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Articles taggés avec: Ayres Didier

Marigold et Rose, Un récit, Louise Glück (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 09 Décembre 2024. , dans La Une CED, Les Chroniques, Les Livres

Marigold et Rose, Un récit, Louise Glück, Gallimard, novembre 2024, trad. anglais (États-Unis), Marie Olivier, 76 pages, 12 €

 

Partage

J’ai bu à petites gorgées le récit de Louise Glück que publient les éditions Gallimard, et je me suis enivré de cette histoire d’enfance où l’écrivaine américaine distille l’ironie, laquelle ouvre des portes vers le monde de l’intellection, permettant de réfléchir à la question de l’identité féminine, et cela avec une dose d’humour parfois. Nonobstant, le thème principal est celui du partage, de la description d’une vie clivée, d’une schize.

Et a priori la gémellité des sœurs aide grandement ce dédoublement de la parole infantile – qui n’est pas du tout ici un babil, mais une langue savante et très chantante. L’on y voit bien sûr en creux la personne de la poétesse dans son identité partagée entre son père et sa mère, et surtout mettant en lumière le lien charnel avec sa sœur Rose, l’une des jumelles.

Blancs-seings, Silvia Majerska (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 02 Décembre 2024. , dans La Une CED, Les Chroniques, Les Livres, Poésie

Blancs-seings, Silvia Majerska, Gallimard, octobre 2024, 68 pages, 12,90 €

 

Fleurs imaginaires

Ce petit livre, en volume, de Silvia Majerska, détient un pouvoir expressif qui en passe notamment par la nomination de certaines fleurs, arbres, une flore sans considération de noblesse, grâce aux titres en latin de chaque poème, même si ce latin-là est élégant, raffiné, beau à lire. De cela, l’on peut conclure que cette référence au latin appuie le penchant de l’écrivaine vers une expression directe et sans ombre, une essence. Sa langue s’appuie sur ces mots latins comme pour se tenir serrée sur la haute marche du langage. Que cela soit la rose (rosa), le souci (bellis) ou encore le trèfle (trifolium), l’imaginaire de la planche botanique fonctionne comme elle le fait durant l’enfance, émerveillement et mystère des cartes et autres tableaux.

VITIS

Vies héroïques, Daniel Kay (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 25 Novembre 2024. , dans La Une CED, Les Chroniques, Les Livres

Vies héroïques, Daniel Kay, Gallimard, septembre 2024, 114 pages, 15,50 €

 

S’approcher

Le dernier livre de Daniel Kay consiste en un art du portrait – portraits, je pense, plus proches d’Arcimboldo que de Bonnat –, soutenu par une étrangeté et parfois du comique. Je veux dire qu’il y a une invention propre. L’on ne reste jamais sur le même registre et l’on suit avec intérêt l’évolution de l’auteur à travers sentences et anecdotes. L’on y trouve peut-être un peu de Borges, du Roberto Bolaño, des Caractères de La Bruyère, en tout cas une facétie intelligente et instructive. Quoi qu’il en soit, le livre domestique l’étrange, le saisit, le capture, l’aliène.

Cette littérature est une domestication, une appropriation, qui rend proches des êtres réels ou de fantaisie, imposant souvent une vision du monde ; dans la proximité des êtres, avec une certaine tendresse parfois. Du reste, cette écriture se réclame sans doute mieux de la fiction, d’un arrière-monde fictionnel, que d’un naturalisme, il me semble.

Une position pour dormir, François Heusbourg (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 18 Novembre 2024. , dans La Une CED, Les Chroniques, Les Livres, Poésie

Une position pour dormir, François Heusbourg, Gallimard, octobre 2024, 106 pages, 16 €

 

Flottement

Le maître mot de ce recueil de François Heusbourg : le flottement. Je dis flottement non pas pour souligner une indécision ou une incertitude mais pour caractériser une écriture issue d’une hésitation presque involontaire, qui se cherche, tremble sur la réalité qu’elle est censée désigner. Donc, un dédoublement mieux qu’une indétermination.

 

à force de vouloir être au monde

on s’en éloigne

notre monde s’éloigne du monde

on cherche des solitudes

Ainsi parlait Mihai Eminescu, Dits et maximes de vie, choisis et trad. roumain, Nicolas Cavaillès (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Mardi, 12 Novembre 2024. , dans La Une CED, Les Chroniques, Anthologie, Les Livres

Ainsi parlait Mihai Eminescu, éditions Arfuyen, septembre 2024, Dits et Maximes de vie, trad. roumain, Nicolas Cavaillès, 174 pages, 14 €

 

Langage

Je ne crois pas que l’on puisse cataloguer la poésie de Mihai Eminescu de poésie purement lyrique, même si elle est hantée par une musique personnelle, un style, un bruissement intérieur, sorte de musique vocale dénuée de pathos, orientée décidément vers une intellection (intellection qui ne bannit pas l’émotion). Je dirais même que cette réunion de textes de l’auteur de langue roumaine pourrait se tenir entière sous un néologisme : une philo-poésie. Car ses poèmes apprennent à penser. Une esthétique qui n’a pas peur de la réflexion, une esthétique qui pense, qui se pense comme une esthétique.

Nous sommes d’ailleurs à dire vrai, davantage dans l’art que dans la littérature (ce que je préfère). Il me semble que celui-là est plus fort que celle-ci. De ce fait, il faut tout sacrifier ici à l’art, penser, écouter, étudier, approfondir, comprendre où se loge le génie.