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Les Livres

Une Rose pour Emily / Soleil couchant / Septembre ardent, William Faulkner (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mercredi, 29 Septembre 2021. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Nouvelles, Folio (Gallimard)

Une Rose pour Emily / Soleil couchant / Septembre ardent, Folio bilingue, 148 pages . Ecrivain(s): William Faulkner Edition: Folio (Gallimard)

 

Quand on prononce le nom de Faulkner, surgissent aussitôt à l’esprit du lettré les grands romans écrits entre 1929 et 1936. Six romans – sept si on inclut Sartoris – qui marquent à jamais l’histoire de la littérature américaine et l’histoire universelle du genre romanesque, jusqu’au point de se demander si après ces monstres le roman a survécu. L’œuvre nouvelliste du maître du Sud est pourtant d’une importance telle qu’elle rivalise avec ses romans. Les passerelles entre les deux mondes faulknériens sont nombreuses : l’un nourrit l’autre, dans les deux sens. Des personnages, des situations, les lieux (bien sûr, avec Faulkner le territoire est récurrent) se retrouvent, communiquent, se font écho dans une osmose complexe, parfois surprenante.

Dans ce recueil célèbre, écrit entre 1929 et 1931 c’est-à-dire au sommet de la création faulknérienne, on peut jouer à établir les liens entre les textes – autres nouvelles, romans. Mais il s’agit bien de nouvelles, autonomes, qui se lisent comme telles.

Sous l’imperturbable clarté, Choix de poèmes 1983-2014, Jean-Marie Barnaud (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Mercredi, 29 Septembre 2021. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie, Gallimard

Sous l’imperturbable clarté, Choix de poèmes 1983-2014, Jean-Marie Barnaud, Gallimard/Poésie, 2019, préface d’Alain Freixe, poète, 272 pages, 8,60 € Edition: Gallimard

 

Ce passant, qui explore saison après saison l’univers qui l’entoure, cherche à « y mettre de l’ordre », à y trouver une clarté qui ne soit pas évidente et première.

En de poèmes courts – le plus souvent – et limpides (ce vœu de clarté assigné dès le titre de l’ensemble), le poète se dit aussi passeur d’un quotidien où les éléments tremblent leurs sens, à l’aune de l’eau présente, celle qu’« on entend/ Ruisseler dans la terre noire », « Belle eau du lac » ou encore « l’eau (qui) blanchit/ légère au vent ».

Il s’agit alors de rameuter toute clarté, tout éclat, c’est celle, celui des voyages, la lumière des carnets que l’on tient, pour évincer la mort, l’abandon, l’exil. Les traces désordonnées du réel semblent échapper à quelque rangement, et toutefois le poète sait happer, « sans comprendre », « le peu de clarté/ qui tient à l’est ».

« Poursuivre une clarté », telle est la mission à laquelle s’invite le poète. Être l’hôte qui dispense des leçons de passé, à coups d’imparfait qui ressuscite les absents :

Sous le non-lieu du ciel, Annie Wallois (par Murielle Compère-Demarcy)

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Mercredi, 29 Septembre 2021. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED, Poésie

Sous le non-lieu du ciel, Annie Wallois, Éditions Henry, Coll. La Main aux Poètes, octobre 2020, 48 pages, 8 €

Le titre de cet opus de la poétesse Annie Wallois ouvre d’entrée la fenêtre sur le champ poétique, avec son prisme d’interprétations possibles, avec l’interpellation qu’il suscite, à la fois imagé et mystérieux. La poétesse évoque un « non-lieu du ciel », mais encore ? Ne serait-ce pas cet espace dépeuplé tel qu’il peut se refléter sur la margelle du « puits intérieur », à la disparition, la perte, l’absence d’êtres aimés ? Un non-lieu pour les autres, le focus au contraire (ici amorcé par les mots d’une poétesse) sur un lieu-dit douloureux pour qui est tristement touché. Tout devient d’une hypersensible résonance au surgissement dans nos vies d’un événement majeur personnel subi comme une effraction, toujours traumatisant (deuil, accident, dépression, etc.) et l’indifférence alentour paraît alors aussi violente qu’une indécence, une provocation (« Pendant qu’au ciel tournoient les vautours / Étrangers aux maux du monde »). Les nettoyeurs (fossoyeurs) ne sont pas les payeurs (proies, victimes) et ainsi va souvent le monde mais, nous souffle Annie Wallois, ne soyons pas pour autant fatalistes, pire, résignés :

L’Iris sauvage (The Wild Iris), Louise Glück (par Jacques Desrosiers)

Ecrit par Jacques Desrosiers , le Mardi, 28 Septembre 2021. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Poésie, Gallimard

L’Iris sauvage (The Wild Iris), Louise Glück, Gallimard Coll. Du monde entier, mars 2021, édition bilingue, trad. anglais (USA) Marie Olivier, 160 pages, 17 € Edition: Gallimard

 

En lisant L’Iris sauvage, on remarque vite que les mots qui se rapportent au je qui est présent dans presque tous les poèmes sont accordés parfois au féminin, parfois au masculin. C’est que l’identité de la voix qui s’exprime à la première personne varie au fil des pages. Dans les extraits suivants :

 

je me souviens

m’être allongée dans un champ

je suis prêt désormais

à vous imposer la clarté.

Je me suis réveillé ignorant dans une forêt

Voltaire et son lecteur, Essai sur la séduction littéraire, Sylvain Menant (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Mardi, 28 Septembre 2021. , dans Les Livres, Critiques, Essais, La Une Livres

Voltaire et son lecteur, Essai sur la séduction littéraire, Sylvain Menant, éditions Droz (Genève), avril 2021, 268 pages, 36,90 €

Comment devient-on non seulement l’écrivain le plus célèbre de son époque, mais encore celui qui, aux yeux de la postérité, paraît le mieux l’incarner (tout le monde comprend de quoi l’on parle lorsqu’on évoque « le siècle de Voltaire ») ? François-Marie Arouet ne provenait pas d’une lignée qui, à l’instar de la famille Bach, se serait de longue date distinguée dans les arts. Il dut sa renommée certes à son talent (bien qu’il ne fût pas le seul grand écrivain de son temps), mais également à une volonté implacable et continue de se hisser à la première place, d’accéder à un magistère intellectuel, à une royauté littéraire qui sera reconnue le 30 mars 1778, deux mois exactement avant sa mort. Et cette royauté ne fut elle-même pas exempte de paradoxes : en premier lieu, comment se fait-il que cet écrivain qui, au plan politique et esthétique, fut aussi conservateur qu’on pouvait l’être, professant de surcroît des opinions peu tolérantes (aussi longtemps qu’un candidat antérieur sérieux ne se sera pas présenté, il restera celui qui aura transformé le vieil antijudaïsme chrétien en antisémitisme racial et laïc – ce qui avait déjà heurté ses contemporains), en soit venu à incarner une période qu’on imagine dominée par les idées de liberté, de tolérance et de progrès ?