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Articles taggés avec: Ayres Didier

Labyrinthes, Christopher Okigbo (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 07 Avril 2025. , dans La Une CED, Les Chroniques, Afrique, Les Livres, Poésie

Labyrinthes, Christopher Okigbo, Poésie/Gallimard, mars 2025, 224 pages, 10,30 €

 

Vortex

Pure découverte que ce recueil du poète nigérian, Christopher Okigbo. Non pas que pour la couleur locale, les noms toponymiques, ceux des animaux, les descriptions des paysages d’Afrique. Cela ne s’arrête pas là, mais cherche l’union de cultures totémiques et de la poésie occidentale (dans sa version initiale en anglais, ici dans une édition bilingue). Et surtout, le vortex des mots, des images, de l’angoisse, de la mort et de l’espoir politique.

Écrire c’est ouvrir la Boîte de Pandore des inquiétudes nouvelles et qui n’ont jamais été dites. Parole de la mort qui est à la fois essence et unique moment sans nomination. Et au fond de cette boîte gît le pauvre langage humain.

Les Cinquantièmes hurlants, Tom Buron (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Mardi, 01 Avril 2025. , dans La Une CED, Les Chroniques, Les Livres, Poésie

Les Cinquantièmes hurlants, Tom Buron, Gallimard, février 2025, 80 pages, 17 €

 

Géographie du monde

Géographie du monde fut le titre de mon mémoire de troisième cycle sur Le Soulier de satin de Paul Claudel. Je dis cela à dessein, car j’ai retrouvé cette émulation des mers, des voyages et des désirs sacrés, ici, dans ce recueil que Tom Buron publie chez Gallimard. J’y ai été confronté à une sorte de dérive des continents, d’un glissement du poétique. Donc, à la fois une hospitalité et à une inhospitalité des régions australes. Quelque chose d’une matière sacrée que Claudel illustre avec la présence de la Croix du Sud. Donc, un mouvement habité, un récit fusionnel.

Sommes-nous dans la quête de Pequod de Tom Buron ? Et cela fait, quel voyage au milieu des mots et des embruns ? Sommes-nous plus dans L’Odyssée que dans Moby Dick ? Dans le transport vidéographique d’Ocean Wuong ? Oui, nous demeurons en poésie.

Paroles du silence, Jeanne Tsatsos (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 24 Mars 2025. , dans La Une CED, Les Chroniques, Les Livres, Poésie

Paroles du silence, Jeanne Tsatsos, Éditeur Le Bois d’Orion, août 2024, trad. grec moderne, Bernard Grasset, édition bilingue, 220 pages, 19 €

 

Parole de lumière

Ce qui est très perceptible de suite, dans la poésie de Jeanne Tsatsos, c’est la qualité religieuse de cette traduction du grec moderne de Bernard Grasset. Au long des pages, l’on perçoit nettement l’engagement religieux de la poétesse. Et ce qui est littéraire ici, c’est la capacité de l’écrivaine à subsumer la question de la foi et des vertus théologales, en une croyance forte, ou plus généralement au sein de l’être dans l’Être. Oui, une épiphanie.

 

Étoile, Toi qui viens

à ma rencontre,

montre-moi la voie.

Et pourtant, Pierre Dhainaut (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Mardi, 18 Mars 2025. , dans La Une CED, Les Chroniques, Les Livres, Arfuyen

Et pourtant, Pierre Dhainaut, Arfuyen, janvier 2025, 140 pages, 15 €

 

Cercle du temps

Le dernier recueil de poésie de Pierre Dhainaut mène à un travail de réflexion, de question ouverte, d’interrogations sur le chant (et sur le champ) du poème. C’est ainsi que le temps devient une délibération primordiale. Quel est donc le sens de la durée, est-elle linéaire ? Procède-t-elle par cycle ? Existe-t-il un éternel retour, où aboutit-il ? Devons-nous faire confiance à la théorie de la relativité ? Et en fin de compte pourquoi vivre ou survivre ?

Peut-être la métaphore de la neige (métaphore filée dans l’ensemble du texte) nous découvre-t-elle un secret, le sens d’un mystère. Car la neige est sujette, comme la vie, à la brièveté, au silence, à l’extraordinaire diversité de la composition de chaque flocon, jamais le même. Chaque instant donc ne ressemble qu’à lui-même. Et cette effloraison de cristaux aqueux ressemble bien à la condition précaire de nos existences.

Dans la forêt qui manque, Shiho Kasahara (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 10 Mars 2025. , dans La Une CED, Les Chroniques, Les Livres

Dans la forêt qui manque, Shiho Kasahara, éditions Quartett, Coll. Théâtre, octobre 2024, 95 pages, 14 €

 

Passage

Tout est passage dans cette pièce de Shiho Kasahara. L’on passe de Tokyo à Paris, l’on voyage d’un aéroport à un autre, d’un avion à l’autre. On va et vient. On ne reste pas immobile, et c’est peut-être là une question de dramaturgie. On se meut d’un univers culturel à l’autre. On suit les développements de l’histoire de la pièce comme témoignage d’une quête d’identité. On sent l’auteure vraiment partagée entre deux cultures. Un mélange instable et qui n’en finit pas de ne pas être une émulsion.

D’un côté le Japon, terres du père, et de l’autre, la France, forêt de la mère. Aucun des deux parents n’a le dessus, les deux sont énigme et interrogation, comme deux forêts qui ne se ressemblent pas, ici des châtaigniers, là des banzaï. C’est un univers biparti, double et cependant absolument mêlé en lui par des langues étrangères l’une à l’autre. L’héroïne cherche la suture, un brassage, des rapprochements dans l’univers familial composé de deux présences culturellement teintées.