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Articles taggés avec: Leuckx Philippe

Livrés aux géographes, Jacques Vandenschrick, (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Vendredi, 22 Novembre 2019. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Poésie, Cheyne Editeur

Livrés aux géographes, Jacques Vandenschrick, 2018, 64 pages, 17 € Edition: Cheyne Editeur

 

Jacques Vandenschrick, né en 1943, signe son onzième livre de poésie. Romaniste, italianiste, chroniqueur de longue date à la Revue nouvelle, critique littéraire, il est le seul poète belge d’importance à n’avoir jamais été publié en Belgique, puisque toute l’œuvre a été publiée chez Cheyne, et ce, depuis Vers l’élégie obscure en 1986. Prix triennal de poésie en 1998, il a également reçu d’autres prix importants : le René-Lyr, le Claude-Sernet, le Louise-Labé. Ses titres évoquent élégie, nostalgie de la montagne, mélancolie foncière, dans le droit fil de la poésie d’un Rilke ou d’un Jaccottet.

Mais il y a chez ce Belge une densité rare d’aire poétique, un lexique particulier, un univers forcément identifiable : le gabarit de 40 poèmes pour chaque livre ; les lexèmes des territoires enneigés, entre bergerie et hauts sommets ; des morts proches gravées loin dans le vers. Voilà sans doute – depuis le décès de Schmitz, et avant, de Falaise, et de Kinet – notre plus grand poète, mais si longtemps méconnu à cause justement d’un ancrage éditorial qui fait fi de la Belgique.

Le goût de la Méditerranée, collectif (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Lundi, 28 Octobre 2019. , dans La Une Livres, Anthologie, Les Livres, Critiques, Mercure de France

Le goût de la Méditerranée, présenté par Jacques Barozzi, juin 2019, 112 pages, 8 € Edition: Mercure de France

 

Qui ne s’est nourri de la culture née des bords de la Méditerranée ? D’Homère à Elena Ferrante, en passant par Paul Morand, Daniel Rondeau, tant d’autres, Barozzi nous invite à refaire ces voyages incessants d’un bord l’autre, d’une rive l’autre, d’une langue l’autre. Sans elle, que serions-nous, Européens ?

Dans une préface qui place les enjeux très haut, l’auteur dit ces « racines mémorielles », son « rayonnement culturel », nous plongeant dans les ressorts d’un passé si fécond qu’il ne peut manquer de rejaillir sans cesse, puisqu’y est né l’art de « conter » des plus grands. Le bleu des flots, le bain des langues, le commerce, les relations, les voyages ont fait le reste.

Le spécialiste de cette zone magique de civilisation, Fernand Braudel, en étudie « l’espace et l’histoire » : pour lui, la Méditerranée est « un très vieux carrefour », source de nombreux « étonnements » avec les fruits de ses bords et de ses climats.

Plateau, Franck Bouysse (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Jeudi, 24 Octobre 2019. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman, La Manufacture de livres

Plateau, 304 pages, 18,90 € . Ecrivain(s): Franck Bouysse Edition: La Manufacture de livres

 

Bouysse, que plusieurs romans ont mis à l’honneur ces dernières années, n’est pas seulement un fabuleux raconteur d’histoires (dans le droit fil de certains Américains doués comme Vann), mais aussi et surtout un écrivain styliste qui maîtrise ses instruments et qui rejoindrait, si ce n’est pas minimiser l’importance de l’un et de l’autre, Serge Joncour, par cette manière sensible de coudre le réel à force de mots forts et d’un ton à nul autre pareil.

Plateau réussit à emporter la mise par la description insigne d’un univers sensible, cette ruralité à fleur de peau qui semble sourdre de la moindre phrase, faite de tâches triviales, d’attente, de bêtes que l’on soigne et de personnages remisés dans leur passé et qui mettent tout leur saoul à en découdre avec les aléas, les mystères, la vie.

Prenez Virgile, paysan au long cours, qui n’a pas eu un lien facile avec le métier. Prenez Georges, dont les parents sont morts tôt, et qui a été recueilli par son oncle Virgile et sa tante Judith, peu à peu perdue dans son monde à cause de l’âge.

Ô pruniers en fleur, Ryôkan (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Jeudi, 17 Octobre 2019. , dans La Une Livres, Japon, Les Livres, Critiques, Folio (Gallimard), Poésie

Ô pruniers en fleur, Ryôkan, Folio Sagesses, septembre 2019, trad. japonais Alain-Louis Colas, 112 pages, 3,50 € Edition: Folio (Gallimard)

 

Quatre-vingt-dix-sept textes poétiques illustrent à l’envi le grand talent du moine poète Ryôkan, né en 1758 et décédé en 1831.

Le plus souvent développée en quintils saisissants de justesse et d’élégance, la poésie de Ryôkan trace de la nature traversée un portrait tout en nuances où les fragrances, les beautés, ainsi que les réalités les plus triviales, dessinent une relation inspirée à la beauté des paysages, entre les « pluies d’automne » et « les journées où les corbeaux/ du bois sont sans voix ».

Ici, la voix restitue « nuées », « neige », « beaux jours », dans un souci constant de description au plus juste de l’objet. Ici, se perçoit toujours la saison, puisque l’écriture s’arrime elle comme le sang au corps.

Les larmes de Vesta, Michel Joiret (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Jeudi, 10 Octobre 2019. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman

Les larmes de Vesta, Michel Joiret, MEO éditions, septembre 2019, 152 pages, 15 €

 

En vingt-trois chapitres brefs, le romancier, épris d’histoire, nous conte deux destins, intimement liés à l’histoire de Rome.

Ce qu’il arrive à Lucius, d’une bonne famille romaine, installé à Pompéi, relève d’un attachement à des lieux et à des personnes. Sa mère, Luna, son oncle Flavius, l’ami, Pline le Jeune, sont autant de figures qui le révèlent à lui-même, et partant, au lecteur. Voilà un Romain qui ne se contente pas de vivre à la manière patricienne, qui ne se contente pas de céder aux charmes d’une vie publique et privée aisée, facile. Les événements – l’enfouissement de l’oncle à cause de l’éruption, la mort de sa mère – font tout un travail de deuil et de vie, pour mieux saisir le monde tout autour.

Parallèlement à ce parcours, ce que vit Luc, professeur de latin dans un athénée bruxellois, semble un appel à l’histoire, cette Rome dont il assiège les petites cervelles de ses étudiants par autant de rappels et d’anecdotes. Mais Luc va mal, il le sent, tout lui échappe et même le recours à l’histoire lui semble un leurre. Même sa quête du passé, au travers de carnets qu’il dépouille, lui paraît insaisissable, fuyante.