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Métailié

 

Les Éditions Métailié ont été fondées en 1979, avec un capital permettant de financer la fabrication de trois livres. Les dix premières années ont été pour Anne Marie Métailié, sa fondatrice, des années de formation sur le tas et de construction des structures d'un catalogue qui, d'abord orienté vers les sciences sociales avec les collections Traversées, dirigée par Pascal Dibie, et Leçons de Choses, dirigée par Michael Pollak et Luc Boltanski, s'est tourné progressivement vers la littérature étrangère avec pour commencer le Brésil, Machado de Assis et Carlos Drummond de Andrade, et le Portugal avec Antonio Lobo Antunes, José Saramago et Lídia Jorge.

Au terme de ces années d'apprentissage, l'entrée de la maison dans le système de diffusion du Seuil et la publication d'un inconnu dont le bouche à oreille fera un best-seller - Luis Sepúlveda, Le Vieux qui lisait des romans d'amour - créent les conditions d'une meilleure présence en librairie et une stabilisation de la maison qui lui permet de s'ouvrir à de nouvelles découvertes et de nouveaux paris.

 

Le dernier Lapon, Olivier Truc

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 25 Octobre 2012. , dans Métailié, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Roman

Le dernier Lapon. septembre 2012. 453 p. 22 € . Ecrivain(s): Olivier Truc Edition: Métailié

Pour le moins, on peut affirmer que ce livre propose au lecteur un dépaysement radical. Imaginez : nous sommes dans la nuit polaire, en Laponie, au cœur du pays des éleveurs de rennes, par des températures oscillant entre -20 et -30 degrés ! On est plus exactement au moment où le jour va faire sa réapparition, très attendue on l’imagine par les populations locales. Mais cette renaissance se fait chichement, par petites minutes quotidiennes de clarté.

C’est dans ce cadre hostile et fascinant qu’Olivier Truc situe son histoire policière. Car c’est bien d’un roman noir qu’il s’agit. Deux événements en sont à l’origine : la disparition dans un musée local d’un ancien tambour Sami (peuplade indigène de Laponie, Suède du nord) et l’assassinat d’un gardien de rennes, Mattis, également Sami. Dans une Suède du septentrion, encore sujette au mépris raciste de ses populations originelles – il existe même une sorte de parti d’extrême-droite raciste appelé « parti de progrès » - la question se pose d’entrée : forfaits raciaux ?

Deux policiers (un homme et une femme) mènent l’enquête. Lui, c’est Klemet, un indigène sami justement. Elle, c’est une jeune femme, policière de fraîche date, Nina. Ils forment un tandem attachant et sympathique. Klemet, vieillissant, désabusé par une vie médiocre, bougon mais au coeur d’or. Nina, jolie, intelligente et d’un sérieux à toute épreuve.

Pigeon vole, Melinda Nadj Abonji

Ecrit par Stéphane Bret , le Mercredi, 03 Octobre 2012. , dans Métailié, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Langue allemande, Roman, La rentrée littéraire

Pigeon vole, trad. Allemand Françoise Toraille. août 2012, 238 p. 20 € . Ecrivain(s): Melinda Nadj Abonji Edition: Métailié

 

Pour paraphraser le titre d’un essai récent, nous pourrions nous demander, à l’issue de la lecture de l’ouvrage de Melinda Nadj Abonji, ce qu’est une intégration réussie pour des immigrés.

C’est d’abord, nous dit l’auteure, encore et toujours une immense souffrance, une déchirure toujours douloureuse. Certes, l’intensité de cette douleur est variable, elle n’en est pas moins une constante : c’est le cas de la famille Kocsis, dont les parents Rosza et Miklos quittent la Voïvodine pour la Suisse alémanique, en compagnie de leurs enfants Ildiko et Nomi.

La province dont ils sont originaires est une contrée d’expression magyare, rattachée à la République populaire de Yougoslavie, puis à la Serbie, après l’éclatement de la Yougoslavie.

L’auteure décrit ainsi les tests et multiples pièges dont un immigrant candidat à une future citoyenneté suisse doit sortir vainqueur ; tests sur la langue allemande, sur l’histoire suisse, l’observance des règles de propreté, dont ce pays est si fier… Elle dépeint magnifiquement l’angoisse générée par la réponse des autorités du pays d’accueil :

Histoire d'une mouette et du chat qui lui apprit à voler, Luis Sepulveda

Ecrit par Cathy Garcia , le Lundi, 17 Septembre 2012. , dans Métailié, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Jeunesse, Seuil Jeunesse

Histoire d’une mouette et du chat qui lui apprit à voler, illustré par Miles Hyman, Seuil Jeunesse & Métailié, 23 août 2012. 112 p. 25 € . Ecrivain(s): Luis Sepulveda Edition: Seuil Jeunesse

Encore un très beau collector en série limitée, pour fêter les 20 ans de Seuil Jeunesse, en collaboration avec les Éditions Métailié qui ont publié Histoire d’une mouette et du chat qui lui apprit à voler, pour la première fois, en 1996. On connaît le talent de conteur de Sepúlveda, et quand ce talent est mis au service des enfants, fidèle à lui-même, cela donne une fable intelligente, écologiste, drôle et poétique qui plaît autant aux petits qu’aux grands. On y parle d’amitié, de courage, de confiance, d’entraide et de l’amour de l’autre dans sa différence.

Avec une couverture en toile sérigraphiée et un tiré à part, le tout est présenté dans une pochette transparente fermée par un autocollant signé Muzo. Un écrin à la hauteur, pour cette nouvelle édition grand format, avec de très belles illustrations de Miles Hyman.

Zorbas, est un bon gros chat noir heureux, qui a une belle vie, depuis qu’un jeune garçon l’a sauvé, tout petit, du bec d’un pélican pas très futé. Quand son jeune maître s’apprête à partir en vacances pour deux mois, Zorbas sait qu’il va pouvoir lui aussi profiter d’un temps rien que pour lui, car tout est parfaitement organisé pour son confort : logis, nourriture, et la liberté d’aller et venir comme bon lui semble.

La muraille de lave, Arnaldur Indridason

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 21 Juin 2012. , dans Métailié, Les Livres, Recensions, Polars, La Une Livres, Pays nordiques, Roman

La muraille de lave. Métailié noir. Mai 2012. 319 p. 19,50 € . Ecrivain(s): Arnaldur Indridason Edition: Métailié

La maîtrise d’Indridason dans ce genre qu’il a beaucoup contribué à élever au rang d’art absolu – le roman noir venu du Nord – est époustouflante. On le sait depuis des années. Le point d’orgue de cette virtuosité a sûrement été le « Betty » d’octobre 2011. Le maître islandais nous y prenait par la main, dans un blues familier qui nous berçait de certitudes, avant de nous piéger en plein milieu du gué dans un jeu de miroir où on ne trouvait plus soudain nos repères. (Recension de "Betty" par Léon-Marc Levy)

Dans ce nouvel opus, Indridason remet ça. Sur des registres très différents bien sûr.

Erlendur, son héros triste et débonnaire est parti. En « vacances » sur les lieux de son enfance, voyage entouré de mystère. En son absence, son collègue, Sigurdur Oli, se retrouve en charge d’une affaire explosive, mêlant le destin d’un homme brisé par les viols incestueux qu’il a subis dans son enfance, le meurtre de la femme d’un couple échangiste qui tentait de faire chanter une de leurs rencontres, la mort mystérieuse d’un homme d’affaires emporté par le rêve « mondialiste » et doré de l’Islande nouvelle. Et maître Indridason nous épate ! Les trois intrigues s’entrecroisent dans une construction parfaite, haletante, noire comme l’hiver. Comme ce jour sombre où un homme a disparu sur la « Svörtuloft », falaise de lave au pied de laquelle la mer s’écrase en des tourbillons effrayants. La muraille de lave.

Dernières nouvelles du sud, Luis Sepulveda et Daniel Mordzinski

Ecrit par Cathy Garcia , le Jeudi, 24 Mai 2012. , dans Métailié, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Récits

Dernières nouvelles du Sud, Avril 2012, 160 pages, 19 € . Ecrivain(s): Luis Sepulveda et Daniel Mordzinski Edition: Métailié

1996. Le romancier Luis Sepúlveda et son ami photographe, Daniel Mordzinski, partent pour une longue virée sans but précis, ni contrainte de temps, au fin fond du continent américain, au-dessous du 42ème parallèle.

« Nous avancions lentement sur une route de graviers car, selon la devise des Patagons, se hâter est le plus sûr moyen de ne pas arriver et seuls les fuyards sont pressés ».

Ils nous livrent ici le concentré, l’essence même de ce qu’est le voyage : la rencontre avec l’autre. Et puis un constat, terrible, le constat d’une disparition. Patagonie, Terre de Feu, des noms qui pourtant évoquent encore tout un univers de mythes, d’aventures et de rêves, tout ça disparaît, comme ont disparu les tout premiers habitants, « Les autres ethnies ont succombé aux règles d’un progrès dont nul n’est capable de définir les fruits », premières victimes d’un engrenage qui broie toujours plus vite, aussi féroce qu’aveugle, un monde emporté dans la grande gueule d’un capitalisme toujours plus vorace. Ainsi de carnet de voyage, le livre devient une sorte d’« inventaire des pertes », et les superbes photos en noir et blanc de Mordzinski appuient sur cet aspect de monde dont il ne resterait que des ombres, un monde à l’abandon, échoué comme une baleine sur les rives d’une mondialisation dévorante et inhumaine.