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Récits

Voyager, Russell Banks

Ecrit par Sylvie Ferrando , le Mercredi, 30 Août 2017. , dans Récits, Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Actes Sud, Voyages

Voyager, mai 2017, trad. américain Pierre Furlan, 320 pages, 22,50 € . Ecrivain(s): Russel Banks Edition: Actes Sud

 

Il s’agit dans ce livre, à mi-chemin entre un récit de voyage et un essai, d’un voyage géographique et mémoriel, dans plusieurs endroits du globe et aussi dans le souvenir des quatre femmes successives de l’auteur, trois passées et une présente et à venir.

Russell Banks aime les îles, les Caraïbes et les îles Vierges, qu’il visite avec Chase la bien-aimée lors d’un périple de deux mois, tous frais payés par un magazine de tourisme de luxe ; les îles Vierges comme Saint-Thomas, Sint Maarten, les Caraïbes comme Grande Terre, Basse Terre, Marie-Galante… mais aussi Cuba et la baie des Cochons, ou plus tardivement les Seychelles, que l’on découvre en détail et en profondeur.

Mais il s’agit aussi d’un voyage de femme en femme – Banks a été marié quatre fois : de Darlene à Christine, de Christine à Becky, enfin de Becky à Chase (de son premier nom Penelope), l’amoureuse à qui est dédié le livre. Eternel amoureux, Banks entreprend une fugue vers l’Athènes du Nord pour célébrer un 4e mariage pas très bien considéré par les familles respectives des deux époux : les quatre filles de Banks, qu’il a eues de ses deux premières unions, et les parents de Chase.

Totalement dépassés, Gérald Sibleyras

, le Vendredi, 18 Août 2017. , dans Récits, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Editions de Fallois

Totalement dépassés, janvier 2017, 136 pages, 17 € . Ecrivain(s): Gérald Sibleyras Edition: Editions de Fallois

 

Totalement dépassés est une succession de petites tranches de vie saisies sur le vif, que Gérald Sibleyras, auteur dramatique à succès, nous livre en précisant qu’il s’agit de témoignages. Témoignages qu’il a entièrement inventés, cela va sans dire. Certains sont drôles, d’autres étranges ou émouvants. Petite revue de détail.

Jean-Patrick, infographiste, a une liaison idéale depuis six mois avec Delphine qui est « sympathique, rieuse, équilibrée ». Ils se voient en cachette de ses deux garçons de 7 et 9 ans qu’elle appelle mes p’tits bouts. Elle décide de les présenter à Jean-Patrick. Les p’tits bouts sont deux monstres qui ressemblent à des vikings, désobéissants et grossiers. « A la place de Delphine j’aurais envoyé un bataillon de gendarmerie ». C’était il y a dix jours, Jean-Patrick n’a pas rappelé Delphine.

Franck a connu Marine, qui est bretonne depuis toujours. Marine vote socialiste et son prénom lepenien la désole, mais elle ne peut se résoudre à lui substituer son deuxième prénom, Aouregwenn. Franck et Marine se marient, elle travaille un peu puis décide d’être bretonne au foyer. Ils essaient vainement de procréer et, en désespoir de cause, adoptent la solution écœurante de prendre un chat qu’ils baptisent Traoumad.

Le chardon et le bleuet, Une Écossaise dans la France occupée, Janet Teissier Du Cros

Ecrit par Martine L. Petauton , le Lundi, 03 Juillet 2017. , dans Récits, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Le Rouergue, Histoire

Le chardon et le bleuet, Une Écossaise dans la France occupée, Janet Teissier Du Cros, Le Rouergue, février 2017, trad. anglais (Écosse) Florence Causeur, Claude Chastagner, Jean Vaché, 426 pages, 23,80 € . Ecrivain(s): Janet Teissier Du Cros Edition: Le Rouergue

 

L’histoire dans l’Histoire

Deux préfaces, pas moins, l’une d’un historien, Patrick Cabanel, l’autre, d’une ethnologue, Claudine Vassas, marquent l’entrée dans ce livre dont la traduction en français est très récente, alors que sa gloire, tant en Angleterre qu’aux États-Unis, a suivi immédiatement sa parution en 1962.

Livre unique, de son auteure, comme par son immense qualité intrinsèque, précieux tant à l’Histoire qu’à l’Homme. Auteure rare et fort attachante qu’on emmène avec soi, les dernières pages avalées comme à regret. Livre – il y en a si peu – dans lequel on avance à grands pas curieux et pressés, non de savoir la suite – on la connaît, c’est l’Histoire – mais de voir ce que Janet Teissier Du Cros – on pourrait dire, son aventure – devient dans ce temps de l’Histoire.

Algorithme éponyme, et autres textes, Babouillec

Ecrit par Cathy Garcia , le Mardi, 27 Juin 2017. , dans Récits, Les Livres, Critiques, Essais, La Une Livres, Rivages

Algorithme éponyme, et autres textes, 138 pages, 15 € . Ecrivain(s): Babouillec Edition: Rivages

 

Je viens enfin de terminer un livre de Babouillec. En fait, je ne savais pas exactement ce que j’allais lire mais je savais que ce serait une claque et puis au final c’est une formidable résonance. Je retrouve tellement de mes propres ressentis, de mes questionnements, mes révoltes même, dans ses mots, que je me dis que moi aussi je dois être autiste, camouflée derrière une apparente normalité et que nous sommes même peut-être tous des autistes plus ou moins intégrés dans la normalité, et alors la question s’impose : qu’est-ce que ça veut dire « être normal » ? La question que nous posent, parfois comme un flingue sur la tempe, tous les dits « anormaux », tous les « différents », peut-être pour nous montrer à quel point nous sommes éloignés, coupés de nous-mêmes, de notre être véritable, unique et extraordinaire dans son anormalité.

Qu’est-ce que ça veut dire « être normal » ?

C’est la question qui vient nous remettre en question justement, qui vient nous réveiller. Une question qui dérange notre sommeil, une sorte de sommeil collectif hypnotique.

Le Grand Sylvain, Pierre Bergounioux

Ecrit par Philippe Leuckx , le Lundi, 26 Juin 2017. , dans Récits, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Verdier

Le Grand Sylvain, mars 2017, 80 pages, 25 € . Ecrivain(s): Pierre Bergounioux Edition: Verdier

 

À Gif, à Brive, ailleurs, Pierre Bergounioux s’est toujours interrogé subtilement, finement, au plus nu, sur les pertes, les « peines et profits » de l’enfance pourvoyeuse de découvertes mais aussi d’âpres chagrins.

« Tenir registre » comptable de cela : tel est le projet d’une « capture » symbolique à plus d’un sens. La Capture que propose Verdier est sous coffret cartonné, un livre, Le Grand Sylvain, et un film éponyme.

De quelles captures s’agit-il ? D’une capture psychologique où l’enfant soudain est visé comme le premier stade d’une mue irrémédiable : l’adulte qu’il sera et qui fouille déjà en soi les prolongements de sa mue.

D’une capture réelle, où l’entomologiste, à l’aune du grand Fabre, s’amuse à mesurer cet état d’enfance qui surveille, observe, perd son temps pour recueillir, sans doute, des manières de miracle : ainsi le cétoine et la mort, l’univers où il peut se révéler, le temps qu’il faut pour la « prise », « la capture ».