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Critiques

Confession téméraire, suivi de Cher Saba et La Cité de Bobi, Anita Pittoni (par Nathalie de Courson)

Ecrit par Nathalie de Courson , le Mardi, 04 Juin 2019. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Poésie, Roman, La Baconnière

Confession téméraire, suivi de Cher Saba et La Cité de Bobi, mai 2019, trad. italien Marie Périer, Valérie Barranger, 209 pages, 20 € . Ecrivain(s): Anita Pittoni Edition: La Baconnière

 

« Je m’active, je m’agite, je me démène et me cache derrière des sentiments sublimes. Mais la vérité, c’est que je ne suis rien. (…) En moi rien n’est vrai, rien ne part d’un sentiment profond, tout provient d’un désir obscur, contraignant, impérieux de mouvement ».

Celle qui se fustige ainsi, c’est la brillante Anita Pittoni, tisserande d’art et créatrice du Zibaldone, maison d’édition de Trieste où affluèrent à partir de 1949 les plus grandes figures de la littérature italienne. On ne s’attardera pas ici sur cette célébrité trompeuse qui aurait laissé dans l’ombre une authentique écrivaine si d’autres éditeurs diligents n’y avaient mis bon ordre.

Les deux groupes de proses narratives et poétiques rassemblées sous le titre intimiste de Confession téméraire font apparaître une sensibilité inquiète, une imagination visionnaire et un grand souci d’élaboration littéraire sous l’égide de Nietzsche, cité en épigraphe : « Le plus remarquable est le caractère involontaire de l’image, de la métaphore (…) tout se présente comme l’expression la plus immédiate, la plus juste, la plus simple ».

Ainsi fut Auschwitz, Témoignages (1945-1986), Primo Levi (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Mardi, 04 Juin 2019. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Anthologie, Histoire, Les Belles Lettres

Ainsi fut Auschwitz, Témoignages (1945-1986), février 2019, texte établi par Fabio Levi et Domenico Scarpa, trad. Marc Lesage, 304 pages, 14,90 € . Ecrivain(s): Primo Levi Edition: Les Belles Lettres

 

Même s’il en a publié d’autres, Primo Levi demeure pour la postérité l’homme d’un seul livre, Si c’est un homme, auquel tous les autres semblent subordonnés, comme les branches à un tronc. Rien a priori ne destinait ce chimiste turinois à devenir écrivain. Rien, sauf une expérience indicible et l’impératif moral de porter témoignage au nom de ceux qui jamais ne revinrent. Il avait compris que le silence de chaque rescapé était un cadeau posthume offert au nazisme.

Recueil de textes brefs, écrits pour les journaux ou à la sollicitation des autorités soviétiques et de la justice, Ainsi fut Auschwitz est un livre composé en partie à quatre mains, avec un autre homme de science, ou plutôt de l’art (les médecins considèrent ainsi leur discipline), Leonardo De Benedetto. Le titre du premier texte, signé des deux hommes, « Rapport sur l’organisation hygiénique et sanitaire du camp de concentration pour juifs de Monowitz (Haute-Silésie) », publié dans la Minerva Medica, un hebdomadaire de praticiens bien connu de l’autre côté des Alpes, trahit une tension vers l’objectivité scientifique.

Sabena, Emmanuel Genvrin (par Patryck Froissart)

Ecrit par Patryck Froissart , le Mardi, 04 Juin 2019. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Roman, Gallimard

Sabena, mars 2019, 215 pages, 18,50 € . Ecrivain(s): Emmanuel Genvrin Edition: Gallimard

 

Emmanuel Genvrin, auteur réunionnais, inscrit les péripéties de cette saga haletante dans un itinéraire historique et géographique qui entraîne le lecteur d’une île à l’autre du sud de l’océan indien, Grande Comore, Anjouan, Mohéli, Mayotte, La Réunion, Madagascar, sur une période d’une quarantaine d’années.

La saga commence avec Faïza, Malgache d’origine Comorienne, qui, enfant, est exfiltrée vers les Comores après avoir échappé de justesse aux massacres perpétrés en 1976 à Majunga par des nationalistes malgaches à l’encontre de la nombreuse population comorienne que comptait cette capitale provinciale du nord-ouest de Madagascar. Les exilés ayant été transportés par la compagnie belge Sabena, chacun d’eux a alors été affublé de l’appellation éponyme.

Aux Comores, Faïza, alias Sabena, devenue une adolescente qui affole les hommes, a une liaison avec… le mercenaire Bob Denard, alors en position de force dans le pays. De cette relation naît une fille, Bibi, qui donnera une quinzaine d’années plus tard elle-même le jour à une fille, Echati, dite Chati.

Je m’enneige, Benoît Sourty (par Cathy Garcia)

Ecrit par Cathy Garcia , le Lundi, 03 Juin 2019. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Roman, Asphalte éditions

Je m’enneige, janvier 2019, 158 pages, 16 € . Ecrivain(s): Benoît Sourty Edition: Asphalte éditions

 

Elle est plutôt sombre la neige, dans ce court roman où le sort de trois des protagonistes principaux semble scellé dès le départ. Deux frères jumeaux, âgés de 25 ans, une mère en clinique. Autrefois brillante et belle infirmière, maintenant malade en état végétatif, absente.

« Une femme, mains serrées l’une contre l’autre, ânonne presque à voix basse et sans arrêt : “Varsovie Varsovie“ ».

C’est une maladie génétique et ses deux fils en ont hérité, ils finiront très probablement comme elle. L’un d’eux est le narrateur. Il vit encore avec son père alors que l’autre est parti à 20 ans. Chacun gère à sa façon cette dégénérescence programmée dans leur corps. Celui qui parle préfère ne pas y penser, oublie d’aller chez le neurologue pour faire des examens, porte des dreadlocks, fume des joints, beaucoup de joints, travaille un peu et quand il ne file pas un coup de main à son copain Marc qui vit de petits trafics, il prend la vie comme elle vient : entre potes à la terrasse du Grand Café, à boire des bières, puis chez l’un ou chez l’autre, parfois il couche avec une copine, parfois il passe des nuits dans la forêt et il va voir sa mère à la clinique.

Céline en Afrique, Pierre Giresse (par Augustin Talbourdel)

Ecrit par Augustin Talbourdel , le Lundi, 03 Juin 2019. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Biographie

Céline en Afrique, Du Lérot Editeur, février 2019, 184 pages, 30 euros. . Ecrivain(s): Pierre Giresse

 

 

« Quand la vie de Céline sera bien connue, elle paraîtra aussi étonnante que son œuvre », dixit Dominique de Roux (Céline et ses classiques, Marc Hanrez). Pour bien connaître la vie de Céline, il suffirait de se pencher sur ses romans ou de se rendre sur les lieux où il est passé. Pierre Giresse a fait les deux. Ainsi s’est-il rendu au Cameroun, sur les pas de Céline qui, après ses quelques mois au front et un premier séjour londonien, a vécu à Bikobimbo – que l’auteur du Voyage au bout de la nuit orthographie « Bikomimbo », volontairement ou non – pour une période de neuf mois, entre 1916 et 1917. En Afrique naît la passion de Louis Destouches pour la médecine – « de voir des médecins, je trouvais ça épatant ». En Afrique naît aussi une plume. À Bikobimbo, Louis Destouches est non seulement « médecin sans diplôme », selon l’expression de P. Giresse, mais aussi écrivain sans roman.