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Afrique

Les coqs cubains chantent à minuit, Tierno Monénembo

Ecrit par Theo Ananissoh , le Samedi, 14 Mars 2015. , dans Afrique, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Seuil

Les coqs cubains chantent à minuit, janvier 2015, 188 pages, 17 € . Ecrivain(s): Tierno Monénembo Edition: Seuil

Comment dire cela d’une manière simple et claire ? Il y a comme une double nature à ce onzième roman de l’écrivain guinéen Tierno Monénembo. C’est une lettre – pas un roman sous la forme imitée d’une lettre, non, c’est un récit romanesque pour ainsi dire classique, une longue narration qu’un Cubain nommé Ignacio Rodríguez Aponte, paumé et enfermé dans son île, adresse à un « ami » guinéen installé à Paris, du nom de Tierno Alfredo Diallovogui. Le récit est donc à la deuxième personne du singulier.

« Dans quel état seras-tu quand tu auras fini de lire cette lettre ? Prostré, hébété, hystérique ? Non, non… Plutôt muet, plutôt absent, perdu dans des pensées profondes et graves ; hiératique, marmoréen (une vraie statue maya) alors qu’un feu intérieur et vorace te dévore, viscères et âme. Granit angoissé, va ! »

De bout en bout, nous entendons la voix d’Ignacio et le silence de Tierno, et imaginons celui-ci tête penchée sur ce qu’il lit. A coup sûr, une lecture attentive, prenante, pensive car c’est rien de moins que l’élucidation du mystère qui recouvre les toutes premières années (décisives, comme on sait)  de sa vie et du sort de sa mère évaporée alors qu’il n’avait que cinq ans qui lui est livrée dans ces près de deux cents pages.

Mes bifurcations, André Brink

Ecrit par Victoire NGuyen , le Mardi, 03 Mars 2015. , dans Afrique, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Biographie, Récits, Babel (Actes Sud)

Mes bifurcations, septembre 2014, traduit de l’Anglais (Afrique du Sud) par Bernard Turle, 617 pages, 11,50 € . Ecrivain(s): André Brink Edition: Babel (Actes Sud)

 

Lignes de vie

Mes bifurcations est un récit fleuve que l’on peut qualifier d’autobiographie. André Brink évoque ses années d’enfance en Afrique du Sud. Puis il relate les premiers éveils de sa conscience face à la question raciale durant sa période estudiantine. Mais son récit souligne surtout l’impact de son voyage à Paris à la fin des années 1960. C’est en terre étrangère qu’il prend réellement conscience de la gravité tant morale qu’éthique du concept de l’Apartheid. Poussé par ses amis, Paris a été une catharsis pour notre écrivain. Ainsi confesse-t-il :

« Ils me poussèrent à revenir sur des sujets avec lesquels mon séjour à Paris m’avait familiarisé mais que je n’avais pas approfondis. Mes nouvelles fréquentations me permirent, pour la première fois dans ma vie, de me lier d’amitié avec des Noirs ».

Philida, André Brink

Ecrit par Martine L. Petauton , le Lundi, 16 Février 2015. , dans Afrique, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Actes Sud

Philida, septembre 2014, traduit de l’anglais (Afrique du sud) par Bernard Turle, 371 pages, 23 € . Ecrivain(s): André Brink Edition: Actes Sud

 

Toute notre jeunesse, nos engagements, nos espoirs ; on est tous dans les livres d'André Brink, qui vient de refermer la porte...

 

André Brink – plus quelques autres ! – c’est pour nous tous, l’apartheid, ses sombres pages, et, un jour, la sortie de l’enfer. Mais, avant l’apartheid, nous dit Brink dans ce livre, il y a eu dans la lumière des terres, qui aujourd’hui s’appellent l’Afrique du Sud, l’esclavage. Et dans cet esclavage – fascinantes poupées gigognes – une Philida qui fut – mi-XIXème autant dire hier – l’ancêtre de l’écrivain qui retrouve avec elle comme un chaînon manquant de sa longue histoire.

Tous les livres d’André Brink sont littérature d’exception ; cris au-delà des malheurs, pour réunir les hommes. Celui-ci, particulièrement : tous les talents de l’écrivain, dans un des plus beaux portraits de femme que porte la littérature, et le vrai de l’Histoire.

La cavalcade africaine, Mandy Retzlaff

Ecrit par Catherine Dutigny/Elsa , le Vendredi, 24 Octobre 2014. , dans Afrique, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Jean-Claude Lattès

La cavalcade africaine, traduit de l’anglais par Perrine Chambon, septembre 2014, 280 pages, 22,00 € . Ecrivain(s): Mandy Retzlaff Edition: Jean-Claude Lattès

 

Patrick Retzlaff, arrière-petit-fils du baron Moritz Hermann von Münchausen propriétaire d’une remarquable écurie, est installé depuis 1965 en Rhodésie, un pays qu’il aime à la folie et où, comme son propre père avant lui, son objectif est d’exploiter une grande ferme dans ce que l’on a surnommé « le grenier à blé de l’Afrique ». Mais sa véritable passion, comme un fil tendu entre les générations, est l’élevage et le dressage de chevaux. Sa future femme ne pourra être qu’une personne partageant ses goûts et c’est naturellement que quelques années plus tard, lui, Mandy son épouse, ainsi que leurs trois enfants, emménageront en 1992 à Crofton, dans la ferme de River Ranch avec leurs quatre chevaux, le tout au milieu du bush d’un pays rebaptisé le Zimbabwe. Un domaine paradisiaque (le terme revient souvent sous la plume de Mandy Retzlaff) qu’ils souhaitent un jour transmettre à leurs enfants.

« Défricher le bush pour y bâtir une ferme, c’est un peu comme monter un cheval : vous ne pouvez pas le forcer à vous obéir, vous ne pouvez que lui demander. Comme le cheval, la terre a son caractère bien à elle. Elle peut être obstinée. Elle peut être rebelle. Mais elle peut également vous apporter de grandes joies et vous dévoiler ses secrets si vous apprenez à collaborer avec elle » (p.41).

Des voix parmi les ombres, Karel Schoeman

Ecrit par Victoire NGuyen , le Jeudi, 28 Août 2014. , dans Afrique, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, La rentrée littéraire, Phébus

Des voix parmi les ombres, traduit de l’afrikaans par Pierre-Marie Finkelstein, aout 2014, 311 p. 22 € . Ecrivain(s): Karel Schoeman Edition: Phébus

 

Réminiscence

Nous sommes à l’époque actuelle, quelque part en Afrique du Sud au moment où débute le roman. Sous un soleil de plomb, un photographe et un écrivain-explorateur arpentent le pays en voiture à la recherche d’une ville perdue du nom de Fouriesfontein. Le but de nos deux personnages est de réaliser des photographies pour la constitution d’un livre portant sur les événements de 1901 où les Boers ont occupé la ville et ont massacré un métis du nom d’Adam Balie.

Ce que le lecteur sait, c’est qu’il s’agit d’une ville florissante à la fin du 19° siècle. Elle a été peuplée de colons anglais et hollandais. Fouriesfontein était une ville rattachée au Cap et son nom provient d’une puissante famille, les Fourie :

« En 1883, lorsque l’on décida de fonder une paroisse et de construire un temple, Herklaas Fourie avait suffisamment d’influence pour obtenir que cela se fasse sur ses terres, et il était suffisamment fortuné pour prendre à sa charge l’érection du modeste bâtiment au toit de chaume. Il eut été difficile, dans ces conditions, de donner un autre nom que le sien au village que l’on aménagea tout autour du temple, aussi l’appela-t-on Fouriesfontein, la Source-de-Fourie (…) ».