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Récits

Le plus et le moins, Erri De Luca

Ecrit par Philippe Leuckx , le Samedi, 11 Juin 2016. , dans Récits, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Biographie, Gallimard, Italie

Le plus et le moins, mai 2016, trad. italien Danièle Valin, 208 pages, 14,50 € . Ecrivain(s): Erri de Luca Edition: Gallimard

Chez De Luca, l’ancrage dans la réalité napolitaine ou ouvrière ou encore alpine est au cœur de nombre de ses ouvrages. Naples, comme Montedidio (honoré du Prix Médicis étranger 2002) ou Le jour avant le bonheur, l’ont montré avec brio et inventivité. L’alpiniste accompli a trouvé moyen d’illustrer l’univers de sa passion par le biais de la fable dans Le poids du papillon.

Depuis, des recueils de nouvelles ou de récits ont accompagné les soubresauts de la vie du Napolitain, finalement relaxé dans un sombre fait divers, d’où il est sorti grandi et prompt à affronter d’autres combats, plus intérieurs sans doute, comme le révèle le dernier opus, ensemble de 37 récits, suivis de trois poèmes, au titre singulier – qui en éclaire la portée, disons, hautement morale, Le plus et le moins.

Entre récits autobiographiques et autres histoires à portée symbolique, l’auteur napolitain, né en 1950, ayant longuement vécu au sceau des réalités parfois très sombres de son parcours, sent l’intense désir d’évoquer, en pages réalistes, nourries d’expériences diverses, ce que fut un certain passé. Passé lointain de l’enfance comme événements plus récents liés aux faits de mai 68, d’un passage douloureux dans la France de 1982. Sans oublier le passé tout proche, lorsque sa mère, ainsi, dut remplacer sa carte d’identité. Chez De Luca, l’intime, le noyau familial rejoint sans cesse les préoccupations communautaires et/ou collectives de la cité.

Vadim un playboy français, Arnaud Le Guern

Ecrit par Philippe Chauché , le Vendredi, 10 Juin 2016. , dans Récits, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Séguier

Vadim un playboy français, mai 2016, 264 pages, 21 € . Ecrivain(s): Arnaud Le Guern Edition: Séguier

 

« Ça commence par un adieu. À la légèreté, au dilettantisme, à l’élégance par-dessus la jambe. Un enterrement et, en larmes derrière leurs lunettes fumées, des femmes. Les siennes. L’homme qui aimait les femmes, c’est lui : Roger Vadim ».

Vadim, le nom seul est déjà roman. Et quel roman ! Un roman cinématographié. Un roman très français et qui flirte parfois avec les Amériques. Premier acte : Et Dieu… créa la femme, clap de fin : And God Created Woman. Plus de trente ans séparent les deux films, Vadim a fait le grand écart, les studios ont des raisons que les artistes ignorent. Vadim un playboy français est le roman de cette aventure, de cette vie virevoltante, soyeuse, joyeuse et par instant rugueuse, où l’on croise Brigitte Bardot – De toutes les armes que nous offre la vie quotidienne pour régler ses comptes à la sottise, la jeunesse et l’impudeur d’une femme sont les plus douces* –, Saint-Germain-des-Prés, Maurice Ronet – Ronet se lance dans le cinéma par désœuvrement. Il faut bien s’occuper, gagner sa vie sans trop se fouler, Paul Gégauff, Saint-Tropez, mais aussi Françoise Sagan, Roger Vailland, Catherine Deneuve ou encore Thelonious Monk.

13, Zineb El Rhazaoui

Ecrit par Martine L. Petauton , le Vendredi, 10 Juin 2016. , dans Récits, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Ring Editions

13, mars 2016, 296 pages, 18 € . Ecrivain(s): Zineb El Rhazoui Edition: Ring Editions

 

 

Ecrire juste derrière l’événement


Écrire sur le 13 Novembre. Des articles, évidemment ; ceux de l’heure d’après, ou même les copiés-collés de brèves à peine vérifiées – mais l’appétit est, dans un tel cas, insatiable dans l’opinion – ceux, plus organisés, ciblés, réfléchis, qui noircissent pages et sites dans le jour d’après, attendant les chroniques, par définition analytiques et architecturées autour de leur axe, et (ou) de leur point de vue, des hebdo. Mais écrire tout un livre qui paraîtra dans les petits mois suivant l’évènement – autrement dit, dans son espace temps, quand même – est bien autre chose.

La jeune fille et Gainsbourg, Constance Meyer

Ecrit par Marjorie Rafécas-Poeydomenge , le Jeudi, 02 Juin 2016. , dans Récits, Les Livres, Critiques, La Une Livres

La jeune fille et Gainsbourg, Archipoche, janvier 2016, 165 p. 6,80 € . Ecrivain(s): Constance Meyer

C’est l’histoire (vraie) d’une jeune fille qui, « la tête remplie de rêves » en 1985, eut l’audace de laisser une longue lettre sous la porte de l’hôtel particulier du 5 rue de Verneuil. Serge Gainsbourg fut alors immédiatement séduit par l’authenticité et la puissance de ses mots, de ces « petits riens » qui embellissent la vie, même les plus exceptionnelles, y compris celle d’un albatros aux ailes de géant. C’est ce petit bout de jeune fille qui lui inspira le mot « constance » dans ses chansons à partir de 1986. « Constant dans l’inconstance, tu ne sais pas où tu vas », lui susurre Charlotte dans la chanson Plus doux avec moi. La vie est souvent à la croisée d’heureux hasards. Encore faut-il savoir saisir ces instants. Constance sut tout de suite que Serge était une âme amie : « Je me sens déphasée avec un je-ne-sais-quoi de proximité. Cet inconnu m’est bizarrement très familier ».

Constance Meyer a attendu 25 ans avant d’oser raconter son histoire extraordinaire avec cet être hors norme qu’était Serge Gainsbourg. Suite à la parution de ce témoignage en 2010, elle a pu rencontrer et échanger avec des proches de l’icône française, ses biographes, le patron du Galant Verre ainsi que son ancien voisin Jean-Jacques Debout (auteur compositeur marié avec Chantal Goya) qui a très bien connu Serge mais qui ignorait que la mystérieuse « étudiante » était en fait sa gentille voisine, Constance.

Popa Singer, René Depestre

Ecrit par Marc Ossorguine , le Mardi, 31 Mai 2016. , dans Récits, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Zulma

Popa Singer, février 2016, 155 pages, 16,50€ . Ecrivain(s): René Depestre Edition: Zulma

 

Avec Popa Singer, les éditions Zulma nous font découvrir un texte ancien mais pas encore publié de l’un des doyens de la littérature haïtienne, René Depestre (1926). L’auteur reconnaît par ailleurs qu’il s’agit d’un texte un peu particulier au point qu’un « mode d’emploi » a été ajouté à la fin du récit dans lequel René Depestre explique : « J’avais alors adressé le manuscrit à l’éditeur sans l’accompagner d’un mode d’emploi. (…) Le récit, écrit dans la tradition du réel-merveilleux haïtien, sans clefs de lecture, était impubliable. Il allait rester de nombreuses années dans les ténèbres d’un tiroir ».

Même aujourd’hui, le récit et surtout l’écriture ont encore de quoi surprendre, de quoi dérouter le lecteur, pour son bonheur sans doute, mais de le dérouter. Ecriture foisonnante, regorgeant d’images, de métaphores, de rythmes qui semblent relever autant d’une transe vaudou que d’une exubérance poétique flamboyante, abreuvée du lyrisme des Caraïbes.