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La Une Livres

Alfred Jarry, L’Expérimentation du singulier, Karl Pollin

Ecrit par Matthieu Gosztola , le Samedi, 17 Juin 2017. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Essais, USA

Alfred Jarry, L’Expérimentation du singulier, éd. Rodopi, coll. Faux Titre, 2013, 285 pages . Ecrivain(s): Karl Pollin

 

Ces trente dernières années, les plus intéressants livres consacrés à Jarry, tel le passionnant et érudit Alfred Jarry, le colin-maillard cérébral de Julien Schuh (Honoré Champion, collection Romantisme et modernités, 2014), ont replacé, dans la lignée des travaux d’Henri Béhar (Les Cultures de Jarry, Presses Universitaires de France, 1988) ou de Patrick Besnier (Alfred Jarry, Plon, collection Biographique, 1990 et Alfred Jarry, Fayard, 2005), l’auteur de Messaline « dans le contexte de son époque, parmi ses pairs en littérature », et, ce faisant, ont mis « en évidence un état d’esprit, une forme de pensée, un courant culturel dans lequel écrivains, artistes, philosophes et scientifiques de l’époque de Jarry se retrouvent ».

Cet état d’esprit fut propre à la fin-de-siècle. Analysant l’œuvre de Jarry, l’on remarque ainsi combien celui-ci « résume l’esprit de toute une époque, et mieux encore, de toute une famille d’esprits qu’on peut reconnaître par comparaison réciproque […] : un certain état de révolte où l’intelligence s’allie au tonique bouleversement de tous les conformismes ».

La Tragédie de l’Âne suivi de Les Farces Philosophiques, Catherine Gil Alcala

Ecrit par Marie du Crest , le Samedi, 17 Juin 2017. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Théâtre

La Tragédie de l’Âne suivi de Les Farces Philosophiques, éd. La Maison brûlée, 2016, 180 pages, 16 € . Ecrivain(s): Catherine Gil Alcala

 

Les hommes et les bêtes

Il faudrait sans aucun doute revenir sur la figure de l’âne, qui traverse l’histoire des hommes et celle des histoires qu’ils inventent. Empreintes mythologiques des métamorphoses : le roi Midas puni et ridiculisé, Lucius transformé malgré lui en âne ou bien sortilèges de nos contes de fées qui font d’une belle princesse une souillon revêtue d’une peau de l’animal. De tout cela se souvient Catherine Gil Alcala dans sa pièce de théâtre La Tragédie de l’Âne. Son texte traverse à la fois le monde des bêtes et celui des hommes ; ses personnages sont : roi aux oreilles d’âne décollées, reine des oiseaux, femme de l’épervier, aigle, épervier, corbeau, alouette, serpent mais aussi servantes, gardes, devin, vieille femme ou amant et homme hors jeu et enfant meurtrier. Et tous sont sur le devant de la scène tragique intemporelle, née de la Grèce. A la différence d’autres textes (ceux du théâtre/poésie), Catherine Gil Alcala retrouve une forme dramatique « classique » fondée sur trois actes découpés en scènes. C’est le destin, le fatum qui tisse les lignes de forces. Dès la scène 1 de l’acte 1, la reine des oiseaux que le roi a répudiée annonce la catastrophe à venir (p.12).

Billie Morgan, Joolz Denby

Ecrit par Jean-Jacques Bretou , le Vendredi, 16 Juin 2017. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Iles britanniques, Roman, Les éditions du Rocher

Billie Morgan, avril 2017, trad. Thomas Bauduret, 391 pages, 21,90 € . Ecrivain(s): Joolz Denby Edition: Les éditions du Rocher

 

 

« Ce récit constitue mes mémoires ; la vérité, telle qu’elle existe dans mon souvenir ». Par cette simple phrase placée en épigraphe, Joolz Denby nous indique que l’on entre de plain-pied dans le récit de l’histoire de Billie Morgan, l’héroïne de son livre. Billie est née dans une famille presque ordinaire de Bradford, dans le West Yorkshire. Billie est la cadette d’une fratrie de deux filles. Elle a les cheveux bruns de son père qui a déserté le foyer conjugal. Aux yeux de sa mère, blonde décolorée, elle n’est pas féminine et « a le don de [se] faire détester ». Billie, qui doit son nom à Lady Day, la chanteuse, se demande d’ailleurs, tout le temps : « qu’est ce que j’ai fait pour que papa nous abandonne ? Pour qu’il cesse de m’aimer ? ». Une lourde et sourde culpabilité qui va marquer le destin de cette gamine de Bradford. Bradford qu’elle aime même si ça n’est pas Londres, Bradford où a vu le jour le peintre David Hockney.

Sans fin sera la quête, Colette Gibelin

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Vendredi, 16 Juin 2017. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Poésie

Sans fin sera la quête, éd. Sac à mots, 2016 . Ecrivain(s): Colette Gibelin

 

Le cheminement poétique de Colette Gibelin s’accomplit dans la ferveur d’une quête sans fin. Où l’incandescence des mots embrase avec contenue les « balbutiements du vivre » et brûle d’une émotion retenue les fêlures de la vie, où la poète cherche « un surplus d’être ». Un supplément de flamme. Les titres de chaque partie expriment la quête inlassable de nos désirs turbulents, équilibristes fragiles, le vide au-dessus, du vide sous les pas chancelants de nos errances – « Grands chasseurs d’éternel », « Par-delà toute nuit », « Quel éclat perfore le noir ? », « Toute splendeur éclate ».

« Grands chasseurs d’éternel,

nous transitons

À travers l’éclat fragile des genêts

l’éblouissant miracle des cerises,

Œuvres, Madame de Staël en La Pléiade

Ecrit par Martine L. Petauton , le Jeudi, 15 Juin 2017. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman, Nouvelles, La Pléiade Gallimard

Œuvres, Madame de Staël, avril 2017, Édition de Catriona Seth avec la collaboration de Valérie Cossy, 1649 pages, 65 € jusqu’au 31/12/17 . Ecrivain(s): Madame de Staël Edition: La Pléiade Gallimard

 

En La Pléiade, enfin, l’œuvre de Germaine de Staël, bien autant pour la femme actrice-arbitre de son temps s’il en fut, que pour sa plume, classique et lumineuse, solide et ambitieuse, comme elle.

On connaît d’elle sa vie – romanesque – qui fascine par sa modernité et son audace, sa voix et sa présence de femme, incongrue en une époque si peu féministe. On sait la battante en politique qu’elle osât être, et on conserve dans le meilleur des cas quelques relents scolaires d’écritures romancées, demeurant pour autant dans nos anthologies personnelles largement derrière et dans l’ombre des « grands » du XIXème et de ce Benjamin Constant auquel on l’associe. Mais, qui d’entre nous sait l’immense culture – notamment littéraire, mais aussi philosophique, historique – de la dame, sa force d’écriture et sa capacité à utiliser la charpente de personnages fictifs des plus élaborés pour éclairer ces dessous de l’âme de ses contemporains jusque dans les plus infimes détails. Croisée des chemins que G. de Staël, intellectuelle des Lumières – une des très grandes – portant les débuts du romantisme et annonçant les problématiques des « soi, en soi » de toutes les psychologies à venir.