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Récits

Un cœur pur, Sur les traces de Tintin au Népal, Maxime Dalle (par Patrick Abraham)

Ecrit par Patrick Abraham , le Vendredi, 04 Avril 2025. , dans Récits, Les Livres, Critiques, La Une Livres

Un cœur pur, Sur les traces de Tintin au Népal, Maxime Dalle, éditions Herodios, février 2025, 175 pages, 22 €

 

Un cœur pur, Sur les traces de Tintin au Népal, de Maxime Dalle, n’est pas un banal récit de voyage de plus, avec les conventions obligées du genre, mais bien davantage : l’histoire, de l’enfance à la trentaine, d’une construction de soi (amicale, intellectuelle et spirituelle). Aussi, lorsque la relation d’un trek de Katmandou à Gosainkunda commence, au chapitre XIII (p.97), on a compris que si les lieux évoqués se repèrent sur une carte, si on peut suivre les trois amis randonneurs (le narrateur et ses complices, Archibald et Shylock) d’étape en étape, leur périple, quoique physique, est tout autant intérieur et participe non de la prouesse sportive (la stupide injonction moderne à « se dépasser » !) mais de la quête. Car pourquoi aller si loin et se confronter à la dure épreuve qu’est une marche en très haute montagne si ce n’est pas pour se donner rendez-vous ?

Paris, je t’aime !, Colette (par François Baillon)

Ecrit par François Baillon , le Lundi, 10 Mars 2025. , dans Récits, Les Livres, Critiques, La Une Livres

Paris, je t’aime !, Colette, Éditions de L’Herne, 2023, 160 pages, 14 € . Ecrivain(s): Colette

 

Ce recueil de textes de Colette, parfois inédits, se découpe en deux sections : Paris, je t’aime !, et J’aime être gourmande, qui ont fait l’objet d’éditions séparées auparavant. Réunis par Gérard Bonal (décédé en 2022) et Frédéric Maget, il reprend parfois des articles où la célèbre écrivaine s’adressait aux lectrices de Marie-Claire. Et il est à noter que, même dans ce type d’exercice – que l’on pourrait considérer de second ordre –, on retrouve dès les premières lignes la signature inimitable du ton et du style de Colette.

En vérité, bien des thèmes chers à son œuvre se rassemblent dans ce recueil : la présence magnétique des animaux, avec « La “Chatte”, celle qui n’a pas voulu d’autre nom », dont elle fait un personnage à part entière, si ce n’est un Sphinx, compagne à la fois calme et déterminée, hautement mystérieuse, sans que l’auteure ne se départisse de l’émotion éprouvée lors de leur rencontre, très singulière, ou lorsqu’elle porte attention à son étrange langueur, à l’approche d’une ultime étape…

Ma grand-mère et le Pays de la poésie, Minh Tran Huy (par Stéphane Bret)

Ecrit par Stéphane Bret , le Vendredi, 21 Février 2025. , dans Récits, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Flammarion

Ma grand-mère et le Pays de la poésie, Minh Tran Huy, éd. Flammarion, janvier 2025, 176 pages, 19,50 € Edition: Flammarion

L’importance du lien avec les ancêtres, le rôle des liens familiaux sont un élément essentiel de la culture vietnamienne, marquée par le bouddhisme et le confucianisme. Mais qu’en est-il lorsque de nombreux ressortissants de ce pays ont été contraints, il y a maintenant plus de cinquante ans, de fuir leur pays natal après la prise du pouvoir par les communistes de Saigon, en 1975. C’est ce que raconte Minh Tran Huy, écrivaine déjà consacrée par plusieurs Prix littéraires et autrice de neuf livres.

Le récit de Minh Tran Huy est un hommage à sa grand-mère, surnommée très affectueusement Bà, vocable utilisé dans la langue vietnamienne et se référant à la situation générationnelle d’une personne par rapport à une autre. Minh Tran Huy prend soin de tout évoquer : la vie de Bà, au Vietnam, au moment de la première guerre d’Indochine, celle menée contre les troupes du corps expéditionnaire français ; elle y décrit l’attente du retour de l’époux et du beau-père de Bà : las, ils ont été pris tous deux dans un guet-apens à l’occasion d’un simulacre de réunion, et exécutés dans la jungle parce que jugés collaborateurs en raison de leur origine bourgeoise et de leur absence d’appartenance au parti communiste vietnamien.

L’Oiseau rouge, Mémoires d’une femme Dakota, Zitkàla-Sà (par Patryck Froissart)

Ecrit par Patryck Froissart , le Vendredi, 14 Février 2025. , dans Récits, Les Livres, Recensions, La Une Livres

L’Oiseau rouge, Mémoires d’une femme Dakota, Zitkàla-Sà, Editions Les Prouesses, octobre 2024, trad. anglais (USA), Marie Chuvin, 128 pages, 18 €

L’autrice, une autochtone dakota née en 1876 dans une réserve sioux, met en écriture des épisodes déterminants et des anecdotes cruciales de sa vie dans ce livre qui réunit quatre récits écrits et publiés initialement séparément dans une revue américaine de gauche entre 1900 et 1902, et qui reconstitue, de façon cohérente, chronologique, un itinéraire existentiel porteur d’une évolution culturelle, psychologique et suprêmement politique.

Empreintes d’une enfance indienne :

Jusqu’à l’âge de huit ans, la narratrice vit, court, évolue en quasi totale liberté dans l’espace déjà clos mais encore relativement vaste d’une réserve indienne. L’évocation est bucolique, poétique, expression d’une existence sereine, heureuse, marquée, dans le wigwam, par la présence d’une mère aimante et aimée, et, dans le quotidien, par les rituels traditionnels, par l’apprentissage de la confection des mocassins et des travaux de perles et d’aiguilles, sous la protection du Grand Esprit, dans un environnement naturel habité et animé par le souvenir des ancêtres et par les âmes des héros tombés sous les balles des envahisseurs blancs.

Et nous danserons encore, Sébastien Spitzer (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Lundi, 10 Février 2025. , dans Récits, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Histoire

Et nous danserons encore, Sébastien Spitzer, Albin-Michel, septembre 2024, 250 pages, 19,90 €

Il existe une « littérature des camps » suffisamment abondante et de qualité pour remplir un volume de la Pléiade, et on aurait pu en confectionner plusieurs. Il existe une littérature du 11-Septembre (rarement une date se sera gravée aussi vite dans la mémoire collective), avec des ouvrages tels que 11 Septembre, Une histoire orale (Garrett M. Graff), et Le Jour où les anges ont pleuré (Mitchell Zuckoff), malgré la difficulté à se représenter un événement pareil. Il y aura, on peut en être sûr, une littérature du 7 octobre 2023 (même si la télévision a pris une longueur d’avance), faite de témoignages et de fictions. Et nous danserons encore appartient à la première catégorie. Sébastien Spitzer s’est rendu en Israël pour rencontrer des survivants du massacre, des familles d’otages et, dans de trop rares cas, des otages ayant été libérés par le Hamas après son pogrom (« un mot que la langue russe a offert au reste du monde. Un don, si l’on veut, à l’encyclopédie universelle de l’infamie », ainsi que l’écrit si bien Camille de Toledano) perpétré avec la plus froide détermination. De retour en France, Spitzer assista aux lendemains du massacre, avec la récupération cynique de La France Insoumise, la vésanie des étudiants de Sciences-Po, l’émergence de Rima Hassan, tout un monde peu nombreux, mais très présent dans les médias et embarqué dans une sarabande écœurante.