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La conversion, James Baldwin

Ecrit par Grégoire Meschia , le Jeudi, 23 Novembre 2017. , dans USA, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Rivages

La conversion, octobre 2017, trad. anglais (USA) Michèle Albaret-Maatsch, 300 pages, 20 € . Ecrivain(s): James Baldwin Edition: Rivages

 

Premier roman publié par James Baldwin en 1952, La Conversion raconte l’examen de conscience de John, le jour de ses 14 ans, en attente d’une révélation mystique.

C’est à Harlem et dans la crasse que vit la famille Grimes. Même si Elizabeth s’acharne à tenir propre un taudis dont la poussière ne s’atténue jamais et que son fils, John, l’aide de bon cœur, la tâche s’avère impossible. La marque indélébile qui frappe ce foyer est celle du péché. Ses occupant·e·s sont Noires. Et, dans les Etats-Unis, même au Nord, dans les années 1950, être Noir est une faute qui interdit de vivre convenablement et sereinement. La société perçoit les personnes noires comme crasseuses. La couleur de peau souille les corps et les avilit. Le jeune John commence à prendre conscience de la société raciste dans laquelle il vit et de la place restreinte qui lui est réservée. C’est pour cela que sa décision le jour des ses 14 ans revêt une dimension si cruciale.

L’Obscure Clarté de l’air, David Vann

Ecrit par Anne Morin , le Mercredi, 22 Novembre 2017. , dans USA, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Gallmeister

L’Obscure Clarté de l’air, octobre 2017, trad. américain Laura Derajinski, 259 pages, 23 € . Ecrivain(s): David Vann Edition: Gallmeister

 

Médée, qui se rêve en roi et qui se venge en femme blessée, Médée qui se veut sorcière et qui n’est que magicienne, Médée sans ancêtres, éternellement sans descendance. Médée qui donne, ou croit donner, et qui reprend, ou croit reprendre. Médée qui se trompe elle-même, sur elle-même, du début à la fin.

Une écriture pressée, dense, saccadée, hachée, convoquée par l’urgence pour écrire un personnage en fuite, et qui regarde sans cesse derrière elle. Sans cesse en avant, devancée, et sans cesse retenue. Goule, louve, en quête de puissance et de liberté : « Si elle pouvait revenir en arrière, elle le ferait. Elle redonnerait à son frère sa forme entière, lui insufflerait la vie, et obéirait à son père. Mais elle sait que s’ils parviennent à s’échapper, ce regret s’effacera aussitôt » (p.80).

Dès le début, l’ambivalence de sa relation à Jason, pont entre la Colchide et la liberté, trait d’union entre deux mondes, elle-même ne sachant que faire de ses sentiments à son égard, tour à tour attirée et repoussée : « C’est bien plus que l’amour qui l’a poussée à quitter la Colchide, elle s’en rend compte. Elle bâtirait son propre royaume. Ce qu’elle prenait pour de l’amour, une forme de folie, c’était aussi le frisson de la liberté » (p.65).

Et au milieu coule une rivière, Norman MacLean

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 16 Novembre 2017. , dans USA, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Rivages

Et au milieu coule une rivière, novembre 2017, trad. américain Marie-Claire Pasquier, 174 pages, 19 € . Ecrivain(s): Norman MacLean Edition: Rivages

 

La rivière du sixième jour, l’étrange et beau titre original français de ce roman mythique, rend bien compte d’une dimension essentielle de l’œuvre, la dimension biblique. Elle traverse ce roman de part en part, dès l’incipit, inoubliable, qu’il faut citer en intégralité :

« Dans notre famille, nous ne faisions pas clairement la distinction entre la religion et la pêche à la mouche. Nous habitions dans l’ouest du Montana, au confluent des grandes rivières à truites, et notre père, qui était pasteur presbytérien, était aussi un pêcheur à la mouche qui montait lui-même ses mouches et apprenait aux autres à monter les leurs. Il nous avait expliqué à mon frère et moi, que les disciples de Jésus étaient tous des pêcheurs, nous laissant entendre – ce dont nous étions persuadés tous les deux – que les meilleurs pêcheurs du Lac de Tibériade étaient tous des pêcheurs à la mouche, et que Jean, le disciple préféré, pêchait à la mouche sèche ».

Pic, Jack Kerouac

Ecrit par Philippe Leuckx , le Vendredi, 27 Octobre 2017. , dans USA, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, La Table Ronde - La Petite Vermillon

Pic, mai 2017, trad. anglais (USA) Christophe Mercier, 144 pages, 5,90 € . Ecrivain(s): Jack Kerouac Edition: La Table Ronde - La Petite Vermillon

 

Ce dernier et bref roman de l’auteur célébré de la Beat Generation, publié la première fois en anglais en 1971, trouve ici, grâce à la traduction de Christophe Mercier, une nouvelle chance de se faire connaître. Le titre, certes, est loin de l’importance de Sur la route, Le rouleau original, ou de Big Sur. On retrouve néanmoins sous la plume de Kerouac quelques obsessions musicales ou thématiques (la route, la ferveur pour les déclassés, l’ambiance de villes nocturnes…).

L’histoire de ces deux frères, Slim, le grand, amateur de jazz et musicien lui-même, et Pic(torial Review Jackson), entre Caroline du nord qu’ils quittent après la mort de Grand P’pa et un passage éclair chez Tante Gastonia et New-York, prend très vite l’allure et le rythme d’un road movie, que la langue d’un enfant d’une dizaine d’années relate avec ses déformations, ses raccourcis. Pic s’émerveille de ce grand frère prêt à lui faire découvrir la très grande ville, New-York, sa petite amie Sheila.

L’Enfant de la fièvre, Shelby Foote

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 19 Octobre 2017. , dans USA, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Nouvelles, Gallimard

L’Enfant de la fièvre (Jordan County), traduit de l’américain par Maurice Coindreau et Claude Richard, 361 p. 10 € . Ecrivain(s): Shelby Foote Edition: Gallimard

 

Dans ces nouvelles de Shelby Foote – autant de pépites – on trouve deux textes qui constituent de véritables courts romans : Crescendo final et L’enfant de la Fièvre (qui donne son titre à ce recueil). Autant le dire dès l’abord, on a en mains d’authentiques joyaux littéraires, qui viennent se placer au plus haut dans la littérature sudiste.

Avec Crescendo final, on retrouve le Sud pauvre et douloureux de « tourbillon »*. Comme il le fait souvent, Foote commence par ce qui est fréquemment la fin chez d’autres auteurs. Il décale ainsi toutes les interrogations du lecteur sur ce qui, chez les personnages, surdétermine les actes et les destinées. Le pauvre héros attend dans le couloir de la mort son exécution. Le récit sera donc la trajectoire qui l’a mené là, le destin inexorable dans lequel rien n’aura pu le sauver. Ni son talent, ni son succès, ni l’amour inquiet de sa mère.