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Rivages poche

Cicéron, Stefan Zweig (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Jeudi, 10 Septembre 2020. , dans Rivages poche, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Biographie

Cicéron, juin 2020, trad. allemand Michel Magniez 96 pages, 7 € . Ecrivain(s): Stefan Zweig Edition: Rivages poche

Pour avoir commenté, ici même, Le Bouquiniste Mendel, et découvert Paul Verlaine, Hommes et destins, Légende d’une vie, Le Voyage dans le passé, Lettre d’une inconnue, je ne suis pas surpris du travail biographique entrepris par l’écrivain autrichien pour proposer sa défense et illustration de Cicéron. On lit cette nouvelle historique sans en lâcher une page tant la vivacité de la plume de l’auteur et les remous nombreux d’une vie attisent notre lecture.

Nous voilà plongés dans l’univers infernal des compétitions romaines entre chefs imbus de leurs droits et puissance, intérêts partisans et volonté, dans le chef d’un être complexe comme Cicéron, de laisser à la république ses valeurs et d’éviter le pire.

L’histoire nous a appris comment César, Auguste, Marc Antoine ont pu se hisser aux premières places et laisser dans l’ombre sans doute les meilleurs, Cicéron en est. Bourré de talents divers, orateur insigne, homme politique engagé, Marcus Tullius Cicéron sera souvent la victime toute désignée des changements de la politique romaine : plusieurs fois exilé, il consacre alors le meilleur de son temps aux livres, à l’écriture. Quitter Rome, la bruyante, pour un havre (Tusculum en Latium) où un esclave est toujours près de prendre sous la dictée le fruit de ses réflexions philosophiques, politiques, morales.

Hymne à l’amitié, Friedrich Nietzsche (par Marie-Pierre Fiorentino)

Ecrit par Marie-Pierre Fiorentino , le Lundi, 24 Février 2020. , dans Rivages poche, Les Livres, Critiques, Essais, La Une Livres, Anthologie

Hymne à l’amitié, Friedrich Nietzsche, traduction de Nicolas Waquet, 125 pages, 8,50 euros. Edition: Rivages poche

 

« L’un va trouver son prochain parce qu’il se cherche,

l’autre parce qu’il voudrait se perdre.

Votre mauvais amour de vous-même

fait de votre solitude une prison. »

Nietzsche

 

 

Cette anthologie ne passionnera guère les connaisseurs de Nietzsche. Les raisons tentant de la justifier, exposées dans la préface, ne les convaincront qu’à demi.

Pourtant, en balisant un parcours autour d’une notion, l’amitié, cette publication offre aux néophytes l’opportunité de découvrir quelques constantes de l’œuvre sans avoir à surmonter l’obstacle du labyrinthe toujours fascinant mais souvent déconcertant des livres dont sont extraits les textes choisis et rassemblés ici.

Du fond de l’abîme, Walter de la Mare (par François Baillon)

Ecrit par François Baillon , le Mercredi, 16 Octobre 2019. , dans Rivages poche, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Iles britanniques, Roman

Du fond de l’abîme, Walter de la Mare, trad. anglais, Dominique Bertrand, Marianne Tomi, 264 pages, 9,15 € Edition: Rivages poche

 

Walter de la Mare, mort en 1956, immense de talent, est injustement méconnu en France. Or, les œuvres de cet écrivain devraient, ou auraient dû s’avérer incontournables. Parce que Walter de la Mare a un style – outre le fait qu’il en ait un propre lui appartenant – travaillé au cordeau et non moins muni de grande fluidité (en cela, il faut saluer les traductions françaises dont nous disposons). Parce que ses nouvelles, précisément dans ce recueil Du fond de l’abîme, se révèlent chaque fois des rêves prégnants, puissants, ahurissants, qui nous font prendre part largement à la vie intérieure des protagonistes, dont les inquiétudes se manifestent souvent par l’effet d’hallucinations dangereusement merveilleuses, aux effets de claire-voie qui ne sont pas sans rappeler les meilleures atmosphères rendues par Rembrandt ou, si le jour est plus présent, par Friedrich (entre autres exemples). A tel point que, sans user d’événements nécessairement riches en rebondissements, le nouvelliste fait naître des ambiances (liées à de profonds questionnements) qui semblent imprimées en nous pour longtemps.

Sucre noir, Miguel Bonnefoy (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Mardi, 09 Juillet 2019. , dans Rivages poche, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman

Sucre noir, avril 2019, 192 pages, 7,50 € . Ecrivain(s): Miguel Bonnefoy Edition: Rivages poche

 

Mâtiné d’exotisme, d’âpreté et de plongée sociale, le roman du très jeune romancier français, aujourd’hui en résidence d’écriture à la Villa Médicis sur le Pincio romain, éblouit par son sens de la narration, son écriture très soignée et des personnages hauts en couleurs qui donnent chair à l’histoire.

En pays caribéen, la quête d’un trésor, perdu trois siècles plus tôt, celui abandonné par Henry Morgan, anime soudain la vie de Severo Bracamonte et de ses proches.

Dans un village, où étonnamment une vieille dame vient faire office chaque année en poussant une porte qu’elle ouvre et ferme seule, Severo, Serena Otero, sa femme, leur « fille » Eva Fuego fouillent les alentours pour découvrir ce « trésor » tant vanté.

La plantation des Bracamonte fournit le meilleur rhum de la région et elle s’épanouit au fil des années.

Eloge du risque, Anne Dufourmantelle (par Sophie Galabru)

Ecrit par Sophie Galabru , le Jeudi, 06 Juin 2019. , dans Rivages poche, Les Livres, Critiques, Essais, La Une Livres

Eloge du risque, 320 pages, 9 € . Ecrivain(s): Anne Dufourmantelle Edition: Rivages poche

 

Au risque de la responsabilité

Eloge du risque est un appel au lecteur à s’engager envers l’Autre – l’inconnu, l’étranger, l’irréfléchi, l’évènement, autrui. Anne Dufourmantelle mesure parfaitement cet appel à l’incommensurable lorsqu’elle commence par écrire : « La vie est un risque inconsidéré pris par nous, les vivants » (p.1). La grande inversion de l’ouvrage est d’affirmer que ce n’est pas l’individu qui risque sa vie, lorsqu’il s’élance vers l’inconnu, mais bien plutôt la vie qui se risque à nouveau en l’individu – n’était-ce pas le cas dans l’évènement de la naissance ? – et lui offre un renouvellement inégalé de ses forces. Et si la vie s’est risquée en nous, alors être vraiment vivant ne consiste pas à perpétuer la vie au sens d’une conservation, mais à la perpétuer en renouvelant ce risque d’être. En lisant Anne Dufourmantelle, nous nous posons une question fragile et essentielle : pourquoi faudrait-il conserver sa vie et au nom de quoi ?