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Les Livres

Avant que le monde ne se ferme, Alain Mascaro (par Guy Donikian)

Ecrit par Guy Donikian , le Mardi, 14 Septembre 2021. , dans Les Livres, Recensions, La Une Livres, Roman, Autrement

Avant que le monde ne se ferme, Alain Mascaro, août 2021, 245 pages, 17,90 € Edition: Autrement

 

Tout aura commencé dans la steppe kirghize, au sein de la « kumpania » dans laquelle Anton Torvath va croître. Né au début du « siècle des génocides », Anton va acquérir ses armes de circassien dans un cirque composé de jongleurs, de trapézistes, de dompteurs. Il sera lui-même dompteur de chevaux. Anton Torvath est tzigane, et ce « fils du vent » va devoir voyager pour rencontrer le pire dans une Europe « où le bruit des bottes écrase tout ».

« Les années s’égrenaient doucement au rythme des spectacles : monter, démonter la toile, atteler les chevaux, tracer la route… Des enfants naissaient ; d’autres étaient en âge d’intégrer la parade ou de présenter un numéro. Ils s’essayaient à tout, même à ce qu’ils n’aimaient pas a priori, c’était la règle du cirque Torvath. C’était ainsi que naissaient les vocations, ainsi qu’arrivaient les accidents ». Anton va aimer les chevaux et les chevaux vont l’aimer, depuis l’enfance, après qu’un accident l’aura fortuitement dirigé vers les équidés qui ne cesseront d’importer dans son périple.

L’Affaire Pavel Stein, Gérald Tenenbaum (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Mardi, 14 Septembre 2021. , dans Les Livres, Recensions, La Une Livres

L’Affaire Pavel Stein, Gérald Tenenbaum, Cohen & Cohen éditeurs, août 2021, 146 pages, 17 €

 

Enseigner les mathématiques dans une université de bon niveau (ou dans un autre établissement) ne prédestine pas à occuper une place, quelle qu’elle soit, dans la littérature. Or, Gérald Tenenbaum, professeur de mathématiques à l’université de Lorraine, auteur d’une Introduction à la théorie analytique et probabiliste des nombres (omise à la rubrique « Du même auteur »), a également composé plusieurs romans qui ne se réduisent pas à une succession chronologique de titres, mais forment à présent cet ensemble organique qu’on appelle une œuvre, où chaque nouvel ouvrage prend place naturellement, non sans modifier la physionomie du tout. L’ensemble dépasse la somme des parties (peut-être y a-t-il une manière mathématique de formuler plus adéquatement cette idée). De même qu’il existe une relation entre l’unité que constitue le roman isolé et le tout que forme l’œuvre, une autre relation apparaît, entre l’œuvre et la tradition dont elle relève. La littérature française est, depuis Montaigne, une littérature de moralistes, ce qui n’implique pas une vision étriquée de la réalité, mais une volonté d’explorer les ressorts cachés des actions humaines (les maximes de La Rochefoucauld ont la rigueur, la transparence et l’inexorabilité des postulats géométriques).

Pour Emma (deuxième partie) Contre Lheureux, Léon Dupuis et Rodolphe Boulanger (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Mardi, 14 Septembre 2021. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED

 

Madame Bovary, Gustave Flaubert, Folio Gallimard, 2001, édition de Thierry Larget, 528 pages, 4,10 €

 

Dans la première partie de cette chronique relative à Madame Bovary, une seconde partie a été annoncée, relative à Léon, Rodolphe, Lheureux et Homais – cette seconde partie a éclaté sous la pression du personnage Homais, l’exact pendant d’Emma Bovary, qui, dans son orgueilleuse et imbécile arrogance d’apothicaire à la sublime médiocrité, a réclamé que lui soit consacrée une page entière sur le site de La Cause Littéraire. Dont acte – il ne sera question dans cette seconde partie que de Léon Dupuis, Rodolphe Boulanger et l’in-prénommé Lheureux. À eux trois, ils représentent suffisamment la vilenie et l’hypocrisie pour qu’on épargne au lecteur de subir en sus le cas Homais.

La Nuit tombée, Antoine Choplin (par François Baillon)

Ecrit par François Baillon , le Lundi, 13 Septembre 2021. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Points

La Nuit tombée, 128 pages, 5,70 € . Ecrivain(s): Antoine Choplin Edition: Points

Gouri, écrivain public à Kiev, décide de revenir sur les lieux de son ancienne vie, à Pripiat, afin de récupérer un objet auquel il tient tout particulièrement ; il prend néanmoins le temps de s’arrêter à Chevtchenko en cours de route, pour y retrouver des amis restés sur place, Vera et Iakov.

Le propos de ce roman est très simple, mais à l’intérieur de ce propos, Antoine Choplin nous décrit une réalité grise, atrophiée, et cependant profonde. S’il devait faire l’objet d’une adaptation cinématographique, nul doute que le film serait économe en dialogues, et ponctué de regards expressifs et de silences pleins de signification.

Sous une apparence majoritairement descriptive, tandis qu’on suit l’itinéraire de Gouri à bord de sa moto, le livre nous parle de l’impossibilité d’un exil, de la volonté opiniâtre à rester sur les lieux où l’on a toujours vécu et que l’on persiste à vouloir rendre vivants, même quand une catastrophe comme celle de Tchernobyl voudrait tout faire cesser. À ce titre, l’histoire de la vieille dame à Ritchetsya, racontée par Iakov, a toutes les caractéristiques d’une histoire qui a vraiment pu se dérouler. Mais cette impossibilité de l’exil, plus qu’exprimée, est personnifiée par Gouri lui-même : en dépit du fait qu’il a su se recréer une vie à Kiev, il décide de prendre des risques inconsidérés pour avoir le simple privilège de reposer les pieds chez lui, et de récupérer un objet cher à son cœur.

L’Œil immuable, Oskar Kokoschka (par Charles Duttine)

Ecrit par Charles Duttine , le Lundi, 13 Septembre 2021. , dans Les Livres, Recensions, La Une Livres, Langue allemande, Arts, L'Atelier Contemporain

L’Œil immuable (Articles, conférences et essais sur l’art), Oskar Kokoschka, avril 2021, trad. allemand, Régis Quatresous, 456 pages, 25 € Edition: L'Atelier Contemporain

A l’école de la peinture

C’est un plaisir étrange que de fréquenter les œuvres des grands peintres. On y découvre toutes sortes d’univers, des créations marquées par un tempérament, ou encore des visions du monde où le regard joue un rôle essentiel. On apprend, avec eux, à voir ce qui nous entoure, nous qui sommes si souvent borgnes ou franchement aveugles en ce monde. C’est une riche école où il est question de formes et de vibrations, de lumières, de contrastes ou du feu intérieur des couleurs. Les peintres savent nous suggérer l’impalpable, l’intelligible ou le presque rien. Nous avons beaucoup à apprendre d’eux.

C’est ce à quoi l’on pense en lisant la publication des éditions L’Atelier contemporain, L’Œil immuable, ouvrage qui réunit des textes d’Oskar Kokoschka parus entre 1910 et les années 60. On y découvre que le grand artiste autrichien ne fut pas simplement peintre, contemporain de Klimt, acteur de l’expressionnisme naissant dans la Vienne du début du XXème, mais qu’on lui doit aussi une œuvre littéraire assez fournie. Des récits autobiographiques, des textes purement littéraires (poèmes et drames), des écrits politiques et des essais sur l’art. Ce sont ces derniers que rassemble l’ouvrage L’Œil immuable.