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Essais

Dix portraits d’écrivaines françaises rebelles en leur temps, A l’usage des esprits curieux, Mireille Delaunay (par Parme Ceriset)

Ecrit par Parme Ceriset , le Jeudi, 14 Octobre 2021. , dans Essais, Les Livres, Recensions, La Une Livres

Dix portraits d’écrivaines françaises rebelles en leur temps, A l’usage des esprits curieux, Mireille Delaunay, Éditions Complicités, septembre 2020, 101 pages, 10 €

Dans cet essai joliment illustré par des portraits de Flora Gressard, Mireille Delaunay rend hommage aux écrivaines françaises qui ont contribué par leurs œuvres, leurs combats, leurs tempéraments souvent libres et audacieux, à faire évoluer la condition féminine et le droit pour les femmes d’accéder à l’instruction (droit réclamé notamment par Christine de Pizan dans La Cité des dames), de recevoir une éducation analogue à celle des garçons (revendication présente dans les textes de Madame de Lambert).

D’autres, comme Louise Labé, ont revendiqué également le droit à la création littéraire. Chacune a lutté à sa façon pour sa propre émancipation et celle de ses contemporaines, en vivant pour certaines de leur plume (comme Christine de Pizan ou George Sand), en se prononçant ouvertement contre le mariage forcé (Contes de Madame d’Aulnoy, roman Indiana de George Sand), en ouvrant des salons mondains ou littéraires. Ces attitudes, révolutionnaires pour leur époque dans des sociétés patriarcales, étaient souvent risquées et c’est ainsi que la « Déclaration des droits de la femme et du citoyen » a conduit Olympe de Gouges à l’échafaud.

Insula Bartleby, Serge Airoldi (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Jeudi, 07 Octobre 2021. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Editions Louise Bottu

Insula Bartleby, Serge Airoldi, juillet 2021, 120 pages, 14 € Edition: Editions Louise Bottu

 

« Toute la vie n’est qu’île. Insula. Un univers en réduction, un microcosme en mer. L’ambivalence de croire à la fermeté du sol quand tout n’est qu’eau fugace tout autour. Encerclante. Dangereuse. Mortifère. Mertifère ».

« La révolte de Bartleby est une música callada ou bien une soledad sonora, dans quelque nuit obscure jamais apaisée où ne vient aucun détachement, aucune illumination. La révolte de Bartleby ne sert à rien qu’à sa fin même ».

Insula Bartleby est un vibrant et pétillant hommage au roman d’Herman Melville. Un hommage construit comme un puzzle littéraire, où le lecteur croise citations et réflexions, traductions, et impressions de l’auteur sur ce livre étrange, qu’il n’a plus qu’à assembler pour voir apparaître un heureux petit roman tout aussi étrange que celui qui l’a inspiré.

Confrontations avec l’histoire, François Hartog (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Mardi, 05 Octobre 2021. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Folio (Gallimard), Histoire

Confrontations avec l’histoire, François Hartog, mai 2021, 368 pages, 9,70 € Edition: Folio (Gallimard)

 

Dans le numéro 566 du trimestriel La Recherche, dont le thème est « Le Temps et l’Espace », l’historien François Hartog (1946) répond aux questions de Philippe Pajot – un historien dans « Le magazine de référence scientifique » ? Oui, tout à fait à sa place, en accord total avec le thème développé : le temps. En effet, celui-ci semble avoir définitivement cessé de couler depuis le début de la pandémie en cours, en particulier durant les différents confinements, incitant à un présentisme absolu – lié aussi à l’incapacité que semble avoir l’Homme de se projeter dans l’avenir de façon positive depuis quelques décennies. Pour faire bref, entre des machines qui ont accéléré tant les rapports économiques que les rapports humains, les seconds s’inféodant aux premiers, tous réduits à l’instantanéité (d’ailleurs, il est remarquable qu’un réseau social populaire porte un nom proclamant l’instantanéité comme valeur, Instagram), et l’effondrement de plus en plus envisageable d’un certain modèle civilisationnel, l’Homme s’est réfugié dans le présent, devenu le seul moment à discuter, à prendre en considération – et au passage l’histoire a cédé le pas à la mémoire, la tentative de compréhension du passé a cédé le pas à la commémoration, et l’inscription au Patrimoine Mondial de l’Humanité tel que décrété par l’Unesco est devenue la garante de l’existence.

Constellation du tigre, Yannick Le Marec (par Marie-Hélène Prouteau)

Ecrit par Marie-Hélène Prouteau , le Jeudi, 30 Septembre 2021. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Récits, Arléa

Constellation du tigre, Yannick Le Marec, mai 2021, 160 pages, 18 € Edition: Arléa

 

Voici un livre inclassable qui abolit les frontières des genres. Constellation du tigre tient du récit, de l’essai, fait abondamment usage de documents d’archives très variés. Cette exploration aux infinies ramifications sur « les tigres qui avaient un jour traversé Paris depuis les grandes chasses des empires coloniaux » procède d’une quête documentaire. Le point de départ en est la mort à Paris le 24 novembre 2017 de la tigresse Mévy échappée de sa cage et qui dut être abattue dans la rue par son dompteur.

Tout le livre se trouve placé sous le signe de la disparition. Dans les premières pages sensibles, Yannick Le Marec s’attache à l’échappée de l’animal puis aux circonstances de sa mort. L’empathie est là mais pas de grandiloquence. Il vient ensuite alerter le lecteur sur l’implacable disparition de cette espèce, cent mille voici un siècle, plus que trois mille cinq cents en liberté aujourd’hui. Yannick Le Marec figure le tigre comme l’animal qui disparaît.

Dictionnaire philosophique, André Comte-Sponville (par Marc Wetzel)

Ecrit par Marc Wetzel , le Jeudi, 30 Septembre 2021. , dans Essais, Les Livres, Les Chroniques, La Une CED

Dictionnaire philosophique, André Comte-Sponville, PUF Quadrige, août 2021 (3ème édition mise à jour), 1421 pages, 33 €

 

Un seul exemple de ton, contenu et style : au mot sinécure, p.1209.

« Je demande à un adolescent ce qu’il veut faire plus tard : “Je voudrais un métier bien payé, où y a pas à se prendre la tête”, me répond-il. C’était rêver d’une sinécure, peut-être sans connaître le mot, et aller au-devant de cruelles déceptions.

Qu’est-ce qu’une sinécure ? Une situation qui ne demande aucun soin (cura), n’impose aucun souci, voire aucune fatigue. Se dit surtout d’un emploi bien payé et n’exigeant que peu d’efforts. La chose est légitimement rare. On a le droit d’en rêver. Il serait injuste d’y prétendre ».

La lecture que nous propose ce Dictionnaire philosophique n’a peut-être qu’un but, précis et crucial : permettre à chacun, quand il pense (et pour qu’il ose penser !), de mieux faire saisir ce dont il parle pour mieux faire juger ce qu’il en dit. Ce que le mot fait alors comprendre guide au mieux ce que penser en fera. La bonne définition rend heureux le silence de penser, comme la leur l’indique :