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Théâtre

Le Lévrier, Vanessa Montfort

Ecrit par Nathalie de Courson , le Lundi, 12 Mars 2018. , dans Théâtre, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Espagne

Le Lévrier, Actualités Editions, coll. Les Incorrigibles, 2016, trad. espagnol, David Ferré, 126 pages, 11 € . Ecrivain(s): Vanessa Montfort

 

Le Lévrier de Vanessa Montfort est une pièce qui affirme avec un magnifique brio la vitalité du jeune théâtre d’auteur espagnol.

Dans la cuisine d’une maison madrilène encombrée de cartons, cinq personnages s’affrontent autour d’un lévrier abandonné : Elena et Daniel, qui l’ont recueilli pendant quelques mois et qui souhaiteraient le garder sans en avoir les moyens financiers ; Hans et Greta, couple plus aisé venu d’Allemagne pour l’adoption officielle ; et Rita, membre bénévole d’une association de défense des animaux, chargée de superviser l’adoption.

Le lévrier – que l’on entendra sans le voir – est un animal hautement symbolique, un galgo de pure origine espagnole qui témoigne du panache perdu de la vieille nation. En cette période de crise économique où les propriétaires insolvables doivent déménager, les chiens abandonnés pullulent et les lévriers impropres à la chasse subissent de mauvais traitements causant un grand émoi dans l’opinion publique.

Quand on aura le temps, Cédric Bonfils

Ecrit par Marie du Crest , le Vendredi, 02 Mars 2018. , dans Théâtre, Les Livres, Critiques, La Une Livres, L'Harmattan, La rentrée littéraire, Jeunesse

Quand on aura le temps, août 2017, 70 pages, 11 € . Ecrivain(s): Cédric Bonfils Edition: L'Harmattan

 

« C’est du théâtre… »

La première de couverture d’un livre se doit d’être une invitation à la lecture, une « image » du texte, comme un premier songe de lecture. L’illustration qui accompagne la pièce de Cédric Bonfils est au contraire une abomination : comment l’éditeur a-t-il pu publier en l’état ce texte doux et subtil avec une telle couverture ? Certes, l’on retrouve deux personnages adolescents assis dans l’herbe côte à côte, comme dans la scène 5, mais présentés dans d’atroces couleurs : la jeune fille au visage bruni (l’enfant du voyage), vêtue tout en rose et le garçon du village, lui comme par hasard au teint très blanc. Je passerai sous silence les connotations pitoyables de tout ceci. Il faut donc se faire violence pour tourner les pages du livre, aller vers les dédicaces nombreuses (5 dédicataires de l’intimité de l’auteur sont mentionnés) et inscrites dans l’enfance et l’amitié, en prélude au leitmotiv du voyage et à celui du temps nécessaire à la vie, semblable à une route.

De terre de honte et de pardon, David Léon

Ecrit par Marie du Crest , le Mercredi, 14 Février 2018. , dans Théâtre, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie, Espaces 34

De terre de honte et de pardon, 2018, 50 pages, 13 € . Ecrivain(s): David Léon Edition: Espaces 34

 

« La dédicace »

Il y a des textes dont le centre de gravité (on pourrait considérer ce mot dans son sens physique et moral : ce qui a du poids) se situe dans ce que beaucoup pourraient prendre pour un simple détail ; la dédicace, le don absolu du livre à celui qui sera lecteur d’exception et souvent lecteur dans l’absence ou la mort. Le dernier opus de David Léon, édité chez espaces 34, appartient à cette catégorie-là. En effet, tout est scellé dans le « à ma mère » qui précède l’œuvre et que seul le lecteur de théâtre peut saisir ; le spectateur ne possèdera pas cette clef du sens à venir. Je ne l’avais pas approché, quant à moi, lorsque je découvris pour la première fois De terre de honte et de pardon, en lecture musicale au Théâtre Ouvert à Paris, le 27 novembre dernier. La figure maternelle surgira dès la scène capitale, fondatrice (p.11) en victime des coups du père dans la maison, une nuit. Scène surprise, ravie et racontée par l’enfant, par David. Elle apparaît donc à la fois en personnage et en incarnation possible de la « mère dédicace ». Elle devient « mère » sans que sa désignation ne soit précédée d’une détermination affective et possessive mais grandie par cette expression un peu surannée.

Vertiges suivi de l’adaptation scénique de Christine Dormoy, Patrick Kermann

Ecrit par Marie du Crest , le Mercredi, 24 Janvier 2018. , dans Théâtre, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Espaces 34

Vertiges suivi de l’adaptation scénique de Christine Dormoy, Patrick Kermann, novembre 2017, 126 pages, 17 € Edition: Espaces 34

 

« Paroles et musique »

Il est impossible de lire Vertiges sans se dire que c’est la fin, l’entrée dans le sommeil. S’endormir comme dernier verbe. L’édition du texte elle-même nous invite à saisir le livre dans les derniers moments de l’écriture comme les dernières heures de la vie puisqu’elle mentionne en sous-texte, avec la pudeur du chagrin : février 2000.

Le 29 février 2000 sera le dernier jour de Patrick Kermann. C’est peut-être cela le plus grand vertige, cette forme de malaise face au vide, cet étourdissement du monde qui tourne, qui chavire. Vertiges au pluriel proférés par les voix multiples des burlesques « monomaniaques », d’écervelés selon le propos de l’auteur qui au fond passent leur temps à radoter et celles du quatuor vocal impuissant à remettre par le langage de l’ordre au monde. Dans Vertiges, P. Kermann dit l’explosion humaine semblable à celle des réacteurs de Tchernobyl qui ont tout anéanti. Il a beaucoup pensé à cette catastrophe nucléaire en lisant la Supplication de Svetlana Alexievitch, au moment où il écrivait son texte.

Nos débuts dans la vie, Patrick Modiano

Ecrit par Philippe Leuckx , le Mardi, 09 Janvier 2018. , dans Théâtre, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Gallimard

Nos débuts dans la vie, octobre 2017, 96 pages, 12 € . Ecrivain(s): Patrick Modiano Edition: Gallimard

 

Première pièce du romancier français, nobélisé, Nos débuts dans la vie, qu’une date traverse – 19 septembre 1966 –, propose une théâtralisation d’éléments biographiques exposés dans Un pedigree (Gallimard, 2005). La pièce raconte les démêlés de Jean avec sa mère Elvire, comédienne de boulevard, et le compagnon de celle-ci, Caveux. Le quatrième personnage, Dominique, est une jeune comédienne qui répète du Tchékhov. Il ne faut pas être grand clerc pour lire les clés que fournit le livre autobiographique de 2005 : Elvire est la transposition de la mère du romancier, Louisa Colpeyn (née Colpijn), actrice de seconde zone, qui a surtout fait des tournées de théâtre dans les casinos des villes où l’on expédiait en pension forcée le futur écrivain, fugueur impénitent. Caveux, écrivain qui bride Jean, se moque de son travail d’écriture et ne fait pas une phrase sans citer les mérites de Sartre, c’est le bouillant Jean Cau, compagnon de la comédienne.