identifiés, ces ombres transpercées, visages effondrés, ces corps mutilés, cette jeunesse sacrifiée, cette terreur qui s’immisce dans chaque regard, entre chaque page, font trembler Survivre, comme nous avons tremblé la nuit de ce crime contre nature, contre la vie, la pensée et la joie.

Une petite chose sans importance, Chroniques lunaires d’un garçon bizarre, Catherine Fradier

Ecrit par Marc Ossorguine , le Mercredi, 12 Juillet 2017. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Au Diable Vauvert, Jeunesse

Une petite chose sans importance, Chroniques lunaires d’un garçon bizarre, 171 pages, 12 € . Ecrivain(s): Catherine Fradier Edition: Au Diable Vauvert

Il est autiste. De cet autisme que l’on nomme Asperger : celui qui épate les gens ordinaires (et fiers de l’être) qui n’y voient souvent qu’une monstruosité admirablement surprenante pour des scenarii de films ou de séries télé. Il s’appelle Sacha et suit sa mère au cœur du Congo, de la RDC, La République Démocratique du Congo, où celle-ci est médecin dans une organisation humanitaire. Sacha a quatorze ans. Il aime la précision et a compris depuis longtemps que les autres, enfants ou adultes, ne comprenaient rien, eux, à sa manière d’être.

Apprendre à vivre avec Asperger n’est pas le plus difficile. C’est avec les autres qu’il faut apprendre à vivre, et parfois les autres n’y tiennent pas vraiment.

Une chose qu’il connaît très bien, c’est la moquerie, celle que ni l’ignorance ni la peur ne suffise à expliquer. Il connaît bien aussi les décimales de pi, au-delà des cinq cents premières. Pas de meilleurs remèdes contre l’angoisse quand le monde devient trop hostile ou inquiétant que de se les réciter, mais aussi d’inventer une histoire, un conte, Conte de Pi, dont chaque mot compte de nombre de lettres correspondant aux décimales. Car un conte, pour d’autres que lui, c’est plus facile à mémoriser que des chiffres.