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Critiques

Hérésies glorieuses, Lisa McInerney (par Jean-Jacques Bretou)

Ecrit par Jean-Jacques Bretou , le Lundi, 28 Septembre 2020. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Iles britanniques, Roman, La Table Ronde - La Petite Vermillon

Hérésies glorieuses, Lisa McInerney, mai 2020, trad. Catherine Richard-Mas, 544 pages, 9,80 € Edition: La Table Ronde - La Petite Vermillon

Cork est une ville charmante, la deuxième ville d’Irlande après Dublin. Depuis la guerre des Deux-Roses elle a la réputation d’une ville rebelle, de même que le Comté de Cork a le surnom de Comté rebelle, ce qui fait souvent dire à ses habitants qu’ils habitent la « véritable capitale de l’Irlande ». Il y a des quartiers chics et des quartiers beaucoup moins bien lotis. De toutes façons avec cent jours de brouillard par an en moyenne, les lumières deviennent vite des lueurs et l’architecture on la devine plus qu’on ne la voit, l’imagination fait le reste. Surtout si l’on abuse du Jameson ou de la bière, en avalant une portion de Fish and chips dégoulinante de graisse pour se réchauffer les mains et tenter de se remplir le ventre. Alors, peut-être on peut se retrouver, d’un coup comme dans une épiphanie face au soleil, Cork est aussi l’une des villes les plus ensoleillée d’Irlande, égaré longeant la Lee, puis en continuant atteindre certainement l’endroit où vit Maureen. Maureen dont le cerveau a tant patiné en voyant un blond long et mince pénétrer chez elle qu’elle s’est défendue de cet être avec la « sainte caillasse » jusqu’à ce qu’il tombe à ses pieds, dans son sang. C’est le début d’une histoire qui va secouer Cork tout entière. On ne plaisante pas avec la « sainte caillasse », ça c’est Jimmy le fils qui vous le dit. Jimmy, celui qui doit faire le « ménage » ou plutôt qui le donne à faire à son « ami » Cusack dont le fils Ryan, dealer plein de remords de conscience, est amoureux de la très chic Kelly.

Il nous est arrivé d’être jeunes, François Bott (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Vendredi, 25 Septembre 2020. , dans Critiques, Les Livres, Essais, La Une Livres, La Table Ronde - La Petite Vermillon

Il nous est arrivé d’être jeunes, février 2020, 272 pages, 8,10 € . Ecrivain(s): François Bott Edition: La Table Ronde - La Petite Vermillon

 

François Bott (1935) parle des autres écrivains avec une gourmandise fine, attisant ainsi la (re)lecture des ouvrages et des écritures qu’il présente. Le titre du livre – tout un programme – dessine avec acuité, mélancolie, ces voix (la plupart) éteintes qui ont pu, su le faire vibrer au plus profond. Il parle si bien de la « petite musique » des Sagan et autre Nucéra.

Il nous est arrivé d’être jeunes recense ses coups de cœur : en une, deux pages, il réussit à brosser l’essentiel d’un style, les constantes d’une œuvre. Ses portraits, ciselés, rappellent, ô combien, le critique insigne du Monde des Livres qu’il dirigea un temps. Il n’empêche que jamais les blasons littéraires ne versent dans un lénifiant qui leur ferait perdre éclat et intensité et surtout vérité profonde des œuvres lues. Sachs était infréquentable, Genet guère reconnaissant, Paulhan garde sa stature d’éminence grise de la rue-Bottin, Sartre se voit honoré pour ses portraits nécrologiques d’amis proches.

Art Nouveau, Paul Greveillac (par Stéphane Bret)

Ecrit par Stéphane Bret , le Vendredi, 25 Septembre 2020. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Roman, Gallimard

Art Nouveau, Paul Greveillac, août 2020, 287 pages, 20 € Edition: Gallimard

 

Le vingtième siècle fut source de bien des révolutions en matière artistique ; ainsi du domaine architectural dont Lajos Ligeti, jeune apprenti architecte et personnage principal du roman Art Nouveau de Paul Greveillac. Ce personnage nourrit un projet, fou et démesuré : construire l’Empire austro-hongrois, et en cas de succès, construire l’Europe, le monde entier. Lajos Ligeti déménage de Vienne à Budapest, l’autre centre névralgique de l’Empire multinational. C’est tout d’abord cette volonté de marquer son milieu de son empreinte qui séduit le lecteur : naïve selon les uns, présomptueuse selon les autres, qui conduit Lajos à s’appuyer sur des architectes de référence, déjà consacrés par le spécialiste : il lit ainsi le traité d’Owen Jones sur la thématique de l’ornement, Camillo Sitte, qui opte pour le conservatisme en architecture.

Des architectes du Nouveau Monde trouvent grâce à ses yeux, tel Louis Sullivan, mais ce qui motive la démarche de Lajos Ligeti, c’est le désir, source de toutes les créations et origine primordiale, indispensable préalable à l’élaboration de tout projet :

Le nouveau désordre numérique, Olivier Babeau (par Sylvie Ferrando)

Ecrit par Sylvie Ferrando , le Vendredi, 25 Septembre 2020. , dans Critiques, Les Livres, Essais, La Une Livres, Buchet-Chastel

Le nouveau désordre numérique, Olivier Babeau, septembre 2020, 272 pages, 19 € Edition: Buchet-Chastel

L’essai d’Olivier Babeau analyse les causes et les modalités de l’évolution/révolution numérique internationale, et de ce qu’on appelle couramment la « fracture numérique ».

Un constat s’impose de prime abord dans ce livre très documenté : « Il n’y a pas d’IA pour les pauvres, c’est un business de riches ». Les puissances de calcul requises pour collecter et traiter les « big data » ou développer l’intelligence artificielle sont trop importantes et nécessitent des moyens financiers colossaux. C’est vertigineux, car on passe de la modération si chère aux Grecs anciens à l’excès, du « rien de trop » au « toujours plus » des puissances financières.

Le Nouveau Désordre numérique se place tout d’abord du côté des entreprises, de la production et des GAFAM. Dans les années 1980, c’était les entreprises de production de pétrole qui tenaient le haut du marché mondial ; aujourd’hui, ce sont les GAFAM (acronyme pour Google, Amazon, Facebook, Apple, Microsoft). Les profits colossaux de ces entreprises profitent à quelques élus hypercompétents en informatique, et reposent sur la sous-traitance, mal payée, mal considérée, à laquelle elles font appel :

Sanguinaires, Didier Ben Loulou (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Jeudi, 24 Septembre 2020. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Arts, La Table Ronde, Albums

Sanguinaires, juillet 2020, 96 pages, 24 € . Ecrivain(s): Didier Ben Loulou Edition: La Table Ronde - La Petite Vermillon

 

« Quelles mers résonnent au fond de nous, dans cette nuit d’exister, sur ces plages que nous nous sentons être, et où déferle l’émotion en marées hautes » (Fernando Pessoa, Le Livre de l’intranquillité) (1).

Sanguinaires est l’album d’un photographe de l’intranquillité et du tragique qui rôde. La lumière qui décline porte ce tragique. Le photographe la saisit, la nuit s’annonce, le ciel en témoigne, et la mer en porte les premières traces. Le photographe est là, face au large, c’est une Ode Maritime (2) qu’il offre, à ses pieds un reflet dans une flaque de mer, et le bleu noir profond de la Méditerranée, c’est la première photo de Sanguinaires.

L’histoire se poursuit, un palmier qui se dérobe, une terrasse face à la mer qui se lève, l’écume des vagues comme une lettre adressée au photographe attentif à son précieux regard. Des volets bleus qui s’ouvrent sur un jardin. Là, des pins parasols qui s’élancent telles des vigies. Ici, le regard d’un mouton, et toujours cette incroyable lumière sous tension, où le ciel bleu, gris, noir rejoint l’ocre de la terre, et le vert des arbres.