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Roman

La vie sans savoir, Christophe Etemadzadeh (par Arnaud Genon)

Ecrit par Arnaud Genon , le Mercredi, 23 Juin 2021. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Arléa

La vie sans savoir, Christophe Etemadzadeh, janvier 2021, 398 pages, 21 € Edition: Arléa

 

Du côté de chez Etemadzadeh.

En 2006, dans Zardosht et autres pièces du puzzle (Gallimard), Christophe Etemadzadeh évoquait déjà la figure paternelle dans un récit autobiographique qui avait été salué par la critique. Quinze ans plus tard, dans La vie sans savoir, l’auteur revient sur les douze premières années de son enfance lilloise et sur ceux qui l’ont entouré, parmi lesquels son père qui fera « ce que font les autres hommes : boire, fumer, refaire le monde, jouer aux échecs, tromper sa femme », qui quittera la maison et dont le narrateur n’entendra plus parler pendant longtemps.

Dès les premiers mots, Christophe Etemadzadeh inscrit son texte dans la lignée des autobiographies les plus classiques : « Je suis né en septembre 1975, à Lille, de Zardosht Etemadzadeh et de Catherine B ». L’état-civil de ses parents ayant été déclaré, le pacte signé, le narrateur peut se lancer dans le récit de sa vie, même si du tout début de sa vie, il n’a rien à dire : « Si je me fie aux souvenirs qui m’appartiennent en propre, il ne s’est rien passé au cours de mes deux premières années ».

Messe pour la ville d’Arras, Andrzej Szczypiorski (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mardi, 22 Juin 2021. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Pays de l'Est, Editions Noir sur Blanc

Messe pour la ville d’Arras, Andrzej Szczypiorski, mai 2021, trad. polonais, François Rosset, 165 pages, 18 € Edition: Editions Noir sur Blanc

Dans les grammaires du pouvoir en crise, le Juif est un syntagme central, articulé entre le désespoir d’une opinion publique et la faiblesse d’une autorité qui se veut à l’écoute de la vox populi pour sauver sa pérennité. Dans l’hystérie qui saisit les foules en temps de crise – une épidémie de peste dans ce roman –, la question de l’hystérique au maître politique et/ou spirituel se fait pressante, impérative : « tu dis que tu es le maître, prouve-le ! » – et pour ce faire, il faut trouver le responsable de la crise. Satan n’est pas loin – nous sommes au XVème siècle –, seul le Diable peut avoir déclenché cette malédiction sur Arras. Le Diable, par l’intermédiaire de ses ambassadeurs sur terre : les Juifs. La haine du Juif consubstantielle à la haine de soi, qui la révèle et la propage, lui donne les ailes lourdes de la foule en colère. Que le Juif soit le premier déversoir de la peur est une constante historique universelle.

« Ce fut un jour sans fin. À midi, on exécuta le chef de la communauté. Les gens marchaient de nouveau sur la porte occidentale. Une sorte d’inassouvissement étreignait les cœurs. […] Le feu ravagea de nouveau quelques maisons juives. C’était un mélange de cris, de prières et de jurons, et le son des cloches, par-dessus ce tumulte, battait l’air en cadence ».

Amour, Colère et Folie, Marie Vieux-Chauvet (par Stéphane Bret)

Ecrit par Stéphane Bret , le Vendredi, 18 Juin 2021. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Zulma

Amour, Colère et Folie, mai 2021, 491 pages, 11,20 € . Ecrivain(s): Marie Vieux-Chauvet Edition: Zulma

 

Amour, Colère et Folie est une trilogie qui présente successivement des personnages indépendants, mais représentatifs à un titre ou à un autre, de la situation d’Haïti. Dans la première partie, il est question de Claire Clamont, sœur aînée d’une famille, qui veut épouser à tout prix un Français, Jean Luze ; elle détruira sa famille pour atteindre ce but chimérique. Dans la seconde partie, l’auteure s’attache à décrire l’histoire d’une famille de propriétaires terriens : ils seront tous écrasés en essayant de récupérer leur terre. La dernière partie met en scène des jeunes poètes qui vivent à huis clos dans la maison d’Ubu.

Le point commun de ces récits, c’est tout d’abord une extrême dureté : celle des sentiments, des états d’âme, marqués par le mal, la tentation permanente de la violence, par l’envahissement du remords, par des interrogations nourries à propos des origines, de la situation des Haïtiens. Le lecteur est confronté à la terreur, celle des tontons macoutes, au temps de la dictature de Duvalier. L’auteure évoque également la période de l’occupation américaine :

Murcie, sur les pas d’Ibn Arabi, Fawaz Hussain (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Vendredi, 18 Juin 2021. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres

Murcie, sur les pas d’Ibn Arabi, éditions du Jasmin, septembre 2020, 140 pages, 18 € . Ecrivain(s): Fawaz Hussain

 

De la mort à la résurrection

Le roman de Fawaz Hussain commence à Paris, où un professeur retraité, Faramarz Hajari, reçoit un appel inattendu d’une ancienne étudiante de la Sorbonne, l’invitant à explorer les traces d’Ibn Arabi – « ach-Cheikh al-Akbar » (« le plus grand maître »), né en 1165 à Murcie, mort en 1240 à Damas, théologien, juriste, poète, soufi, métaphysicien et philosophe andalou, auteur de 846 ouvrages présumés. Habitant un « dernier étage mansardé » où « des corneilles et des pies se chamaillaient sur les bords de cheminée qui leur servaient de perchoirs » et observant « une femme maghrébine » étendre son linge, l’écrivain Faramarz Hajari réceptionne cette invitation à Murcie avec joie et un peu d’appréhension, devant rencontrer d’éminents spécialistes du Maître, honnis par les islamistes égarés dans de fausses doctrines.

Madeleine Bernard, La Songeuse de l’invisible, Marie-Hélène Prouteau (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Jeudi, 17 Juin 2021. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Hermann

Madeleine Bernard, La Songeuse de l’invisible, mars 2021, 158 pages, 19 € . Ecrivain(s): Marie Hélène Prouteau Edition: Hermann

 

L’art, souvent, retient les grandes figures, les chefs d’école, les novateurs. Il néglige les figures secondaires même si elles ont joué un certain rôle dans la conception artistique d’un peintre ou d’une école. La fin du XIXe a été particulièrement riche en écoles de toutes sortes. Impressionnisme, divisionnisme, cloisonnisme, nabis, symbolisme. Marie-Hélène Prouteau nous embarque pour une découverte des années 1880-1890.

Madeleine, la sœur cadette du peintre Emile Bernard que l’école de Pont-Aven a rendu célèbre, recueille ici l’attention de la romancière qui lui consacre tout un livre. Figure retirée, à l’ombre de la musique et de la piété fraternelle envers un frère fantasque, créatif, déluré, mature et indiscipliné, au grand dam de ses parents.

Des années passées dans le nord, le long de la Deûle, puis à Paris, à Courbevoie, à Asnières. La frêle et blanche Madeleine, à la santé délicate, accompagne au piano les années où son grand frère entame son apprentissage de peinture (à l’atelier Cormon d’où il sera renvoyé) et cueille les rencontres importantes (Schuffeneker, Gauguin, Van Gogh, Anquetin). Il passe par l’impressionnisme, le pointillisme, cède aux aplats japonisants. Participe aux premières expositions.