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Les Livres

À la lumière de Renoir, Michèle Dassas (par Fawaz Hussain)

Ecrit par Fawaz Hussain , le Mercredi, 12 Janvier 2022. , dans Les Livres, Recensions, La Une Livres, Biographie, Roman, Ramsay

À la lumière de Renoir, Michèle Dassas, 293 pages, 19 € Edition: Ramsay

Dès l’avertissement de sa « biographie romancée », Michèle Dassas déclare s’inspirer largement du livre de Jeanne Baudot, Renoir, ses amis, ses modèles, paru en 1949. Mais comme nous le savons, et malgré les abondantes références qu’elle énumère, et auxquelles elle puise, la romancière réserve une part importante à son imaginaire, cette « sève de tout roman ». Elle le fait en comblant les lacunes dans ce qu’on sait de la vie de cette artiste et peintre française née en 1877 à Courbevoie et morte en 1957 à Louveciennes.

Or, si l’on ne compte plus les monographies consacrées ces derniers temps à des peintres très célèbres comme Giacometti, Picasso, le Caravage et d’autres, moyennant des nuits et des nuits passées par leurs auteurs dans de grands musées nationaux et européens, ce n’est pas le cas de Michèle Dassas, qui se penche sur la vie et l’œuvre d’une femme et d’une artiste peu connue, du grand public en tout cas. Elle se distingue de cette vague à la mode et souhaite réparer une injustice. Les presque trois cents pages de son texte ressuscitent la complice que représenta Jeanne Baudot pour Renoir pendant plus de vingt-six ans. Elle se glisse dans la peau de son héroïne pour revivre avec elle une époque riche en courants artistiques et littéraires, et qui connut bien des soubresauts.

Un cœur si blanc, Javier Marias (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mardi, 11 Janvier 2022. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Espagne, Folio (Gallimard)

Traduit de l'espagnol Anne-Marie Geninet, Alain Keruzoré Edition: Folio (Gallimard)

 

La voix de Javier Marias s’insinue, serpente, creuse, obsède, dans ce monologue romanesque, ce flux de conscience aux ramifications inattendues, parfois surprenantes, mais toujours inscrites dans une cohérence narrative de la plus grande précision. Le narrateur parle. Nous parle ? Se parle ? « Ah ! insensé qui crois que je ne suis pas toi ! » disait Victor Hugo dans la préface des Contemplations. Le murmure invasif du narrateur touche sans cesse à l’universel, à la condition humaine en ce qu’elle détient de divin et de trivial, en ce qu’elle traverse de grandeurs et de bassesses. La phrase de Marias étreint, embrasse, cherche à totaliser la conscience intime d’un homme effaré par les choses de la vie, enfoncé dans une solitude absolue au milieu des siens, père, épouse, amis. La phrase tricote, tisse infiniment une toile dont chaque fibre est un tremblement de l’être. Un point s’évase en tissu qui, à son tour, donne un point qui s’évase en tissu, dans une arborescence où le narrateur épingle le sens, le non-sens, de sa vie, ses amours, son métier de traducteur, sa filiation, son récent mariage, le hasard et ses choix, sa terreur d’être enfin.

De la profondeur, Alain Marc (par Gilbert Bourson)

, le Mardi, 11 Janvier 2022. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED

De la profondeur, Alain Marc, Editions Douro, septembre 2021, 220 pages, 19 €

 

Sous la forme d’un journal, d’un « au jour le jour » de lectures d’auteurs aux écritures d’intensités diverses, Alain Marc nous promène dans une bibliothèque souvent cousine de la nôtre, et ce, en de courtes notes, parfois de pur enthousiasme et parfois de petites mises au point personnelles sur une œuvre. Ses considérations ne sont jamais péremptoires, mais on suit le parcours d’un lecteur qui nous fait part de ce qu’il retient d’un auteur et comme il le situe dans son panthéon personnel. Ses considérations sont toujours pertinentes car elles ne dérivent jamais vers un jugement quelconque.

Ce livre est davantage un recueil de descriptions d’œuvres, comme d’objets dont on recense les qualités, que d’articles censés analyser les performances littéraires d’un écrivain. Lire De la profondeur est agréable à plus d’un titre, car on peut y « chiner » en l’ouvrant n’importe où, pour y rencontrer ses favoris (comme on dit aujourd’hui) où découvrir ce que pense de tel ou tel que nous n’apprécions guère, notre lecteur si avide de nous faire partager son érudite aventure livresque.

Archi/Design, Revue Critique n°891-892, Août-Septembre 2021 (par Charles Duttine)

Ecrit par Charles Duttine , le Lundi, 10 Janvier 2022. , dans Les Livres, Recensions, La Une Livres, Revues

Archi/Design, Revue Critique n°891-892, Août-Septembre 2021, 144 pages, 13,50 €

 

Du design comme vision du monde

Le sens courant du mot design est associé au monde de la consommation et à la production d’objets fonctionnels qui peuplent notre quotidien. En creusant quelque peu, la beauté et l’usage y sont en osmose, sans décoration superfétatoire. La forme de l’objet et son utilité s’accordent en harmonie, art et industrie n’y sont plus en opposition. Le design serait ainsi à la croisée des chemins qu’on pourrait croire indépendants et foncièrement dos à dos, comme la réflexion esthétique et la production de masse. L’intérêt de la livraison d’Août-Septembre de la Revue Critique, intitulée Archi/Design, est de parcourir toutes sortes de variations autour de ce terme de « design », de les approfondir, et de les mettre en perspective, notamment dans son dialogue avec l’architecture, ce qui rend ce numéro bienvenu et intéressant à découvrir.

La Peinture et le cri, Jérôme Thélot (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 10 Janvier 2022. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED, Arts, L'Atelier Contemporain

La Peinture et le cri, Jérôme Thélot, octobre 2021, 184 pages, 25 €

N’es-tu pas reine ô toi que découronnera

La camuse au milieu des infâmes cris noirs

N’es-tu pas à présent le charnel chant du soir

N’es-tu pas la beauté que la mort posséda ?

Pierre Jean Jouve

Cri noir

La Peinture et le cri aurait pu se sous-titrer : Variations sur le cri. Car de Pollaiolo à Francis Bacon, Jérôme Thélot explore la production plastique occidentale du cri en peinture, s’appuyant sur l’effet de punctum qui prend sens dans la vision légèrement inquiète que suscitent les tableaux. Donc, il oriente le regard vers un suspens, un point d’orgue, un accent bruyant et muet, si cet oxymore convient, vers la bouche ouverte et béante de personnages sacrés ou profanes.