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Roman

La Magie dans les villes, Frédéric Fiolof

Ecrit par Marc Ossorguine , le Vendredi, 29 Septembre 2017. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Quidam Editeur

La Magie dans les villes, 105 pages, 12 € . Ecrivain(s): Frédéric Fiolof Edition: Quidam Editeur

 

Voilà un livre aussi magique que son titre. Un livre qui fait du bien et que l’on ne sait pas trop dans quelle catégorie classer. Ce n’est pas grave car de toute façon voilà déjà quelque temps qu’il ne quitte pas ma table de nuit. Ce n’est pas un récit ou roman, même s’il y a un narrateur et des personnages. Ce ne sont pas des nouvelles non plus. Des contes ou des fables ?… Un peu. Mais pas vraiment car il y a bien des continuité d’un texte à l’autre. Ce ne sont pas non plus des poèmes, même si pour certains la tonalité est celle de la poésie ou du merveilleux. Ne cherchons plus. Laissons le souci des catégories et du catalogue au catalogueur et classificateur. Savourons plutôt. Simplement.

Le narrateur nous raconte un homme, ses manies, ses rêves, son quotidien, sa fantaisie. Autour de lui une ville, une femme, une fille, un fils… Mais pas que. Il y a aussi une fée fatiguée. Très fatiguée. Elle est bien gentille, mais si âgée et fatiguée qu’elle n’est plus d’aucune efficacité. Bien sûr, elle a été jeune, mais c’était il y a longtemps. Et puis avec l’âge, elle a gardé des convictions et ne tient pas à faire n’importe quoi. Comme lui est passablement maladroit, toujours un peu à côté d’où on pourrait l’attendre, les choses vont souvent un peu de travers. Parfois insensiblement. Toujours irrésistiblement… Ce qui n’empêche pas une certaine philosophie, un mot qui rime avec ironie comme avec bonhomie.

Zero K., Don DeLillo (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 28 Septembre 2017. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Actes Sud, La rentrée littéraire

Zero K., septembre 2017, trad. américain Francis Kerline, 298 pages, 22,80 € . Ecrivain(s): Don DeLillo Edition: Actes Sud

 

Don DeLillo nous a toujours habitués à ses univers glacés, déshumanisés, saturés de technologie et de machines. Avec Zéro K, le vieil écrivain new-yorkais met une pierre de plus à l’édifice construit par sa vision noire du monde. Et quoi de plus noir que la mort ? La mort, vue par DeLillo, c’est l’assurance d’un roman âpre, terrible, désespérant. Et on n’est pas déçu.

Reprenant le thème connu de la SF du retardement du décès par cryogénisation, ce roman raconte la fin (« provisoire ») de gens qui ont choisi de mourir pour renaître un jour, quand les progrès de la médecine permettront de soigner les maladies mortelles aujourd’hui, de garantir une vie beaucoup plus longue. C’est la décision de Ross Lockhart qui, ne supportant pas la maladie létale de la jeune femme qu’il aime, décide, avec son accord, de la livrer à l’expérimentation.

Le narrateur est le fils unique de Ross. Il a perdu sa mère depuis longtemps. Son père l’a élevé dans le luxe matériel et un grand dénuement affectif et spirituel. Ross est un grand homme d’affaire, qui brasse décisions, pouvoir et argent. Il n’a guère de temps pour les effusions ou les élévations de l’âme.

Sigma, Julia Deck

Ecrit par Jean-Paul Gavard-Perret , le Mercredi, 27 Septembre 2017. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, La rentrée littéraire, Les éditions de Minuit

Sigma, septembre 2017, 240 pages, 17,50 € . Ecrivain(s): Julia Deck Edition: Les éditions de Minuit

 

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Julia Deck n’est pas publiée aux Editions de Minuit par hasard. Elle est la plus que digne héritière de ce qui fut appelé « l’école du regard ». L’auteur n’est pas sans rappeler pour diverses raisons Robbe-Grillet (pour l’humour), Claude Simon (pour les chausse-trappes). Avec Toussaint, Echenoz, Ravey, Courtade, l’auteur de Sigma prouve que la fiction va de l’avant.

La romancière l’a déjà illustrée avec Viviane Elisabeth Fauville et Le Triangle d’hiver. Ici l’histoire est à la fois une science-fiction astucieuse, un roman d’espionnage et une réflexion sur le monde de l’art (galeriste, réalisateur de films, etc.), ses tenants, ses aboutissants, ses escroqueries et coups de poker financiers. L’énigmatique entité « Sigma opération helvétique » devient le juge suprême d’une suite de messages entre son bureau central et ses cinq agents chargés de l’enquête sur les œuvres indésirables.

En roue libre, Lisa Owens

Ecrit par Michel Tagne Foko , le Mercredi, 27 Septembre 2017. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Belfond

En roue libre, trad. de l'anglais par Guillaume-Jean Milan avril 2017, 288 pages, 19,50 € . Ecrivain(s): Lisa Owens Edition: Belfond

 

Le roman est construit sur une architecture littéraire que l’on retrouve le plus souvent dans les œuvres essais. C’est en fait une sorte de petite nouvelle, avec une grande histoire, sous forme de chroniques, qui se lient à un même sens et se déversent minutieusement, chacune son tour.

C’est un roman feel-good, une bouffée d’air frais réjouissante, comme on les aime.

Dès la lecture des premiers paragraphes, on rit tellement. Parfois, c’est très loufoque, mais l’héroïne est tellement enquiquinante et rigolote qu’elle va plaire à coup sûr.

 

Extraits :

« IL Y A UN HOMME DEBOUT devant chez moi, en treillis, avec un énorme badge “FREE PALESTINE“. “C’est vous la propriétaire ?” demande-t-il. Je me tourne pour voir s’il parle à quelqu’un d’autre, mais il n’y a personne derrière moi. Il me faut une bonne seconde pour me souvenir de quel côté je suis, dans le conflit israélo-palestinien ».

L’envers du temps, Wallace Stegner

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Lundi, 25 Septembre 2017. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Gallmeister, La rentrée littéraire

L’envers du temps, septembre 2017, trad. américain Éric Chédaille, 368 pages, 23,20 € . Ecrivain(s): Wallace Stegner Edition: Gallmeister

 

Comme l’indique le titre, L’envers du temps (Recapitulation en américain), de Wallace Stegner, ce roman commence par un voyage à rebours, imprévu, vers Salt Lake City. Les premières pages dressent le portrait d’une ville et de son peuplement et tournent comme « les bobines non montées du film embrouillé de sa vie ». Le tâtonnement de la mémoire autour de lieux jadis familiers provoque un télescopage entre les visions idéalisées et les transformations parfois inutilement coûteuses des bâtiments, les changements survenus – sorte d’embaumement artificiel de la ville. Ainsi, les cadavres en bière ont remplacé la « belle bande de puritains bohèmes » et « la jeune Holly au portrait doré ». Une nostalgie un peu caustique fait dire à l’écrivain que les événements les plus fous, comme les plus banals, se résument en fait après-coup par récapitulation. « Embellissement et rénovation du centre » de Salt Lake City remplacent les magasins vieillots et les activités de la jeunesse du protagoniste, à la façon du thanatopracteur McBride qui rend « pimpants les défunts ».