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Critiques

Le dernier voyage, Le Docteur Korczak et ses enfants, Irène Cohen-Janca

Ecrit par Laetitia Steinbach , le Jeudi, 19 Novembre 2015. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Jeunesse

Le dernier voyage, Le Docteur Korczak et ses enfants, éd. Les éléphants, septembre 2015, illustrations Maurizio A.C. Quarello, 60 pages, 18 € . Ecrivain(s): Irène Cohen-Janca

 

Une belle découverte que nous propose la jeune maison d’édition Les éléphants : un album, aux couleurs sépia le plus souvent, qui évoque avec délicatesse, simplicité et tact la figure paternelle et charismatique du docteur Korczak ; un album qui parle avec justesse de ces enfants du ghetto de Varsovie disparus dans la tourmente nazie.

Le livre s’ouvre sur une double-page au fusain qui résume le récit : un vieil homme à l’allure décidée, qui, les bras ouverts, protège de jeunes enfants au regard noyé. L’homme est nu-tête, désarmé, et semble n’avoir à offrir que sa bonté et sa fermeté. Cet homme, c’est le docteur Korczak, Pan Doktor, un homme célèbre, un pédagogue dont les méthodes éducatives ont inspiré la rédaction de la Convention Internationale des Droits de l’Enfant.

« C’est un grand médecin, un savant, un écrivain. Il a soigné les gens les plus riches et les plus puissants, il a donné des conférences dans le monde entier, il a écrit beaucoup de livres pour les grands et les petits, et même autrefois il parlait à la radio ».

Atlas de la France mystérieuse, Fabrice Colin

Ecrit par Marjorie Rafécas-Poeydomenge , le Mercredi, 18 Novembre 2015. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Récits, Autrement

Atlas de la France mystérieuse, mai 2015, 143 pages, 18,50 € . Ecrivain(s): Fabrice Colin Edition: Autrement

 

Voici le livre idéal pour préparer l’hiver en frissonnant délicatement autour d’histoires mystérieuses qui hantent l’inconscient collectif français. Fabrice Colin, auteur de SF, y décortique 40 énigmes qui ont fait vibrer l’hexagone à toutes les époques, avec élégance et pertinence.

« Nous aimons douter. Nous aimons penser que le monde est plus vaste que ce qu’il paraît. Parfois même, nous en voulons à la science de nous priver de nos rêves ».

Essayer de comprendre nos mystères, c’est une autre façon de se découvrir et de se connaître. C’est aussi s’aventurer dans un voyage à travers le temps, où les superstitions évoluent selon les époques. Les lieux hantés sont une manière détournée de nous rappeler qu’ils ont une mémoire et que d’autres personnes y ont vécu avant nous. Le livre commence par l’histoire célèbre de la dame blanche de Palavas-les-Flots qui fait éviter un accident de voiture à des étudiants et qui disparaît subitement alors que les portes du véhicule sont fermées.

Ann, Fabrice Guénier

Ecrit par Sophie Galabru , le Mardi, 17 Novembre 2015. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Roman, Gallimard

Ann, mars 2015, 296 pages, 19,50 € . Ecrivain(s): Fabrice Guénier Edition: Gallimard

 

Ann. Titre désarmant de simplicité qui sonne comme une invitation impérieuse à connaître une anonyme d’un autre monde. Très vite en effet, nous tombons dans cet univers souvent mal connu : celui de la Thaïlande, des jeunes filles et des jeunes garçons prostitués.

Une écriture qui fait parfois penser à celle de Duras ; des phrases courtes, étouffées, des mots perdus, des pages avec du vide, un auteur qui parle à perte de vue. Des résidus de mémoire parfois sans importance, parfois essentiels. Mais, à vrai dire, comment en juger puisque celui qui nous parle n’est pas un faiseur d’histoires mais un amoureux, et que l’amour fait de tout geste hasardeux le signe d’un destin ?

Des phrases simples qui en disent peu, mais dans l’intervalle desquelles le lecteur devine bien plus, car « le vrai, la réalité de ça, ne pouvait pas se dire » (p.255). De la discontinuité des fragments amoureux naît la fidélité, de l’addition des mots qui ne peuvent pas tout dire paraît le tout d’un amour qui ne peut pas s’expliquer par ses parties. L’auteur nous fait comprendre que l’amour, où qu’il se vive, dessine un temps et un espace propre, un écrin de douleurs et de joies qui peuvent être désagrégées par l’oubli ou préservées dans un hommage.

Un mot sur Irène, Anne Akrich

Ecrit par Patryck Froissart , le Jeudi, 12 Novembre 2015. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Roman, Julliard

Un mot sur Irène, Julliard, mai 2015, 206 pages, 18 € . Ecrivain(s): Anne Akrich Edition: Julliard

 

Léon Garry est professeur émérite à La Sorbonne. L’action commence alors qu’il est assuré d’être bientôt élu président de la prestigieuse université. Ecrivain au succès moyen, peinant à faire avancer « Le fou meurtrier », l’ouvrage sur Althusser sur lequel il est en train de travailler, il donne des cours sur le thème de « la mort de l’Auteur » (référence à l’ouvrage de Barthes portant ce titre).

Léon Garry est marié à Irène, l’une des ses anciennes étudiantes, elle-même enseignante et écrivaine célèbre, à la mode, dont la parution, chaque année à date fixe, de ses thèses fait régulièrement sensation.

Le couple vit selon des rituels relationnels peu ordinaires, au sein de quoi Irène assume et gère sans complexe, tant en privé qu’en public, l’homosexualité de son personnage.

Léon supporte plutôt bien cet état de choses, constituant la situation initiale du récit, jusqu’à l’apparition, dans sa vie conjugale, d’une nouvelle, jeune et belle étudiante, Judith, qui éclipse très vite toutes celles qui constituent le cercle des groupies d’Irène.

La Hante, Eric Pessan & Patricia Cartereau

Ecrit par Marie-Josée Desvignes , le Jeudi, 12 Novembre 2015. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Arts, Contes, L'Atelier Contemporain

La Hante, octobre 2015, 176 pages, 25 € . Ecrivain(s): Eric Pessan & Patricia Cartereau Edition: L'Atelier Contemporain

 

Hante (N.F.) : Fréquentation/Lieu où l’on vit/Endroit pour les bêtes (Dictionnaire du Moyen Français)

C’est un enfant et c’est son grand-père, c’est un lieu, la forêt, une cabane, celle des chasseurs, et c’est une activité destinée aux adultes : la chasse… quoique… le petit d’homme aussi aime traquer toutes sortes de choses dès l’enfance, la peur du loup dans la forêt, les secrets des adultes, le corps des femmes, les choses de la vie, l’univers tout entier et son mystère et puis le mensonge, l’illusion du monde…

L’enfant ne croit pas à ce monde pas plus qu’à ses mensonges, du genre de ceux de Jonas dans le ventre de la baleine. Mais la chasse, ce sont des images terrifiantes, « chairs à vif », « mises à mort furieuse », « cris », la chair crue et nue, celle du gibier et celle des femmes sur les posters dans la cabane, qu’il explore en cachette.

L’univers de la chasse, c’est celui du grand-père et de ses amis, mais aussi celui de la femme qui cuisine le gibier, « salmis de palombe, faisans », c’est aussi le plomb que l’on retrouve après la cuisson dans l’assiette, la chevrotine. Cette présence brute et brutale du grand-père taiseux, dans la traque c’est le silence, les traces des pattes dans la boue, c’est cet état à l’affût, c’est le gibier, la proie.