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Critiques

J’ai exécuté un chien de l’enfer, Rapport sur l’assassinat de Samuel Paty, David di Nota (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Jeudi, 21 Octobre 2021. , dans Critiques, Les Livres, Essais, La Une Livres, Le Cherche-Midi

J’ai exécuté un chien de l’enfer, Rapport sur l’assassinat de Samuel Paty, David di Nota, octobre 2021, 160 pages, 16 € Edition: Le Cherche-Midi

 

En ouverture de son livre, David di Nota cite Hanna Arendt : « Qu’est-il arrivé ? Pourquoi est-ce arrivé ? Comment cela a-t-il pu arriver ? ». D’où vient le crime, la décapitation de Samuel Paty, cet enseignant d’histoire sans histoires, le 16 octobre 2020 à proximité de son collège à Conflans-Sainte-Honorine ? D’où vient le mal ? Et de quel mal s’agit-il ? Quelle est son origine ? Quelles en sont ses racines ? David di Nota répond à ces questions, il répond en écrivain, c’est-à-dire qu’il se pose, et pose les bonnes questions, pour tenter d’apporter les bonnes réponses, quitte à ce que ses réponses dérangent et froissent quelques bonnes âmes.

« Comprendre comment un individu se trouve isolé, et finalement pointé du doigt par l’administration dont il relève, constitue certainement la meilleure introduction à ce phénomène peu étudié : non pas le « vivre ensemble », mais le « mourir seul » (Avant-propos, David di Nota).

Roland furieux, L’Arioste (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Mercredi, 20 Octobre 2021. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Poésie, Points, Italie

Roland furieux, L’Arioste, avril 2021, trad. italien, Michel Orcel, 720 pages (9,50 €), 816 pages (9,90 €) Edition: Points

 

« Ayant lu l’Arioste deux ou trois fois par an depuis l’âge de quinze ans, il s’est placé tout dans ma mémoire sans que je me donne la moindre peine, et pour ainsi dire malgré moi, ses généalogies exceptées, et ses tirades historiques, qui fatiguent l’esprit sans intéresser le cœur ». Ainsi Casanova parle-t-il du Roland furieux (1532, édition définitive par l’auteur) de L’Arioste (1474-1533) à Voltaire, chez qui il est en visite en 1760. Il ajoute, concernant le poète : « je ne peux pas dire que je l’aime plus que les autres ; car je n’aime que lui ». Et de se livrer à une récitation des « trente-six stances dernières du vingt-troisième chant, qui font la description mécanique dont Roland devint fou ». Casanova récite devant une assemblée qui, Voltaire mis à part, ne comprend pas l’italien, et parvient pourtant à émouvoir, par le choix de les réciter « comme si ç’avait été de la prose, les animant du ton, des yeux, et d’une variation de voix nécessaire à l’expression du sentiment ».

La première des stances en question, la voici dans la traduction de Francisque Reynard, datant de 1880, la plus abordable, publiée chez Folio en 2003 :

La Fille de l’optimiste, Eudora Welty (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mardi, 19 Octobre 2021. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, USA, Roman, Cambourakis

La Fille de l’optimiste (The Optimist’s Daughter, 1972) Eudora Welty, trad. américain, Louise Servicen, 178 pages, 20 €

On reconnaîtrait le style d’Eudora Welty entre mille. La linéarité de ses phrases n’est qu’apparente et cache des collisions, des suites improbables, parfois même une logique narrative déroutante, faisant bifurquer des phrases d’un propos à un autre sans prévenir. Ce qui est sûr est que Welty est une Sudiste authentique. On retrouve dans ce roman son goût immodéré pour les scènes de vie archétypiques du monde du Delta, son enracinement dans le territoire et les fleuves, l’extravagance des personnages.

Et en matière d’extravagant(e)s, on peut dire que ce roman en déborde. Le vieux juge McKelva est mort et, autour de l’événement, toute une troupe de gens va s’agiter, s’époumoner, pleurer, rire, dans un vacarme étonnant et burlesque. On a en mémoire les inoubliables funérailles d’Addie Brunden de Faulkner, on peut y ajouter le tonitruante veillée funèbre autour du juge McKelva de Welty. Le cercueil exposé devient l’axe autour duquel vont se présenter des personnages hauts en couleur, sorte de défilé sudiste où l’on retrouve tant d’archétypes de la littérature du pays : le paysan obtus, les bourgeoises créoles, les parvenus infatués, les autorités stupides, etc. Mais la scène, et le roman entier, sont dominés par deux femmes.

La Conspiration de l’ombre, Steve Berry (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Lundi, 18 Octobre 2021. , dans Critiques, Les Livres, Essais, La Une Livres, USA, Le Cherche-Midi

La Conspiration de l’ombre, Steve Berry, juin 2021, trad. anglais (USA) Philippe Szczeciner, 550 pages, 23 € Edition: Le Cherche-Midi

 

Peintre peu doué, Hitler fut également un écrivain en-dessous du médiocre. Les débats autour de l’intérêt ou de la pertinence qu’il y aurait à rééditer Mein Kampf (débats typiquement européens, car l’ouvrage est très largement diffusé dans le monde arabe ou en Turquie) perdent une partie de leur acuité quand on songe que très peu de gens seront capables de lire d’un bout à l’autre cette prose hystérique et nauséeuse. C’est un point de divergence – un de plus – avec Churchill, authentique écrivain (et honoré comme tel), s’ajoutant au fait que le chancelier du Reich ne fumait pas, ne buvait pas d’alcool et ne mangeait pas de viande, tandis que son adversaire ne se privait dans aucun de ces domaines.

Il est pourtant un texte sorti de la plume de Hitler qui luit aujourd’hui encore d’un éclat trouble et maléfique : le dernier qu’il ait écrit, son testament (on en trouvera le texte et une analyse magnifique dans l’ouvrage de Fabrice Bouthillon, Nazisme et révolution, 2011).

L’histoire d’Erika, Ruth Vander Zee, Roberto Innocenti (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Vendredi, 15 Octobre 2021. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, USA, Jeunesse, Histoire

L’histoire d’Erika, Ruth Vander Zee, Roberto Innocenti, éditions D’Eux, septembre 2021, trad. anglais, Christiane Duchesne, 24 pages, 14 €

 

Déportation


Ruth Vander Zee, née près de Chicago, longtemps enseignante puis suppléante, a écrit deux livres à succès, Erika’s Story et Mississipi Morning. Après une première version intitulée L’étoile d’Erika, sortie en 2003, France Leduc et Yves Nadon, des éditions canadiennes D’eux, ont jugé important de publier à nouveau ce grand album jeunesse, avec un tout nouveau graphisme et une nouvelle traduction de Christiane Duchesne. L’histoire est terrible en soi : une femme confie un secret douloureux, ayant été lancée nourrisson hors d’un train en route vers un camp de la mort nazi en 1944, élevée par quelqu’un qui a risqué sa propre vie pour sauver la sienne. L’histoire d’Erika est illustrée par Roberto Innocenti, né près de Florence en 1940, affichiste et graphiste, dont l’œuvre plastique a été couronnée du Prix Hans Christian Andersen en 2008.