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Critiques

Amok, Stefan Zweig

Ecrit par Patryck Froissart , le Mercredi, 29 Janvier 2014. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Langue allemande, Nouvelles, Folio (Gallimard)

Amok, septembre 2013, traduit de l’allemand Bernard Lortholary, présentation et notes de Jean-Pierre Lefebvre, 140 p. 3,50 € . Ecrivain(s): Stefan Zweig Edition: Folio (Gallimard)

 

Confession d’un désespéré, cette nouvelle de Zweig parue en 1922 plonge le lecteur dans les sombres abysses du remords et de la folie.

Le temps de l’écriture s’inscrit dans le contexte trouble et perturbé des grands bouleversements sociaux et moraux de l’immédiate après-guerre, du rayonnement des thèses de Freud, dont Zweig est un admirateur inconditionnel et avec qui il échangera pendant plus de trente ans une copieuse correspondance, et des questions posées par le surréalisme sur la relation entre le rêve et la réalité, entre le conscient et l’inconscient dans la création littéraire.

Le temps du récit est antérieur, son dénouement étant précisément daté de mars 1912.

L’espace du récit cadre est clos. Nous sommes sur un paquebot, l’Oceania, où le narrateur premier, homodiégétique selon la classification de Genette, reçoit la confession, découpée comme un feuilleton, racontée en plusieurs nuits dans l’obscurité déserte et fantomatique du pont d’avant, du narrateur second, un médecin colonial en fuite tentant de regagner clandestinement son Europe natale.

La petite communiste qui ne souriait jamais, Lola Lafon

Ecrit par Victoire NGuyen , le Mardi, 28 Janvier 2014. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Roman, Actes Sud

La petite communiste qui ne souriait jamais, janvier 2014, 310 p. 21 € (14,99 € en version numérique) . Ecrivain(s): Lola Lafon Edition: Actes Sud

La fabrique des gymnastes machines

Pour Lola Lafon, son roman suit une trajectoire précise : écrire sur Nadia Comaneci, mais à sa façon sans que cela ne soit une biographie. D’ailleurs Lola Lafon le précise à Nadia :

« Lors de notre premier échange téléphonique, je précise à Nadia C. que ce récit ne sera pas forcément exact, je me donne le droit de remplir ses silences. Nous convenons que je lui enverrai les chapitres au fur et à mesure pour qu’elle donne son avis ».

Ainsi, dès le début, un contrat d’écriture est posé. Le roman prend en compte le témoignage de la concernée sur les événements qu’elle a vécus, mais Lola Lafon se donne le droit d’intervenir dans son récit pour retoucher certains détails, compléter la version de Nadia ou encore la confronter à celles des journalistes ou historiens sur la Roumanie sous Ceausescu et sa prise de position vis à vis du régime. L’auteur veut avant tout maintenir son récit dans une certaine objectivité. Elle cherche à détruire l’icône de la gymnaste pour retrouver sous le masque de cire la jeune femme complexe et ambiguë. Sa mission est d’éviter l’hagiographie. Ainsi, Lola Lafon réussit sa deuxième mise au point : un pacte de lecture avec son public.

Mourir pour la patrie, Akira Yoshimura

Ecrit par Stéphane Bret , le Mardi, 28 Janvier 2014. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Roman, Actes Sud, Japon

Mourir pour la patrie, Trad. du japonais par Sophie Refle janvier 2014, 176 pages, 18,50 € (13,99 € en numérique) . Ecrivain(s): Akira Yoshimura Edition: Actes Sud

 

Les récits de guerre peuvent refléter fidèlement l’état d’esprit des combattants décrits dans ce type de texte. C’est assurément le cas avec Mourir pour la patrie d’Akira Yoshimura. Ce roman se déroule lors de la bataille d’Okinawa, intervenue entre le 1er avril 1945 et le 21 juin de cette même année. Un jeune collégien japonais, Higa Shinichi, est enrôlé dans le bataillon de la première école secondaire d’Okinawa. Pourtant, ce jeune garçon, patriote jusqu’au bout des ongles, est déçu : il n’est pas affecté dans une unité combattante, mais dans un service de secours et d’évacuation des blessés. Son souhait le plus cher est de mourir en soldat japonais : dans l’honneur et par le sacrifice pour le « pays des dieux ».

Ainsi éprouve-t-il face aux événements ordinaires de la guerre des sentiments d’attirance : « De multiples fusées éclairantes retombaient en se balançant comme des tentacules de méduse dans le ciel au-dessus de la zone ciblée. Les flammes rouges qui montaient de la terre lui firent penser à l’éclat des torches d’une immense armée qui avancerait dans la nuit. Il observa avec ravissement ce spectacle nocturne ».

Fugitives, Alice Munro

Ecrit par Anne Morin , le Lundi, 27 Janvier 2014. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Nouvelles, L'Olivier (Seuil), Canada anglophone

Fugitives, traduit de l’anglais (Canada) par Jacqueline Huet et Jean-Pierre Carasso, 2008, 382 p. 21 € . Ecrivain(s): Alice Munro Edition: L'Olivier (Seuil)

 

Fugitives, en effet, et d’abord d’elles-mêmes, et du temps. Ce moment, ce temps qui les rattrape, qui dresse un mur ou les fait tourner en rond, ce temps – ou le destin – qui, comme l’ange exterminateur du film de Bunuel, joue avec ces femmes et demande une remise en situation pour à nouveau qu’elles se retrouvent, qu’elles sortent de cet enfermement ou de cette impasse, de ce non-lieu où les a menées la fugue, la fuite, leur tentative. La tentative ou l’acte réussi, en justice comme dans la vie, punie des mêmes peines.

La plus révélatrice de ces nouvelles, Subterfuges, et aussi la plus cruelle, paraît reposer sur un détail : « J’en mourrai, avait dit Robin, un soir, voilà des années. Si ma robe n’est pas prête, j’en mourrai » (p.269), ainsi commence la nouvelle.

L’héroïne de cette nouvelle, Robin, est une jeune femme vivant avec sa sœur qui a, comme on le dit pudiquement, des problèmes de santé. Captive de cette sœur aînée qu’elle ne peut laisser à elle-même, elle s’évade une fois chaque été, à la ville voisine, assister à une représentation théâtrale.

Beau Repaire, Jacques Higelin reçoit. Livre-CD, collectif

Ecrit par Catherine Dutigny/Elsa , le Lundi, 27 Janvier 2014. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Actes Sud, Arts

Beau Repaire, Sony Music Entertainement, distribué par Actes Sud, novembre 2013, 151 pages, 25 € Edition: Actes Sud

 

L’idée de départ était simple : donner carte blanche à une dizaine d’auteurs pour illustrer, chacun à sa manière, avec une totale liberté dans le choix et dans la forme, l’un des douze morceaux du dernier album de Jacques Higelin, Beau Repaire, dans un livre-CD.

Pour ce faire, Jacques Higelin reçoit dans son antre musical et littéraire Olivier Adam, Tonito Benacquista, Jacques A. Bertrand, Didier Daeninckx, Agnès Desarthe, Arthur Dreyfus, Brigitte Fontaine, Jérôme Garcin, Brigitte Giraud, Valentine Goby, François Morel, Atiq Rahimi, Sylvain Tesson et Nadine Trintignant. Quatorze auteurs pour douze chansons, inutile de chercher l’erreur… la liberté préside à ce recueil ; c’est précisé dès l’introduction. Liberté, amitié, complicité, admiration qui lient et soudent chacun d’entre eux, toutes générations et toutes sensibilités confondues, au grand Jacques.

Le résultat est, comme l’indique Clémentine Deroudille, journaliste et productrice à l’origine avec Nicolas Renault du projet, « un kaléidoscope littéraire foisonnant et démultiplié ».

Feuilletons ensemble les pages de cet ouvrage.