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Actes Sud

Zabor ou Les psaumes, Kamel Daoud (par Mona)

Ecrit par Mona , le Mardi, 11 Décembre 2018. , dans Actes Sud, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Maghreb

Zabor ou Les psaumes, 336 pages, 21 € . Ecrivain(s): Kamel Daoud Edition: Actes Sud

 

 

L’histoire d’une libération par l’écriture.

Un Robinson arabe, orphelin d’une mère répudiée, renié par son père et banni par ses frères, amoureux d’une divorcée privée de corps, vit en paria dans le territoire des femmes avec une tante, vieille fille analphabète, qui éveille ses sens. Frappé par le mauvais œil, entouré de signes et de rites, il doit garder en permanence sept livres collés sur le corps. Il possède le don magique d’écrire, écrire pour « faire reculer la mort », et survit grâce aux livres dans sa tête. Réputé renégat, pas circoncis, il porte un nom d’exilé, Ismaël, et se choisit un nom de poète, David, Daoud en arabe, l’écrivain des Psaumes, « le prophète à qui Dieu donna une voix unique ».

La Maison Golden, Salman Rushdie (par Christelle Brocard)

, le Mercredi, 05 Décembre 2018. , dans Actes Sud, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Iles britanniques, Roman

La Maison Golden, août 2018, trad. anglais Gérard Meudal, 416 pages, 23 € . Ecrivain(s): Salman Rushdie Edition: Actes Sud

 

Un millionnaire arrogant et ses trois fils, émigrés d’une ville mystérieuse puisqu’il leur a formellement enjoint d’en taire le nom, viennent s’installer dans les « Jardins » cossus de Greenwich Village, à New-York. L’arrivée soudaine de cette famille et de sa livrée haute en couleur sidère et inquiète le voisinage. Chacun observe, commente, suppute et conspire à l’édification du mythe de ceux qui se font appeler : Néron, Petronius, Apuleius et Dionysos Golden. René, le narrateur, un jeune cinéaste ambitieux, se passionne plus que tout autre pour cette intrigue familiale qui vient à point nommé se jouer et se dénouer sous ses yeux, et dès lors constituer une mine d’inspiration inestimable pour son prochain film. Aussi va-t-il se frayer, à force de persévérance et d’ingéniosité, un chemin équivoque dans l’intimité énigmatique du clan Golden, jusqu’à occuper auprès de chacun de ses membres une place aussi singulière que périlleuse et audacieuse. Car à mesure qu’il perce le secret d’un ancien potentat de la mafia indienne ou qu’il spécule sur les ombres de son passé, il prend part, à son insu, à l’effondrement d’une dynastie familiale dont le destin tragique est inscrit dans les noms d’emprunt des principaux protagonistes. L’équilibre du monde est ainsi préservé : à l’arrogance d’un empire gigantesque et malhonnête répond la chute vertigineuse.

Je remballe ma bibliothèque, Alberto Manguel (par Carole Darricarrère)

Ecrit par Carole Darricarrère , le Mardi, 13 Novembre 2018. , dans Actes Sud, Les Livres, Critiques, Essais, La Une Livres, Récits

Je remballe ma bibliothèque, octobre 2018, 160 pages, 18 € . Ecrivain(s): Alberto Manguel Edition: Actes Sud

 

« Dans le courant de l’année 1931, Walter Benjamin écrivit un bref essai, aujourd’hui célèbre, sur la relation des lecteurs à leurs livres. Il l’intitula Je déballe ma bibliothèque, une pratique de la collection (…) ».

Remballant à sa suite ses livres par la pensée (« Remballer, au contraire, c’est s’exercer à l’oubli »), comme l’on rebattrait les cartes sur cette « majorité silencieuse »*, « ces présences parmi lesquelles nous demeurons », tant « la réalité des livres contamine tous les aspects de notre vie », voici l’ouvrage élégant d’un collectionneur casanier, érudit rompu au voyage qui du haut de ses 70 ans confesse ses pensées et nous ouvre les portes de son intimité, c’est-à-dire de sa bibliothèque, façon de partager, virtuellement, les ouvrages précieux qu’il aura souvent soustraits à la passation des mains, trésors de l’ombre fugitivement exposés ici dans une galerie de papier, offerts aux regards par vitrines d’écriture interposées, à la faveur d’un déménagement, soit d’une petite mort (« La perte fait naître l’espoir comme le souvenir »).

Courrier de nuit, Hoda Barakat (par Carole Darricarrère)

Ecrit par Carole Darricarrère , le Mardi, 30 Octobre 2018. , dans Actes Sud, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Moyen Orient

Courrier de nuit, octobre 2018, trad. arabe Philippe Vigreux, 144 pages, 16 € . Ecrivain(s): Hoda Barakat Edition: Actes Sud

 

La nuit, la Littérature a mal. Elle envoie des lettres au monde, dès lors que l’Histoire s’incarne dans la menace d’un éternel retour. Nausée. Prélude à une introspection sartrienne sur le sens de l’existence.

C’est sur le mode de la confession, dans un style factuel à cran et à croc qui ne nous fait grâce d’aucun détail, sans jamais juger ni prendre parti, que Hoda Barakat, écrivaine libanaise vivant en France, dresse un tableau au vitriol de la condition humaine d’une actualité brûlante en cinq épisodes et quelques échos dont la tension dramatique installe un climat délétère dont le lecteur ne ressort pas indemne : roman âpre, expressif, frontal, qui jette un éclairage sensible d’une acuité intense sur les profondes mutations politiques et sociales auxquelles le monde est confronté.

Âmes sensibles s’abstenir, ce livre d’épistoles, traduit de l’arabe, qui se lit comme un recueil de nouvelles, dissèque les subtiles chambres de torture de la psyché humaine et dresse, à cheval sur d’invisibles frontières, un portrait pathétique des tristes pantins victimes et bourreaux d’une société barbare profondément toxique, présage d’un No future nous laissant désemparés face à un sentiment de malaise grandissant qui nous collerait à la peau.

La fille au Leica, Helena Janeczek (par Carole Darricarrère)

Ecrit par Carole Darricarrère , le Mercredi, 24 Octobre 2018. , dans Actes Sud, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Italie

La fille au Leica, octobre 2018, trad. italien Marguerite Pozzoli, 384 pages, 22,80 € . Ecrivain(s): Helena Janeczek Edition: Actes Sud

 

 

Confidence pour confidence, la chronique n’est pas un sport de tout repos. Le trou noir de la lecture existe, ce livre en fournit la matière, qui nous renvoie à notre incurable sens des responsabilités.

Portrait retard enchâssé dans un jeu de miroirs en révélant bien d’autres, incarné dans le lit d’une actualité d’une densité historique à couper au couteau qui fait de cette reconstitution in extenso sur deux continents et quelques pays un tour de force en forme de machine de guerre, La fille au Leica est un gros livre réel, composé par degrés de réminiscences et de touches de frappe, un roman solide dans lequel il ne suffit pas d’entrer pour s’enfoncer à la verticale du temps dans les strates de l’Histoire et les remous d’une époque, sorte de monument funéraire à effet de labyrinthe qui vous enserre dans ses replis à s’y perdre ou non.