Identification

Recensions

Portrait du baron d’Handrax, Bernard Quiriny (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Mardi, 01 Février 2022. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Rivages

Portrait du baron d’Handrax, Bernard Quiriny, janvier 2022, 170 pages, 17 € Edition: Rivages

 

Le baron Archibald d’Handrax, petit-neveu d’un peintre local oublié, Henri Mouquin d’Handrax (1896-1960), a-t-il existé ? La question se pose en ces termes, au passé, puisqu’au lendemain de sa mort, ses proches reçurent une carte postale qu’il avait écrite : « Je suis parti en voyage pour longtemps, vers un pays très lointain. Pour le moment, je suis en route ; il fait plutôt sombre, si bien que je n’ai pas tellement de paysages à vous décrire ». Cette interrogation est d’importance secondaire (Lichtenberg a bien donné, grâce au langage, une forme de réalité à un objet qui n’existe pas). Si Archibald d’Handrax avait été réel, comme il aurait eu le droit de l’être, et que Bernard Quiriny l’avait rencontré, il aurait gîté dans l’Allier, un département qu’on se contente en général de traverser sans vraiment s’y attarder et sans prendre le temps d’y admirer ce qui mérite de l’être. Peu de gens auraient par exemple l’idée de s’offrir un séjour à Montluçon, alors qu’il s’agit d’une belle cité, qu’on peut arpenter en toute quiétude, sans être incommodé par les hordes de touristes. À un étranger qui voudrait se faire une idée de la France, de sa nature séculaire, de ses rythmes profonds, on ne pourrait que conseiller de visiter l’Allier, qui vit en outre naître plusieurs écrivains, parmi lesquels Valery Larbaud, à qui le baron d’Handrax – qu’il ait ou non existé – emprunte plus d’un trait (petit clin d’œil, p.31).

Le médecin d’Avignon, Isabelle Pouchin (par François Baillon)

Ecrit par François Baillon , le Lundi, 31 Janvier 2022. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Roman

Le médecin d’Avignon, Isabelle Pouchin, éd. Gaspard Nocturne, mars 2021, 180 pages, 19 €

 

Le voyage d’Hugues Rivehaute, le « médecin d’Avignon », nous emmène en 1349 (et un peu au-delà), dans une France que la peste ravage, où les morts s’accumulent comme autant de corps indifférenciés, où l’atmosphère putride et le désespoir ont achevé de désarmer le personnage principal. « Vous n’en avez pas guéri un, pas un seul » (p.12). Abandonnant son engagement de médecin et son collègue Guy de Chauliac, Hugues a pour seul but de gagner le nord : « un homme failli ne manque à personne » (p.5). L’itinérance qui se fait alors par les pas se fait aussi par les pensées et les rêves : l’on découvre la rudesse des épreuves passées, telle que la perte de sa femme et de ses enfants qu’il a été incapable de sauver. Cependant, son chemin le conduit à rencontrer la bonté exceptionnelle d’une vieille femme isolée, Jeanne, qui après plusieurs semaines parviendra à le remettre sur pied ; un compagnon qui ne le lâchera plus, le chien Pelote ; la beauté ineffable de la nature et son découlement perpétuel ; ses bêtes qui semblent observer ironiquement le spectacle dramatique des hommes, victimes esseulées d’un fléau horrifiant.

Dans l’herbe, Victor Malzac (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Vendredi, 28 Janvier 2022. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Poésie, Cheyne Editeur

Dans l’herbe, Victor Malzac, décembre 2021, 64 pages, 16 € Edition: Cheyne Editeur

 

Ce second livre de Victor Malzac vient de recevoir le Prix de la Vocation 2021.

En quatre longs poèmes, le livre déploie une quête, une soif, une volonté de comprendre son corps, son âme, ses proches. On est dans le cœur-corps d’un jeune homme qui n’en finit plus de découvrir ses plaies, ses désirs, ses envies « dans un parc », « dans l’herbe ».

Il a des compagnons de fortune (ou d’infortune), des parents, il n’a pas d’âge, il multiplie les saccades de langage, il s’interrompt, il gère sa fatigue, ses pulsions, il ne gère rien du tout et sa langue beugue, beugle, gémit, ardente, improvisée, syncopée en diable.

C’est la langue juvénile et si mature d’un jeune poète flamboyant, qui flambe sa jeunesse à coups de vers nouveaux.

Cette langue de vrai poète – jaculatoire et forte – mime tous les assauts d’un cœur-corps qui se découvre, qui a la faim de tout, qui mange et veut manger, et veut « boire la mousse de mon nombril ».

D’une île à l’autre, Patrick Renou (par Patrick Devaux)

Ecrit par Patrick Devaux , le Jeudi, 27 Janvier 2022. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Roman, Presses de la Cité

D’une île à l’autre, Patrick Renou, août 2021, 320 pages, 20 € Edition: Presses de la Cité

 

Tout est vrai dans ce livre pourtant un roman. Dans sa préface l’historienne Arlette Farge parle d’un style tendre et persuasif.

J’ajouterai qu’il est sincère et efficace à plus d’un titre.

Tout d’abord, le romancier est un travailleur acharné de détails et de documentations diverses à partir du moment où le hasard lui met entre les mains, chez un bouquiniste, un livre ancien sur les paquebots et qui lui révèle, à bord, la présence d’une passagère clandestine donnant naissance, en pleine mer, à une petite fille. Ensuite il cherchera à savoir et construira, autour de la vie d’un couple et de l’enfant à naître, un roman profondément humain et attachant.

Passagère clandestine sur « L’Ile de France », Milena quitte la Lettonie avec New York pour objectif.

Enceinte, sur le bateau, initialement, personne ne la comprend : « Elle raccrocha, regarda Milena comme la Sainte Vierge “Mais d’où tu viens ?”. Toujours est-il que sainte, célibataire ou fille de joie, Jeanne la couvrait de soins ».

Capter l’indicible, Silvaine Arabo (par Parme Ceriset)

Ecrit par Parme Ceriset , le Mercredi, 26 Janvier 2022. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Poésie

Capter l’indicible, Silvaine Arabo, éditions Rafael de Surtis, septembre 2021, 76 pages, 15 €

 

Ce recueil est une quête, une aventure exploratoire dont la visée est de déchiffrer en transparence la grande énigme du monde, « l’arcane mystérieux » qui se cache sous le voile des apparences, afin de « reconquérir en somme le privilège d’être ».

Cette mission s’inscrit dans la continuité de la spiritualité ancestrale, de « toutes ces mains filant le destin du silence / D’âge en âge / De blancheur en blancheur ».

L’auteure incite le lecteur à s’engager lui aussi sur ce chemin : « L’univers est en toi / Entends, ami, entends / Le chant suprême des Transparents ! ».

Pour l’accompagner, elle, poète, « Elle – tisseuse », l’aide à ouvrir « les vannes de l’indicible », à percevoir ce « grand souffle arrimé au métier transparent », ce « quelque chose en l’être qui se détend / qui vibre, enfin, dans l’univers du reflet ».

Elle lui délivre quelques indices, points de repères qui éclaireront son parcours : ainsi, il reconnaîtra