Depuis des années déjà, le monde est confronté à la question des « réfugiés, des migrants, des exilés ». Des guerres, le terrorisme, des dictatures, la misère, ont poussé des millions de gens à partir de chez eux et à se mettre en route vers L’Europe, vers les Etats-Unis, en traversant les déserts, les grands fleuves, l’Océan et la Méditerranée. La littérature sous toutes ses formes, l’art, témoignent de ces parcours terriblement périlleux, mais la plupart du temps il s’agit d’un point de vue occidental. Le texte de Sufo Sufo, lui, est un regard africain posé sur ces départs vers un « là-bas » fantasmé. L’image de la première de couverture détermine le cœur du texte : des amarres et un fragment de coque de bateau : il sera question en vérité d’attachement ou de détachement, de partir ou de rester au port, au pays. A aucun moment l’auteur par le biais de ses personnages ne révèlera explicitement le nom du pays, de la ville portuaire, qui fait l’unité de lieu. Toutefois à plusieurs moments, le lecteur comprend qu’il s’agit bien du Cameroun, avec des allusions à l’entreprise coloniale allemande ou aux émeutes de la faim de 2008 ; sans parler des tensions et des violences dans les zones anglophones du pays. Un état de guerre (sociale, politique) qui ne s’avoue pas.