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Articles taggés avec: Leuckx Philippe

Vacance, Victor Malzac (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Vendredi, 16 Décembre 2022. , dans La Une Livres, Les Livres, Recensions, Poésie, Cheyne Editeur

Vacance, Victor Malzac, novembre 2022, 64 pages, 17 € Edition: Cheyne Editeur

 

Il y a, chez Malzac, que je suis depuis ses débuts éclatants, une urgence à dire et à se dire, avec vérité, acuité, nudité. Une urgence que relaie cette stylistique de l’énumération, assez ethnographique, pour puiser autour de lui tout ce qu’il est bon de prendre. Sans coupure, selon la fluidité de la mer, le poème enregistre, simplement ponctué de virgules tout ce qui se place sous le regard du poète.

Tantôt garçon, tantôt fille, le je qui parle énonce son désir puissant de l’autre, des autres, de lui, dans une jouissance irrépressible, gourmande, sensuelle. C’est toute la plage qui défile, avec ses peaux, ses maillots serrés, ses attentes, ses fièvres. C’est la vacance complète : le poème dévide tout, sel, foutre, mer, gens, sable. Ce temps des « vacances » d’un jeune de dix-huit ans, fou de désir, de danse, de corps, de l’autre.

Des jours de pleine terre, Pierre Perrin (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Vendredi, 09 Décembre 2022. , dans La Une Livres, Les Livres, Al Manar, Recensions, Poésie

Des jours de pleine terre, Pierre Perrin, septembre 2022, 170 pages, 23 € Edition: Al Manar

 

Quelle âpreté dans ces poèmes qui de l’enfance à aujourd’hui consignent les blessures et les apprentissages d’un enfant, d’un poète, apte à saisir à pleins mots la violence des apprentissages. Les images tombent comme des constats cinglants, pas une trace de sentimentalisme ni d’once de complaisance. C’est « l’odeur d’urine », c’est le « saccage », l’enfant « brûle sans feu », c’est « la nuit qui ravale l’orgueil de l’enfant que nul n’écoute ». La mère n’étreint jamais le petit.

Construit en cinq sections – autant d’étapes d’une vie, le livre choisit une écriture qui puisse au mieux traduire les états d’âme, les sentiments, les effusions, toute émotion née dans le flux des jours, en campagne, dans l’usage de la terre et des bêtes, à l’aune des saisons, au rythme des plaisirs, des peines, des découvertes. L’amour y a une place de choix et les nombreux poèmes adressés à l’aimée disent assez cette période faste où la rencontre a renvoyé bien loin derrière les traumas.

L’écriture, en effet, privilégie les poèmes longs, fortement charpentés, aux images lyriques et à la scansion sûre des classiques :

Corps habitable, Michel Bourçon (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Vendredi, 02 Décembre 2022. , dans La Une Livres, Les Livres, Recensions, Poésie

Corps habitable, Michel Bourçon, Sinope Editions, octobre 2022, 104 pages, 7 €

 

Michel Bourçon vient de publier son 41ème recueil de poèmes. En tant que lecteur admiratif de sa poésie, c’est mon quatorzième livre de Bourçon.

« immobile derrière les vitres

on guette le mot

qui en amènerait d’autres

dans ce présent hanté par les souvenirs

avec ce peu de lumière

caressant le peu qui demeure

au cœur de ce moment où tout se fond

parmi le neutre »

(…) (p.43)

Vagabonde, Fumiko Hayashi (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Vendredi, 25 Novembre 2022. , dans La Une Livres, Japon, Les Livres, Recensions, Biographie

Vagabonde, Fumiko Hayashi, éditions Vendémiaire, septembre 2022, trad. japonais, René de Ceccatty, 192 pages, 20 €

 

Fumiko Hayashi fut dans les années trente une romancière à succès. Née en 1903, elle mourut en 1951. Son parcours, presque invraisemblable, la conduisit à travers le Japon, dans des périples qui lui donnèrent matière poétique et romanesque. Quel destin, que ces aventures existentielles, sentimentales d’une écrivaine, issue d’un pauvre milieu, obstinée à devenir ce qu’elle fut, une romancière et une diariste exceptionnelle.

Le texte, que nous découvrons, appartient à la veine à la fois du récit de vie et de la chronique des jours. Tout y prend place : la quête du travail, de l’argent ; les relations avec ses parents ; celles avec ses partenaires (amants, mari). C’est relaté avec réalisme et poésie. Le récit se voit ainsi truffé de poèmes et de références.

Les Confessions d’un petit philosophe, Azorin (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Vendredi, 18 Novembre 2022. , dans La Une Livres, Les Livres, Recensions, Récits

Les Confessions d’un petit philosophe, Azorin, éditions du Canoë, novembre 2022, trad. espagnol, Isabelle Leymarie, 128 pages, 15 €

Dans une prose simple et prenante, en petits chapitres d’une ou deux pages, Azorin relate son enfance, le collège austère, les prêtres, la mélancolie des villes d’alors, des petites vieilles qui récitent les neuvaines, et les oncles et tantes, tous vieux, tous englués dans les miasmes de la province espagnole. C’est la canicule, les moissons ne vont pas beaucoup donner et il y aura peu de vin. Sous la plume d’Antonio Azorin, c’est toute l’enfance qui défile, c’est toute la vie qui a pu le nourrir. Le ton de ces quarante-sept chapitres est tissé de nostalgie, de mélancolie, d’une angoisse indicible. Le « petit philosophe » n’use pas de grands mots ; sa philosophie, c’est la science de vivre au contact des siens, nourri d’une mémoire saine, et des valeurs universelles de bonté et de compréhension.

Les maisons, les lieux, les jardins ont pour lui l’agrément d’une vie solide : les murs parlent, les lieux ont de quoi nous conter, la vaste plaine qui s’étendait aux yeux de l’enfant fatigué au collège est pour lui une raison d’imaginer la vie, de la prolonger par l’esprit.

Il n’est pas important de posséder beaucoup : quelques vignes suffisent à l’oncle Antonio pour faire de lui un homme heureux et généreux. Il accueille souvent chez lui son neveu.