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Poésie

Dans l’arc d’un regard de caryatide, Carmen Pennarun (par Patrick Devaux)

Ecrit par Patrick Devaux , le Jeudi, 12 Décembre 2019. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres

Dans l’arc d’un regard de caryatide, Carmen Pennarun, éditions L’amuse Loutre, poésie, juillet 2019, 152 pages, 18 €

 

Les textes, les poèmes dégagent, de concert avec les photos personnelles de l’auteur, une sensualité sérieuse captant le geste, l’émotion, le regard. Carmen, dédicaçant son œuvre à Francesca Woodman, rend cette dernière non seulement vivante mais présente : « Plus loin/ la vie/ s’est rêvée Poésie/…/ Sa vérité de parole/ est l’âme jumelle/ de la photo développée/ Sincères dans l’œuvre/ de papier, toutes deux/ se dévoilent pour mieux/ s’effacer/ Elles dépouillent l’âme/ et labourent l’esprit/ de sillons de lumières/ Un marquage/ par flashs terrestres ».

La recherche de spontanéité artistique parcourt ces textes où les mots se font évanescence et sensualité.

« Elle aurait voulu monter son indifférence/ en volutes de ramages sensuels/ et courir et rire habillée de vieilles fripes/ bohémiennes/ Retrouver le sauvage/ d’une nature qui était sienne/ Elle aurait aimé/ prendre en photos les reflets/ autres que son propre visage/ et lire sur l’objectif l’expression/ au-delà de l’absence d’un sourire » : cet extrait se sert d’un conditionnel insistant pour suggérer l’inabouti, une sorte de défaillance positive car elle motive la continuité.

Saule abattu, Philippe Fumery (par Murielle Compère-Demarcy)

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Jeudi, 12 Décembre 2019. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Editions Henry

Saule abattu, Philippe Fumery, 2011, 63 pages, 6 € Edition: Editions Henry

 

Il est des poésies qui invitent le lecteur à prendre le temps de regarder le quotidien qui l’entoure. Apprendre à regarder, avoir envie de regarder, par la médiation du poète, la vie de tous les jours dans son environnement, ses menus faits et gestes simples d’hommes. Le poète Philippe Fumery dans ce Saule abattu offre les blasons d’une telle poésie version 21e siècle (dans tous les cas, créatrice de textes a-temporels), une poésie ciselée de poèmes courts telles des pierres blanches (titre d’un recueil de Pierre Reverdy) jalonnant les chemins de notre existence.

Philippe Fumery nous ouvre par la main d’œuvre de ses mots des fenêtres sur l’instantanéité humble des êtres et des choses, de passage, et qui cependant demeurent dans le grenier de notre temps à vivre et revivre, revisité/réinventé, dans le vent, parmi les décombres, imaginé ou réfléchi « sur l’horizon / à perte de vue » aussi.

Ma muse n’est pas à vendre, Ivan Kouratov (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Lundi, 09 Décembre 2019. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Russie

Ma muse n’est pas à vendre, Ivan Kouratov, éditions Paradigme, octobre 2019, trad. komi, Yves Avril, 176 p. 19,80 €

Poésie authigène

Ma muse n’est pas à vendre est le titre de l’édition bilingue du chantre de la poésie komie, Ivan Kouratov (1834-1875), en-tête qui indique la volonté de probité du poète. Sébastien Cagnoli, dans sa préface, dresse un portrait rapide et concis de l’histoire du peuple komi ou zyriène, et de ses traditions orales et littéraires. Nous apprenons que la poésie est célébrée en tous lieux, voire « en plein centre commercial, le dimanche » (ce qui n’est, hélas, guère le cas en France !).

Yves Avril, le traducteur, nous renseigne sur le poète ainsi que sur la création « d’une langue littéraire (…) des peuples mal connus ou enfouis dans de puissants ensembles plus ou moins assimilateurs ».

Le premier poème commence par une ode au peuple et à la langue komis – un sonnet d’amour et d’espoir. L’eau, la barque présagent sans doute des péripéties terrestres, et le sapin figé profondément dans le sol, de la pérennité ou du destin. La forme octosyllabique revient souvent, mais les rimes sont irrégulières, il ne s’y trouve pas le même nombre de pieds ; certains vers sont élaborés en rimes croisées, qui alternent. Le sens est parfois prédicatif :

Actes d’une recherche, Alain Marc (par Patrick Devaux)

Ecrit par Patrick Devaux , le Lundi, 02 Décembre 2019. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Z4 éditions

Actes d’une recherche, septembre 2019, 296 pages, 14,50 € . Ecrivain(s): Alain Marc Edition: Z4 éditions

 

A bord de son vaisseau « Poésie » depuis 1986, le poète Marc Alain tient son journal de bord à l’instar des grands explorateurs et ce, presque « au jour le jour », critique de lui-même, en éternel observateur de ses sens, usant de références et de citations : « C’est des pages, des blancs successifs qui ponctuent, qui font une rythmique du sens, une tenue de la rupture continuée, de phrase en phrase, parfois inachevée », citant ici l’entretien « Théorie et poésie » d’Henri Meschonnic avec Lucette Finas, avec cette précision : « enfin quelqu’un qui parle du rôle de la page, de la fin de page, dans le rythme ! ».

On aura compris que la progressivité des propos évolue en croissance et talent parallèlement à l’œuvre de l’auteur et ou au temps qui passe. D’une précision inouïe, l’ouvrage s’en réfère à pas moins d’environ 200 notes. Ne s’arrêtant pas à une théorie pure qui serait fastidieuse, l’auteur reprend aussi de son journal périodique son approbation ou non par rapport à lui-même, intitulant le propos de sa recherche « Spatialité ».

Le manuscrit de Tchernobyl, Nunzio d’Annibale (par Murielle Compère-Demarcy)

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Jeudi, 28 Novembre 2019. , dans Poésie, Les Livres, Les Chroniques, La Une CED, Les Vanneaux

Le manuscrit de Tchernobyl, Nunzio d’Annibale, Éditions des Vanneaux, 2019, 133 pages, 18 €

 

Le manuscrit de Tchernobyl est un appel d’air lancé dans le contexte d’une catastrophe nucléaire, dans le vide de la tchatche technologique et de la vacuité du siècle, et s’annonce comme tel au cœur du langage contaminé par une telle situation :

« Je voulè parlé – non pa dan l’izabell langue de mon siècle – mai

dan la seul langue vivante ; je voulè parlé mon tchernobylien –

otremen di, ma propre langue de toul’ monde, à base de koncentré

de ju de françè, assaisoné d’équivoke, contaminé de toute lè langue ».

Son auteur nous invite à faire « enkor un enfor si vou voulé zêtre tchernobymien ! ». Cette invocation n’est ni un caprice ni un canular, il s’agit bien de rendre compte de notre langue « moeurte, la lang kontaminé par tou lè nuage de Tchernobyl é d’ayeur ».